La schizophrénie n’est pas une seule maladie mais huit<!-- --> | Atlantico.fr
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Une étude récente sur les origines pathologiques de la schizophrénie met en lumière l'existence de 8 gènes participants.
Une étude récente sur les origines pathologiques de la schizophrénie met en lumière l'existence de 8 gènes participants.
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Causes multiples

Une étude récente sur les origines pathologiques de la schizophrénie met en lumière l'existence de 8 gènes participants. Si la découverte ne fait que confirmer des doutes déjà bien ancrés, elle permettra surtout d'ouvrir la voie de la thérapie génique et épigénétique.

Jean-Charles Pascal

Jean-Charles Pascal

Jean-Charles Pascal est psychiatre des Hôpitaux. Ancien chef de service à l'Hôpital ERASME, il est président d'Honneur de la Société de l'Information Psychiatrique et psychiatre consultant au Centre Jean Wier.

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Atlantico : La schizophrénie est le résultat de huit troubles génétiques distincts. C'est ce que révèle l'équipe du chercheur Cloninger dans une publication de la Washington University à St Louis. Les liens entre la schizophrénie et la génétique étaient-ils avérés ? Quelles sont les grandes révélations de cette publication ?

Jean-Charles Pascal : Nous avons longtemps cherché un gène responsable, il n'y en a pas qu'un seul mais huit et probablement plusieurs encore qui participent à une vulnérabilité. Si les huit gènes sont concernés, la vulnérabilité est extrême, si c'est uniquement certains gènes, elle sera modeste.

La question se pose davantage sur l'origine des schizophrénies, car il y des formes très différente de chaque maladie. Certaines permettent d'avoir une vie presque normale alors que d'autres sont complètement invalidantes. Globalement, l'origine de la schizophrénie est complexe. Certains chercheurs pensaient que nous pouvions trouver un seul gène de la schizophrénie, alors qu'en réalité, il y a énormément de morphotypes qui ensemble constituent cette pathologie. Dans une famille, il peut y avoir un frère ou une sœur atteint de la maladie et pas les autres. Par contre, les vrais jumeaux sont davantage enclins à avoir la même maladie. En somme, il y a réellement un impact génétique mais absolument pas une cause génétique unique.

Récemment, des éléments très importants ressortent des études dites "épigénétiques", ces travaux anciens, réactivés dernièrement, montrent que des événements de vie peuvent s'inscrire génétiquement. Pour être plus explicite, cela signifie qu'un événement dramatique n'a pas uniquement un souvenir mémoriel mais il peut s'inscrire génétiquement de ce traumatisme. Nous approchons probablement de la réalité de l'origine car auparavant, nous avions ou la position des généticiens ou le postulat psycho-dynamique. Ces deux pôles ne communiquaient pas. Or, aujourd'hui c'est probablement dû à ces deux facteurs.

Au fond, chaque maladie est à la fois issu d'une prédisposition ou plutôt une vulnérabilité qui peut être décompensée par des événements de vie. En d'autres termes, pour le même profil génétique, certains seront atteints de la schizophrénie et d'autres non.  Le problème c'est que même si nous comprenons de mieux en mieux comment la maladie peut survenir, ces données très modernes n'ont pas encore de traduction thérapeutique.

En quoi cette découverte est-t-elle importante ?

Elle est importante car si nous arrivons dans le futur à bien isoler ces gènes, nous pourrons mieux protéger de la maladie les personnes avant même que celle-ci se présente. Plus tôt nous intervenons dans la maladie, moins le patient est exposé. Elle ouvre de nouvelles voies dans le traitement de la maladie.

Où en est-on de la recherche en termes de thérapie génique ? Quelle voie la découverte de l'équipe du Dr Cloninger ouvre-t-elle en termes de traitement ?

Pour ce qui est de la psychiatrie, il n'y pas encore d'éléments de recherche. Actuellement, nous n'avons pas encore d'hypothèses de thérapies géniques ou alors ces techniques sont encore au stade expérimental. Nous ne sommes pas dans le champ de l'application. 

Il n'y a pas un seul gène de la schizophrénie mais une trentaine qui sont fortement concernés par la pathologie. Dans l'avenir, nous pouvons penser que dès qu'il existera des thérapeutiques génétiques, il sera possible d'intervenir sur les principaux gènes qui dysfonctionnent et que nous retrouvons dans la schizophrénie. Nous sommes malgré tout encore loin de cette voie.

La certitude du facteur génétique ferme-t-elle la porte à d'autres facteurs, casse-t-elle des mythes infondés ?

Non car le fait qu'il y ait un impact génétique est quelque chose que l'on sait depuis. Ce qui est vraiment nouveau en revanche, ce sont que les fractures génétiques qui  peuvent être influencées par un certain nombre d'éléments extérieurs, c'est l'épigénétique qui ouvre des possibilités thérapeutiques multiples. Les découvertes récentes permettent au contraire de faire communiquer entre elles des positions qui jusqu'ici s'opposaient.  

Cette découverte peut-elle aider la médecine à avancer dans d'autres maladies que la schizophrénie?

Plus nous en savons sur ces gènes vulnérables, plus les spécialistes pourrons intervenir. D'ores et déjà,  il y a des spécialités médicales où la thérapie génétique est très avancée. Pour ce qui est de la psychiatrie, nous sommes encore au stade de la recherche. 

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