Pourquoi il ne suffira pas d’une baisse de l’euro pour relancer la croissance en Europe<!-- --> | Atlantico.fr
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L'euro a perdu 10% face au dollar depuis le début de l'année.
L'euro a perdu 10% face au dollar depuis le début de l'année.
©Reuters

Sans surprise

L’euro n’a pas cessé de baisser : près de 10 % depuis le début de l’année. Mario Draghi, le président de la BCE si contesté, a baissé les taux d’intérêt et est prêt à racheter de la dette comme n’importe quelle banque centrale occidentale. Jamais la politique monétaire n’a été aussi accommodante… et pourtant il ne se passe strictement rien sur le front de l’économie.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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C’est quand même un comble ... La banque centrale européenne a fait tout ce que les militants du monétarisme a tout crin réclamaient… Des Arnaud Montebourg aux écologistes, en passant par les experts de l’extrême gauche (Jacques Généreux) et les tribuns de l’extrême droite, tous les nostalgiques du Keynésianisme. En gros, et pendant plus d’un an, le raisonnement des français bienpensants étaient simple : l’économie française est en panne parce qu’il n y a pas de demande… Elle est en panne parce que la Banque centrale européenne applique les directives "idiotes" de Maastricht… et elle organise la rigueur, l’austérité sous la coupe de l’Allemagne.

D’ailleurs, regardez ce qui se passe aux USA ou en Grande Bretagne, la croissance est repartie… croissance, investissement, emplois. Tout est reparti parce que la Reserve fédérale et la Banque d’Angleterre ont fait fonctionner "la planche à billets."

Ce discours a convaincu beaucoup de Français parce qu'il nous exonérait de faire les efforts de restructuration. Du coup, les partis politiques et les syndicats n’ont pas cessé de crier sur l’Allemagne, sur Merkel, sur Mario Draghi... le festival des bouc-émissaires. A tel point que François Hollande et même Manuel Valls se sont mis à crier aussi. Curieusement, Bercy, depuis le départ de Montebourg est resté discret sur ce dossier. Emmanuel Macron, Michel Sapin sont resté prudents. Ils connaissent la musique. Ils ont eu raison.

1e point, il se trouve que pour plein de raisons, l’euro a baissé de près de 10% depuis le début de l’année. 10% c’est énorme. L’euro vaut aujourd’hui 1,27 euro pour un dollar. Il a baissé parce que l’économie européenne a piqué du nez (pas de croissance), il a baissé parce que l’économie américaine va bien, il  a baissé parce que les taux d’intérêt de la BCE n’ont jamais été aussi bas, à 0,15%. Il a baissé enfin parce que Mario Draghi a commencé à ouvrir les robinets de la création monétaire en rachetant de la dette.

2e point, la BCE a fait depuis trois mois plus que ce que faisait la Réserve fédérale. Mario Draghi ne l’a pas crié sur les toits, mais il a bravé les Allemands qui, un peu perdus dans leurs statistiques de croissance, ont fait semblant d’accepter ce changement de braquet. Mario Draghi a fait le Job. Il ne peut pas en faire plus.

3e point, cette politique monétaire newlook n’a strictement rien changé au niveau de l’activité. Certes les exportateurs ne s’en plaignent pas. Cette baisse de l’euro représente un ballon d’oxygène, mais comme la balance extérieure française est déficitaire, les inconvénients sur le renchérissement des importations pèsent très lourds sur les consommateurs... l’energie, les importations en provenance de Chine, d’Inde ou d’Afrique coûtent plus cher. Normal, la France n’a plus d’industrie.

4e point, pourquoi la machine ne redémarre pas ? Tout le monde l’espérait. La machine ne redémarre pas parce qu'’une dépréciation monétaire doit être violente et importante pour produire des effets. Par ailleurs, elle ne peut fonctionner que si l’économie se mettait en position de compétitivité. On retombe sur les fondamentaux français. Que le gouvernement fasse les réformes de structures, qu' il améliore la compétitivité, les coûts (baisse des charges), qu' il dynamise l’innovation et l’offre en général, qu' il baisse les frais généraux, et les dépenses publiques et ça redémarrera.

Sans politique structurelle, la politique monétaire ne sert à rien. Au mieux, elle sert à tirer un feu d’artifice, mais au fond, tout dépend du travail, de la quantité de travail, de la productivité et du talent des chefs d’entreprise. De leur liberté de travailler, de respirer.

La meilleur preuve est la reprise américaine : les emplois ont été générés par des baisses de salaires et d’actifs, par des baisses de charges et d’impôts et surtout par une baisse importante de l’energie (les gaz de schiste). La politique monétaire a accompagné  cette lame de fond et a surtout alimenté la spéculation financière. Idem en Grande Bretagne.

On en revient toujours à la case départ. La BCE a fait son  job, les gouvernements n’ont pas fait le leur, le gouvernement français a refusé les reformes. Il n’a rien fait pour améliorer la solidarité européenne. Il a tout fait pour éviter de remplir ses engagements.

L’économie fonctionne à la confiance. Les acteurs n’ont plus confiance en la France.   

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