Quand les fonctionnaires de la Police de l’Air et des Frontières d’Hendaye se rebiffent contre les déroutants objectifs qu'on leur impose<!-- --> | Atlantico.fr
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La politique du chiffre refait surface dans la police.
La politique du chiffre refait surface dans la police.
©Reuters

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Malgré les consignes de la Place Beauvau, la politique du chiffre demeure. Après le commissariat de Flers, voici le (mauvais) exemple de la PAF d’Hendaye.

Gilles Gaetner

Gilles Gaetner

Journaliste à l’Express pendant 25 ans, après être passé par Les Echos et Le Point, Gilles Gaetner est un spécialiste des affaires politico-financières. Il a consacré un ouvrage remarqué au président de la République, Les 100 jours de Macron (Fauves –Editions). Il est également l’auteur d’une quinzaine de livres parmi lesquels L’Argent facile, dictionnaire de la corruption en France (Stock), Le roman d’un séducteur, les secrets de Roland Dumas (Jean-Claude Lattès), La République des imposteurs (L’Archipel), Pilleurs d’Afrique (Editions du Cerf).

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La politique du chiffre referait-elle subrepticement surface dans la police, notamment à la Police de l’Air et des frontières (PAF) d’Hendaye (Pyrénées-Atlantiques) ? Après le commissariat de Flers (Orne) et sa course "à la recherche de délits (sic)", révélée la semaine dernière par Atlantico, voici que la direction de ce service fixait à ses fonctionnaires la feuille de route avec les objectifs qui devaient être atteints pour l’année 2014. 

Selon cette feuille de route, la PAF d’Hendaye aurait dû interpeller 85 individus porteurs de documents falsifiés, 1 767 étrangers en situation irrégulière, 45 individus se livrant à un trafic de migrants et éloigner 47 personnes se trouvant en infraction avec la législation sur les étrangers. Ainsi donc, chose incroyable, la PAF fixe le nombre de personnes à arrêter, avant que la commission d’une infraction ne soit décelée… Une drôle de méthode qui risque selon certains policiers de déboucher sur des arrestations arbitraires. 

Pour parvenir à de tels résultats, le directeur de la PAF des Pyrénées-Atlantiques, dans une lettre de mission d’avril 2014, demandait à ses troupes "de maintenir un bon niveau d’investissement pour aboutir à une pression suffisante sur les flux" souhaitant "une amplification de la lutte contre la fraude documentaire", le directeur invitait les policiers "à maintenir une lutte efficace contre les trafiquants de migrants." Tout cela bien sûr dans le respect de la déontologie. Rien à dire. Sauf que ces exhortations, si l’on en croit une note récente du capitaine, patron du service de la PAF territoriale, qui dirige les 75 policiers en tenue du service, n’a pas eu les effets escomptés dans une unité. Voici ce qu’écrit l’officier : "Force est de constater, malgré l’ensemble des réunions de service internes ou de direction (…) que le bilan 2014 jusqu’au 15 septembre 2014, n’est pas satisfaisant et qu’il existe de réelles disparités entre les brigades". Et le capitaine de mettre les points sur les i : "L’unité N1 –[ il  s’agit d’une brigade de nuit-] révèle une activité bien en deça de ce qui pourrait être réalisé". En revanche, écrit en substance la note, bravo à l’unité N2, dont l’enthousiasme ne tarit pas et qui a réalisé les objectifs retenus pour 2014…

Inutile de le dire, ces remarques n’ont pas reçu une adhésion débordante chez les policiers en tenue de la PAF d’Hendaye, c’est le moins qu’on puisse dire. D’autant qu’au sein du service, des voix s’élèvent pour dénoncer le manque de dialogue dont le capitaine serait coutumier. Tout en laissant entendre que les pressions de ce dernier quant aux résultats à obtenir ne sont pas innocentes puisqu’elles lui permettent d’espérer un maximum de primes. Pour l’Unsa-Police, il ne s’agit, dans cette course à la performance à tout prix, que d’une illusion de travail bien fait. De plus, déclare le porte-parole de l’organisation syndicale, Christophe Crépin, "cette pression permanente conduit à un surmenage des fonctionnaires de police au-delà du raisonnable". Et ce dernier de nous révéler que ces dix derniers jours, cinq policiers se sont suicidés avec leur arme de service… Autant de drames sur lesquels la place Beauvau reste bien discrète.

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