La rude course aux applications gagnantes : les détenteurs de Smartphones en installent 25 en moyenne mais n’en utilisent en fait que 4<!-- --> | Atlantico.fr
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4 applications nous serviraient quotidiennement sur nos smartphones.
4 applications nous serviraient quotidiennement sur nos smartphones.
©Reuters

Tout ça pour ça

Sur les 25 applications que l'on téléchargerait en moyenne sur nos smartphones, seules quatre nous serviraient quotidiennement. C'est ce que révèle une étude menée par Statista, institut de statistiques spécialisé dans les données Internet.

Catherine Lejealle

Catherine Lejealle

Catherine Lejealle est docteur en sociologie et ingénieur télécom (ENST Bretagne). Elle est professeur à l'ISC Paris et co-fondatrice de la Chaire Digital BusinessSes domaines de recherche couvrent les usages des TIC (téléphone portable, Internet, médias sociaux…)

Elle a publié La télévision mobile personnelle : usages, contenus et nomadisme,  Les usages du jeu sur le téléphone portable : une mobilisation dynamique des formes de sociabilité  aux Editions L'Harmattan et J'arrête d'être hyperconnecté ! : 21 jours pour réussir sa détox digitale chez Eyrolles.

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Atlantico : Selon de récentes statistiques établies par Statista, sur la moyenne de 25 applications téléchargées, nous n'en utiliserions que quatre la majeure partie du temps, à savoir 75 % du temps. Quel type d'applications utilise-t-on principalement ?

Catherine Lejealle : On utilise principalement des applications qui nous permettent de communiquer avec les autres, des applications de messages comme Snapchat, What’s app, Facebook Messenger – bien qu’assez délaissées par les jeunes aujourd’hui – ou encore Twitter.

En deuxième position, il y a les applications utilitaires, c’est-à-dire des applications qui vont nous rendre service, nous informer sur les horaires de bus ou de cinéma par exemple et que l’on va avoir tendance à consulter régulièrement.

Viennent ensuite les applications que l’on pourrait qualifier d’hédonistes ou ludiques. Notre portable nous est régulièrement à portée de main. Par conséquent, dès lors que l’on a un temps mort, on va avoir tendance à jouer à des jeux ou lire l’actualité.

Finalement, il s’agit d’applications que l’on utilise par contrainte de temps, des applications que l’on peut aisément utiliser dans notre quotidien et notre routine. Elles ne sont certes pas très exotiques mais elles remplacent en quelque sorte les objets que l’on avait avant comme un programme cinéma papier ou un journal et elles nous donnent en quelques doigtés ce dont on a besoin.

Qu'est-ce que cela révèle de notre rapport au téléphone portable ? 

Cela révèle du simple fait que le téléphone portable est devenu un outil addictif et que nous sommes tous devenus hyperconnectés.

69 % des gens préféreraient perdre leur porte-monnaie ou leurs clés plutôt que leur téléphone portable. Par ailleurs, 66 % sont nomophobes (de "no mobile phobie"), c’est-à-dire qu’ils ne pensent pas pouvoir supporter être sans portable, tandis que 58 % des gens consultent leurs messages via leur portable pendant leurs vacances. Tous ces chiffres nous montrent bien l’outil relationnel qu’est devenu le téléphone portable. Grâce à lui, on est constamment relié à nos proches, on se crée une véritable identité numérique, on laisse une trace de notre vie, on documente sa personne… Le portable est en fait devenu un couteau-suisse qui nous aide à nous développer, une extension de nous-mêmes.

Sans oublier la FOMO (Fear of missing out), soit la peur de rater quelque chose. Ces personnes-là ne vivent ni dans le passé, ni dans le futur mais dans un présent démultiplié, c’est-à-dire qu’ils seront quelque part, tout en étant ailleurs via leur portable. Une enquête a d’ailleurs montré que les jeunes ne passent en moyenne que 97 minutes dans une soirée, puis passe à une autre : ils seront à une soirée, enverront et partageront des photos et penseront déjà à la prochaine soirée. On assiste donc à une densification des moments afin d’être un peu partout à la fois.

Enfin, dès lors que l’on n’aura rien à faire ou que l’on devra attendre quelque chose, le portable permet de nous occuper : il y aura toujours quelque chose à voir, à liker, à partager, à lire, accompagné de cette impression de vivre parce que l’on participe aux choses.

Quelles sont les applications les moins utilisées ? Comment expliquer que nous téléchargions autant d'applications alors même que nous ne les utilisons quasiment pas ? 

Les applications les moins utilisées sont essentiellement liées à des marques. Elles ne constituent pas un usage récurrent et on oublie simplement de les effacer. La plupart des téléphones portables aujourd’hui ont assez de mémoires pour que finalement on n’ait pas de choix à faire parmi toutes nos applications. Un ami va nous en conseiller une, on va vouloir en tester une, on la télécharge et puis on la laisse. Et petit à petit les applications s’accumulent, tandis que l’on se dit qu’elles serviront sûrement un jour. D’autant plus que la possibilité d’avoir plusieurs écrans sur nos téléphones fait que ces applications ne nuisent pas à notre vue étant donné qu’on ne les voit pas.

Qu'est ce que cela traduit de notre société et de notre rapport à la consommation ?  

Tout cela dévoile un aspect un peu compulsif de notre humanité, mais aussi très joyeux et très enthousiaste. Beaucoup de curiosité et de découverte se cache derrière ces téléchargements et l’utilisation que l’on en fait. De plus, il y a également un aspect relativement affectif dans notre rapport aux applications. Elles vont constituer au fil du temps un véritable parcours de mémoire et l’on se rappellera en les redécouvrirant d’une certaine époque.

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