L'autorité de Manuel Valls sera-t-elle vraiment suffisante pour sauver la fin du quinquennat Hollande ?<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Politique
Manuel Valls a discuté ce lundi avec François Hollande de la composition du prochain gouvernement
Manuel Valls a discuté ce lundi avec François Hollande de la composition du prochain gouvernement
©Reuters

Du changement

Le premier gouvernement Valls aura tenu moins de cinq mois. En effet, ce mardi 26 août, le Premier ministre doit annoncer sa nouvelle équipe suite au départ des trublions Arnaud Montebourg, Aurélie Filippetti et Benoît Hamon, tous les trois en désaccord avec la politique d'austérité menée par François Hollande. Une violente crise gouvernementale qui remet en cause l'autorité du chef du gouvernement.

Anita Hausser

Anita Hausser

Anita Hausser, journaliste, est éditorialiste à Atlantico, et offre à ses lecteurs un décryptage des coulisses de la politique française et internationale. Elle a notamment publié Sarkozy, itinéraire d'une ambition (Editions l'Archipel, 2003). Elle a également réalisé les documentaires Femme députée, un homme comme les autres ? (2014) et Bruno Le Maire, l'Affranchi (2015). 

Voir la bio »

Y a-t-il des dates prédestinées pour les remaniements ministériels ? En tout cas il existe des hasards frappants : comment ne pas évoquer ce 25 août 1976, jour où  le Premier Ministre d'alors, Jacques Chirac a claqué la porte de Matignon avec fracas, mettant fin à la crise larvée avec Valéry Giscard d'Estaing au sein du gouvernement, et  déclenchant  des hostilités au sein de la Droite qui se sont soldées par l'échec de VGE en 1981. Chirac déclarait ne pas "disposer des moyens  pour assumer efficacement sa fonction de Premier ministre". Mais par delà les problèmes d'autorité sur  sa majorité, les moyens de lutter contre la crise économique consécutive au choc pétrolier étaient (déjà !) au centre de la dispute entre le président de la République et le Premier ministre de l'époque. A ceci près qu'en ce temps là c'était l'inflation et non la déflation que l'on redoutait en France.

En 1976  il n'y a pas eu de départ surprise. Jacques Chirac avait programmé sa sortie, et VGE  avait eu le temps de préparer son remplacement par Raymond Barre, qualifié alors  de "Joffre de l'Economie". De 1976 jusqu'à la fin du septennat de Giscard, la majorité est allée de crise en crise, mais VGE ayant brandi la menace d'une dissolution, jamais les députés chiraquiens n'ont osé appuyer sur la gâchette et renverser le gouvernement sur  un vote budgétaire fondateur d'une majorité. 

Aujourd'hui, le départ d'Arnaud Montebourg, qui a entraîné celui de Benoit Hamon et d'Aurélie Filippetti, ébranle l'édifice gouvernemental. Il jette une lumière crue sur les dissensions qui règnent au sein du PS à propos du pacte de solidarité et de responsabilité, auquel l'aile gauche du Parti reproche  de trop favoriser  les entreprises par rapport aux salariés. François Hollande et  Manuel Valls n'avaient pas anticipé  pareille situation qui met la majorité en péril et pourrait, à terme, provoquer la chute de François Hollande, affaibli par une impopularité sans précédent

C'est qu'il ne s'agit pas simplement de remplacer les partants. En lui demandant "de constituer une équipe en cohérence avec les orientations qu’il a lui-même définies pour notre pays", François Hollande demande à Manuel Valls de composer une majorité de rechange à celle qui l'a soutenu jusqu'à présent, afin de disposer du nombre de voix nécessaires au Parlement pour voter le budget 2015, ou du moins laisser passer le texte à la faveur de l'article 49/3. Une partie de l'opposition, tout  comme le Front National réclame une dissolution qui se solderait inéluctablement par un échec du PS. Cette nouvelle donne fait que c'est un nouveau gouvernement  et non une équipe remaniée qui va composer le gouvernement Valls 2.

Car en ce début d'automne 2014, c'est bien la question de l'existence même d'une majorité pour gouverner qui se pose en France : le tandem exécutif  se retrouve face à une majorité rétrécie, tellement étriquée que Manuel Valls, qui se verrait bien en "Joffre" de François Hollande, ne peut pas envisager de gouverner uniquement avec l'appui des députés socialistes, tendance sociale-démocrate. L 'explication est arithmétique : depuis leur arrivée au pouvoir en 2012, les socialistes ont perdu toutes les élections législatives partielles ; ils ne  sont aujourd'hui plus que 290, alors que la majorité absolue est de 289 voix. Or une contestation interne est en train de grossir en leur sein avec ceux que l'on nomme "les Frondeurs", dont le nombre varie de 20 à 40, qui refusent  la politique économique et socialiste du gouvernement. Jusqu'à présent ils se sont contentés de s'abstenir sur les textes controversés, mais au fil des semaines et des mois, ils pourraient s'enhardir et voter contre le gouvernement !

Quant aux Verts, ils n'ont jamais brillé par leur discipline de vote mais depuis le départ de Cécile Duflot et de Pascal Canfin , ils se situent encore plus à la marge de la majorité et n'ont pas voté en faveur du Pacte de responsabilité et de solidarité censé  apporter de l'oxygène à l'économie. Cependant le départ de leurs ministres du gouvernement  n'a pas fait l'unanimité en interne et si une autre personnalité écologiste acceptait un poste ministériel, Manuel Valls retrouverait un peu de marge. Et puis, le Premier ministre  ne peut se passer des Radicaux de Gauche ; ils apportent généralement leurs voix au gouvernement, mais ils sont vent debout contre la réforme territoriale qui entraînerait  la suppression des départements et ils ont menacé de quitter la majorité. Si Manuel Valls parvient à consolider leur soutien, ce sera au prix de concessions  sur la réforme territoriale ! Et ce n'est qu'un exemple.

Désormais l'adoption de toute loi donnera lieu à d'intenses tractations pour satisfaire les uns et les autres, signe de la faiblesse de l'exécutif et singulièrement du président de la République qui paie au prix fort  ses hésitations du début de son mandat ! Rude tâche pour le Premier ministre qui aura besoin de s'entourer de personnalités fortes pour tenir, avant même de penser à réussir à faire redémarrer l'économie et redonner le moral aux Français !

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !