Et Nicolas Sarkozy remonta dans les sondages... 60 % des sympathisants UMP le souhaitent comme candidat en 2017<!-- --> | Atlantico.fr
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Nicolas Sarkozy (ici en haut d'un escalator qui le mène à un avion) progresse dans l'opinion malgré les affaires qui l'entourent.
Nicolas Sarkozy (ici en haut d'un escalator qui le mène à un avion) progresse dans l'opinion malgré les affaires qui l'entourent.
©Reuters

Sondage exclusif

Dans un sondage exclusif Ifop pour Atlantico.fr sur la candidature préférée des sympathisants de l'UMP pour l’élection présidentielle, Nicolas Sarkozy progresse de 6 points par rapport à juin 2014, malgré sa mise en examen et les sursauts de l'affaire Bygmalion. Alain Juppé perd 4 points.

Xavier  Chinaud

Xavier Chinaud

Xavier Chinaud est ancien Délégué Général de démocratie Libérale et ex-conseiller pour les études politiques à Matignon de Jean-Pierre Raffarin.

Aujourd’hui, il est associé du cabinet de stratégie ESL & Network.

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Jérôme Fourquet

Jérôme Fourquet

Jérôme Fourquet est directeur du Département opinion publique à l’Ifop.

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Jean Petaux

Jean Petaux

Jean Petaux, docteur habilité à diriger des recherches en science politique, a enseigné et a été pendant 31 ans membre de l’équipe de direction de Sciences Po Bordeaux, jusqu’au 1er janvier 2022, établissement dont il est lui-même diplômé (1978).

Auteur d’une quinzaine d’ouvrages, son dernier livre, en librairie le 9 septembre 2022, est intitulé : « L’Appel du 18 juin 1940. Usages politiques d’un mythe ». Il est publié aux éditions Le Bord de l’Eau dans la collection « Territoires du politique » qu’il dirige.

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Atlantico : Comment expliquer la progression de 6 points de Nicolas Sarkozy auprès des sympathisants UMP par rapport au mois dernier ? Pourquoi ni sa mise en examen ni l’affaire Bygmalion n’ont eu d’impact négatif sur sa popularité, bien au contraire même ?

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Jérôme Fourquet : Ce qui frappe c’est son haut niveau et le fait que la hiérarchie soit spectaculairement  dominée par Nicolas Sarkozy avec 60%. C’est quasiment le plus haut score jamais enregistré depuis que ce baromètre existe, c’est-à-dire depuis plus d’un an. Si on se réfère en mai dernier avant l’affaire Bygmalion Nicolas Sarkozy a progressé de 10 points. Il est toujours le maître incontesté à l’UMP en dépit des récentes révélations. Cette nouvelle enquête montre donc que sa mise en examen n’a pas eu d’effet. La ligne de défense de Nicolas Sarkozy a fonctionné. Il y a une réaction épidermique des électeurs de droite qui voient leur parti en lambeaux et font bloc autour de lui en estimant qu’il y a une cabale contre lui. On peut néanmoins penser que la multiplication des affaires va aussi consolider contre Nicolas Sarkozy ceux qui ne veulent pas de lui aujourd’hui.

Nicolas Sarkozy s’impose d'autant plus que la droite semble aller à vau-l’eau. Les règlements de compte donnent une image déplorable de l’UMP et cela conforte le statut de recours de Nicolas Sarkozy. Les sympathisants UMP se disent qu’il n’y a pas de projet alternatif et résolu à la gauche donc Nicolas Sarkozy s’impose en dépit des difficultés judiciaires. L’électorat de droite est en outre très inquiet par l’état de leur pays. Il voit le déclin de la France à vitesse grand v et n’a aucune confiance vis-à-vis de l’exécutif actuel. Pour les sympathisants, le pays a besoin d’un homme exceptionnel qui fasse figure de recours et soit capable de sortir le pays de cette situation dégradée.  On constate aussi à la lecture de ce sondage que plus l’électorat est jeune plus il souhaite que ça soit Nicolas Sarkozy. L’électorat de droite jeune veut que ça bouge, il veut aller à la confrontation avec la gauche avec un leader charismatique et dynamique. Il y a toutefois quand même 40 % des sympathisants qui ne veulent pas de Nicolas Sarkozy. Cette opposition est moins virulente que dans l’état-major mais son retour éventuel ne se fera pas sans difficulté au niveau de certains électeurs de droite et de centre-droit qu’il faudra convaincre.

Xavier Chinaud : Tout d'abord, comme tout sondage, il faut prendre celui-ci comme une photographie de l'opinion à l'instant de sa réalisation, et prendre en compte la relative faiblesse de l'échantillon et non en retenir un caractère prédictif à près de 3 ans de l'échéance objet de l'étude ; il faut ensuite mettre en perspective les vagues successives depuis avril 2013 sur la même question.

Cela étant posé, que révèle le sondage : Nicolas Sarkozy reste en tête des sympathisants de l'UMP comme candidat préféré pour l'élection présidentielle. Cela est le cas de manière ininterrompue depuis la première vague, sur un score le mettant entre 50% (en mai dernier) et 63% ( en avril 2013). La progression constatée (6 points) depuis le mois dernier correspond  sans doute à la séquence de garde à vue dont l'ancien Président a été l'objet et le sentiment largement partagé que le traitement qui lui a été réservé dans la forme a choqué. Il est donc assez logique que corresponde une baisse cumulée équivalente des préférences exprimées quant aux candidatures possibles d'Alain Juppé et de François Fillon. A noter toutefois que Xavier Bertrand, pourtant clairement positionné face à N. Sarkozy, progresse lui d'un point.

Jean Petaux : Pour répondre précisément à votre question, il aurait fallu utiliser une méthode qualitative qui aurait permis de recueillir des "paroles de militants" et nous aurait permis de mieux cerner les ressorts de leur choix. Un point technique néanmoins à signaler, et qui n’est pas négligeable dès lors qu’il s’agit de sondage auprès de sympathisants. Le panel utilisé dans ce type d’enquête est forcément réduit (336 sympathisants). Pour un score pointé à 60%, avec un tel type d’échantillon, la marge d’incertitude est de 5,7% en plus ou en moins, donc pour être rigoureux il faut dire que Nicolas Sarkozy fait un score qui se situe entre 54,3% et 65,7%. Ce qui importe bien évidemment c’est le différentiel avec ses rivaux potentiels. En fait c’est très clair, quelque soit son score précisément, il écrase tous ses challengers, sauf un qui connait néanmoins une baisse de 4 points, Alain Juppé (avec une marge d’incertitude de plus ou moins 4,6%), par rapport au dernier sondage IFOP réalisé en juin 2014, quand Nicolas Sarkozy progresse, lui, de 6 points. Je ne trouve pas anormal que Nicolas Sarkozy progresse auprès des sympathisants UMP. Sa stratégie de victime paie auprès de ses soutiens politiques. La présentation, au soir de sa mise en examen, avec une mine grise et défaite, devant les téléspectateurs recherchait bien évidemment ce but et elle a bien fonctionné. Comment, quand on est un soutien (même peut-être un peu réservé) de Nicolas Sarkozy, ne pas prendre parti pour cet homme persécuté et objet de toutes les manœuvres politiques, ourdies au plus niveau de l’Etat avec le relais de "juges rouges" ? Dans cette logique, comme on est dans un "jeu à somme nulle" où ce que gagne l’un entraine des pertes chez les autres, rien d’étonnant à ce que le principe des "vases communicants" fonctionne parfaitement. Avec cette règle quasi-mécanique : c’est le deuxième qui perd le plus par rapport à ses suivants, tous sous la barre des 5%. Ce qui explique la perte enregistrée par Alain Juppé. Je note aussi deux autres points intéressants dans ce sondage IFOP. Ce sont surtout les jeunes (qu’on rencontre souvent dans les rangs de la "Droite décomplexée", celle de Geoffroy Didier et de Guillaume Peltier par exemple, qui sont les plus favorables à Nicolas Sarkozy, tout comme, second élément à noter, les sympathisants du Sud-Est sont de fervents soutiens de l’ancien président, à l’inverse de ceux déclarant résider dans le Sud–Ouest qui soutiennent le moins celui-ci. Ce sont donc les plus marqués à droite qui gardent leur confiance à Sarkozy, affaires ou pas.

A contrario, on assiste à une chute de 4 points d’Alain Juppé (de 22 à 18%). Pourquoi le maire de Bordeaux, qui jouit d’une côte de popularité importante, accuse-t-il toutefois un retard aussi important sur son principal adversaire dans la course à la présidentielle à droite ?

Jérôme Fourquet : Alain Juppé est toujours assez populaire chez les plus de 50 ans et dans le quart sud-ouest de la France mais il a perdu quelques points. Sa dynamique et sa progression sont stoppées depuis cet été 2014 avec son entrée dans l’atmosphère en faisant partie du triumvirat. Il a désormais les mains dans le cambouis et a perdu un peu son statut de sage actif. On constate aussi sur les autres enquêtes réalisées qu’Alain Juppé fait jeu égal avec Nicolas Sarkozy pour la présidence de l’UMP et peut avoir un rôle pour remettre de l’ordre et tenir le parti, panser les plaies et éventuellement en faire une machine de guerre. En revanche les électeurs de droite font la part des choses et se disent que le seul recours et espoir, Nicolas Sarkozy, doit être gardé en réserve pour la présidentielle sans qu’il s’abime.

Xavier Chinaud : Le terme de "chute" est à relativiser. Lorsque Nicolas Sarkozy était au plus haut en avril 2013 avec 63% de préférence, Alain Juppé ne bénéficiait que de 9% derrière François Fillon à 11%. Il est aujourd'hui à 18% (loin devant François Fillon à 5%).La présidentielle ne se jouera pas sur les seuls sympathisants déclarés de l'UMP et la structuration de l'électorat potentiel de chacun des deux est probablement différente. 

Jean Petaux :  J’ai déjà évoqué le principe des "vases communicants" qui fait que ce gagne Sarkozy en soutiens, Juppé le perd. Mais il existe, à mon sens, trois autres raisons. En premier lieu Alain Juppé n’apparait pas assez clivant pour les sympathisants (que l’on peut assimiler à des militants puisqu’ils se déclarent comme tels). Les militants d’un parti ont systématiquement tendance à soutenir celui qui dans le mouvement ou l’organisation qu’ils soutiennent est le moins "tiède", le plus tranchant, le plus différenciant par rapport aux adversaires. Dans un sondage où l’on interroge les individus en fonction de leur sensibilité politique, les "modérés" ne font jamais un gros score.  Deuxième raison : Nicolas Sarkozy a presque annoncé son retour sur la scène politique. Après avoir suscité l’attente et les espoirs de retour, il répond quasiment "oui" à ceux parmi ses soutiens qui rêvaient d’un retour non pas de l’Ile d’Elbe, mais du Cap Nègre… Il est donc là aussi normal que ces mêmes soutiens applaudissent à son retour et manifestent leur enthousiasme en le soutenant. Troisième raison : Alain Juppé apparaît comme un des leaders de l’UMP qui a liquidé Jean-François Copé. Même si les soutiens de ce dernier, dans les rangs militants et sympathisants de l’UMP ne nourrissaient pas une quelconque estime, avant cet épisode, pour l’ancien Premier ministre, maire de Bordeaux, on peut imaginer que cela ne s’est pas arrangé depuis.

François Fillon, lui, perd trois points et passe de 8 à 5%. Le nouveau triumvirat à la tête de l’UMP dont il fait partie paie-t-il le grand déballage des affaires qui a agité le parti ces dernières semaines ?

Jérôme Fourquet : François Fillon a monté le volume sonore ces dernières semaines en faisant partie du triumvirat. Il ne s’est jamais vraiment remis de sa rentrée de septembre 2013 où il avait notamment appelé à voter pour "le moins sectaire" en cas de duel FN – PS aux municipales. Son image avait été gravement atteinte par cet épisode et c’est Alain Juppé qui en avait profité. L’électorat de droite étant par ailleurs légitimiste une partie des gens qui ont été déçus par Nicolas Sarkozy lorsqu’il était président n’ont pas accepté le spectacle donné par le triumvirat avec les révélations dans la presse et le déluge des boules puantes.

Xavier Chinaud : Il ne faut pas amalgamer la situation de François Fillon avec celle du triumvirat. La séquence garde à vue / interview de Nicolas Sarkozy et le soutien mesuré qu'il a reçu conjugué aux attaques en règle de sa garde rapprochée contre le triumvirat ont manifestement joué en sa faveur ce mois-ci.

Jean Petaux : Vous avez raison d’évoquer aussi la situation de François Fillon. Pour ce qui le concerne, la troisième explication évoquée pour Alain Juppé, joue certainement à plein. Mais j’y vois aussi, dans le cas spécifique du "collaborateur de Nicolas Sarkozy" (sic), François Fillon, une vraie difficulté presque structurelle pour lui : comment faire croire qu’on est adversaire de quelqu’un dont on a été le Premier ministre pendant cinq ans ? Comment faire avaler la "pilule" de ce que les sarkozistes désignent forcément comme une trahison  ? Mais au-delà du cas Fillon, ce qui est frappant c’est de constater combien les "challengers" du "trio de tête" ("trio" très déséquilibré en termes de succès entre le premier et ses deux "dauphins") sont relevés à des niveaux ridiculement faibles, entre 4 % et 1%, deux d’entre eux n’étant même pas "mesurables". Cela montre qu’à droite il n’y a qu’un homme providentiel pour battre son ou sa rival.e au second tour de la présidentielle de mai 2017 : Nicolas Sarkozy. C’est toute la force mais aussi, paradoxalement, l’extraordinaire faiblesse de cette situation pour l’UMP, tellement cela rend tributaire le parti de la présence ou non dans le combat politique, à ce moment-là, de son héros.

Les sondages se suivent et ne se ressemblent pas pour Nicolas Sarkozy. Selon le baromètre Ipsos pour Le Point publié mardi 15 juillet, l’ancien chef de l’Etat perd 7 points dans le palmarès des leaders politiques des Français et atteint les 33 % de jugement favorable. Pourquoi ce paradoxe ?

Jérôme Fourquet : On est sur des populations et des dimensions différentes. Il aurait été étonnant que Nicolas Sarkozy ne baisse pas de plusieurs points avec les dernières affaires. Ses adversaires qui veulent se rassurer voient que son image baisse auprès des Français mais du côté des sympathisants de droite le paysage est tout autre. 

Xavier Chinaud : Le baromètre de l'IPSOS ne sonde pas exclusivement les sympathisants de l'UMP et ce sont, doit on le rappeler l'ensemble des Français qui voteront aux présidentielles...

La limite naturelle de sondages aussi loin de l'échéance  est qu'ils se font dans un contexte qui ne sera pas celui de l'élection et avec des candidats qui ne seront possiblement pas ceux de l'élection. 

Le contexte de l'UMP est aujourd'hui catastrophique et comme nous l'avons déjà évoqué sur Atlantico, il est logique que ceux des encore adhérents de l'UMP soient très majoritairement des fidèles de l'ancien chef de l'Etat. Que sera le contexte de 2017, qui sera celui qui, dans l' opposition, portera les espoirs d'une alternance ? Les cartes pourraient profondément être rebattues et le scenario est loin d'être même esquissé.

Jean Petaux : Pardon, mais je n’y vois aucun paradoxe. Les "populations" qui répondent dans les sondages, celui de l’IFOP pour Atlantico et celui d’IPSOS pour Le Point, ne sont pas du tout les mêmes. D’un côté les sympathisants UMP, de l’autre un échantillon représentatif de l’ensemble des électeurs français. Pour une majorité de Français, Nicolas Sarkozy ne doit pas revenir en politique. Non seulement parce qu’il est identifié comme un "coupable potentiel" mais aussi parce qu’un homme politique battu par le suffrage universel, en tant que président sortant, en France, a très peu de chances de revenir… On peut le regretter, mais c’est ainsi. C’est une sorte de loi mathématique et statistique, qui ne demande sans doute qu’à être invalidée, mais qui, pour l’heure, sauf mention contraire (et seule une expérience "réelle" pourrait l’infirmer), se porte bien. Pour autant, 33% de suffrages favorables pour Nicolas Sarkozy, malgré les 7 points de chute (c’est beaucoup), le score demeure assez élevé. Toujours plus haut que celui de François Hollande. Encore que ce qui compte c’est la pente des courbes. A bon droit, le président en exercice pourrait dire, croisant l’ancien en train de respirer l’air des sommets, "Bienvenu au club des impopulaires". Mais la politique porte en elle sa propre ruse : ce n’est pas parce que votre adversaire est rejeté que votre situation est remarquable pour autant.

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Propos recueillis par Julien Chabrout

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