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Maroc-Espagne : 
la guerre des nerfs médiatique
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Royaumes rivaux

Les gouvernements marocains et espagnols seront renouvelés à l'automne. En attendant, des rumeurs publiées dans la presse ne cessent d'exacerber les tensions nationalistes déjà existantes entre les deux pays.

Abdelmalek Alaoui

Abdelmalek Alaoui

Abdelmalek Alaoui est directeur général du cabinet de communication d'influence Guepard Group.

Il est l'auteur du livre Intelligence Economique et guerres secrètes au Maroc (Editions Koutoubia, Paris).

 

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Il y a une semaine, le journal espagnol ABC croit tenir un véritable scoop en prêtant au ministre de la Culture marocain, Bensalem Himmich, la  volonté pour  son département d’ « exploiter conjointement avec l’Espagne » le célèbre complexe historique de Grenade, au nom « des droits dont jouissent les descendants des bâtisseurs » . A la sortie de l’article, l’on assiste à une levée de bouclier générale en Espagne, car le palais de l’Alhambra constitue une véritable mine d’or, rapportant près de 453 millions d’euros en recettes et employant directement un peu moins de 6000 personnes.  

Sauf que, vérification faite, l’information véhiculée par ABC s’avère… fausse, le quotidien ayant repris des informations qui ont circulé sur Internet, notamment sur des sites ultranationalistes espagnols. Malgré les démentis officiels du gouvernement marocain, et le fait que le journal ait reconnu la  manipulation, cette affaire autour de l’ « Alhambra » est apparue aux observateurs comme  un énième avatar de la véritable guerre des nerfs que se livrent le Maroc et l’Espagne depuis  plusieurs  mois.

Une autre affaire aux aspects similaires avait  été déclenchée quelques semaines auparavant par El Pais, un autre  grand quotidien espagnol. Ce dernier, citant sans toutefois le publier un rapport secret des services de renseignement espagnols (le CNI), avait  accusé le Maroc de vouloir «utiliser la religion afin de contrôler ses immigrants établis en Espagne ». Le journal  évoquait ainsi  pour  étayer ses propos la tenue d’un conclave à Marrakech en 2008, organisé par le ministère marocain des affaires islamiques en faveur de ses imams officiant en Europe. Or, cette réunion publique, dont la tenue avait à l’époque été relayée par l’agence officielle marocaine MAP, avait eu pour objet l’approfondissement de l’apprentissage du rite malékite de l’islam marocain, reconnu pour sa tolérance et sa modération, et ne traitait pas des questions liées à la communauté marocaine établie à l’étranger.

Pour les spécialistes de la relation hispano-marocaine, il se pourrait que Madrid -qui traverse une crise économique sans précédent- soit en train de préparer son opinion publique à une cure d’austérité drastique et à une reprise en main sévère de sa politique d’immigration, d’où la nécessité de faire porter une partie de la responsabilité sur le Maroc afin de diffuser la tension interne. Côté espagnol, l’on se défend de nourrir un tel agenda à l’encontre du voisin maghrébin, qui est toujours considéré officiellement comme un « allié stratégique », l’Espagne étant le second partenaire commercial du royaume chérifien derrière la France.

Il faut dire qu’en moins de huit ans, le gouvernement actuel mené par le socialiste José Luis Zapatero avait permis de remettre sur les rails une relation bilatérale plutôt tumultueuse du temps où José Maria Aznar conduisait l’exécutif. Or, avec le retour probable du Parti Populaire(PP) au pouvoir, les Marocains redoutent une nouvelle dégradation de leurs relations avec l’Espagne, craintes exacerbées par la multiplication des « affaires » médiatiques.

Un prochain test crucial pour éprouver les relations des deux voisins devrait intervenir bientôt avec la visite programmée en septembre du patron du PP, Mariano Rajoy, aux enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla. Considérées par le Maroc comme  faisant partie intégrante du territoire chérifien, les deux villes devraient se retrouver au centre des débats des campagnes législatives des deux pays.

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