Israël et le Hamas en plein cycle de représailles : ce que peut se permettre Netanyahu<!-- --> | Atlantico.fr
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Benyamin Netanyahu.
Benyamin Netanyahu.
©Reuters

Œil pour œil...

Depuis que trois jeunes israéliens ont été enlevés et assassinés début juin, les représailles de part et d’autres n’ont cessé de gagner en intensité : deux jeunes palestiniens ont été tués, dont un brûlé vif, des roquettes ont été tirées depuis la bande de Gaza dans la nuit de lundi à mardi, ce à quoi Tsahal a répondu par des frappes aériennes. Maintenant, ce sont 40 000 réservistes qui ont été rappelés.

Frédéric Encel

Frédéric Encel

Frédéric Encel est Docteur HDR en géopolitique, maître de conférences à Sciences-Po Paris, Grand prix de la Société de Géographie et membre du Comité de rédaction d'Hérodote. Il a fondé et anime chaque année les Rencontres internationales géopolitiques de Trouville-sur-Mer. Frédéric Encel est l'auteur des Voies de la puissance chez Odile Jacob pour lequel il reçoit le prix du livre géopolitique 2022 et le Prix Histoire-Géographie de l’Académie des Sciences morales et politiques en 2023.

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Atlantico : Entre la Syrie en guerre civile et l’Irak aux prises avec l’EIIL, un autre front est-il sur le point de s’ouvrir à Gaza ? Si l’armée israélienne pénètre la zone, quelles seront les conséquences pour la région ? Ces conflits pourraient-ils finir par s’imbriquer ?

Frédéric Encel : D'abord je ne crois pas à une offensive massive au sol, qui braquerait les projecteurs sur Israël après plus de trois années d'état de grâce médiatique et diplomatique, notamment du fait du Printemps arabe alentours. Il y aurait nécessairement nombre de victimes civiles, et probablement Israël perdrait-il politiquement ce conflit. Ensuite, quoi qu'il arrive, je ne crois pas à une imbrication avec les guerres civiles de Syrie et d'Irak ; le conflit israélo-palestinien n'a rien à voir avec le Printemps arabe et ses répercussions, surtout en Irak où la situation était dégradée depuis longtemps déjà. Aujourd'hui, au Proche et au Moyen-Orient, la déchirure la plus meurtrière - sunnites contre chiites - est bien inter arabe et inter musulmane. Vous rendez-vous compte qu'en moins de trois années d'une répression inouïe (y compris contre les civils palestiniens de Yarmouk, près du centre de Damas), Assad a fait davantage de tués que toutes les guerres et hostitilités israélo-arabes confondues en 65 ans !

Comment Benyamin Netanyahu peut-il faire cesser l'escalade de la violence ?

Il ne serait pas incroyable que, discrètement, via l'Egypte ou les Etats-Unis, le Hamas et le gouvernement israélien trouvent un cessez-le feu, comme cela s'est du reste produit voilà trois ans. Car aucune des deux parties n'a intérêt à l'escalade ; le gouvernement israélien pour les raisons qu'on a vues, le Hamas car affaibli par la reprise en main au Caire du nationaliste al-Sissi.

Un certain nombre de voix israéliennes plaident pour une intervention au sol dans la bande de Gaza, et Benyamin Netanyahu a été fortement critiqué pour avoir présenté ses condoléances au père du jeune palestinien brûlé vif. Peut-il contenir cette pression interne ? Quels gages peut-il donner pour apaiser l’opinion israélienne ?

Il peut d'autant mieux la contenir qu'il est lui-même nationaliste. Si un Premier ministre de gauche présidait aux destinées du pays, il lui serait paradoxalement plus difficile de ne pas frapper car il craindrait les accusations de faiblesse ou de lâcheté. Souvenons-nous du centriste Ehoud Olmert et de ses alliés travaillistes, en 2006 face au Hezbollah... A la limite, je vous dirais que son problème, intérieur, provient de son turbulent allié ultra nationaliste Avigdor Lieberman. 

La ministre israélienne des affaires étrangères Tzipi Livni a déclaré que les différentes réactions à l’appel téléphonique de Netanyahou mettaient en évidence non seulement les divisions entre Israéliens et Palestiniens, mais entre les citoyens israéliens eux-mêmes, ajoutant que c’étaient ces dernières qui l’inquiétaient le plus. L’unité israélienne est-elle en jeu ? Quelles pourraient être les suites de ces événements au sein de la population ?

Elle a tout à fait raison d'alerter l'opinion. Le pire ennemi d'Israël pourrait bien résider dans ses propres frontières et non à l'extérieur, non pas chez les citoyens arabes mais bien au sein de la population juive ; après tout, celui qui assassina Rabin était un Juif  religieux... Cela dit, on n'en est pas là, et le calme dans lequel s'est déroulé le retrait de Gaza en 2005 doit inciter à la prudence lorsqu'on pointe des risques de graves tensions internes. 

La communauté internationale plaide pour un apaisement. En cas d’intervention israélienne dans la bande de  Gaza, quelles seraient les réactions des alliés traditionnels d’Israël ?

Ils n'interviendraient pas par le truchement de sanctions. Après tout, le Hamas n'a jamais été reconnu comme interlocuteur légitime , du fait de son triple refus de reconnaître Israël, de renoncer à la violence, et surtout de reconnaître les traités internationaux singés par l'Autorité palestinienne (à commencer par Oslo), et se voit pour l'heure accuser d'envenimer les choses. Néanmoins, la pression diplomatique s'exercerait tout de même sur Israël, surtout en cas de graves pertes humaines.
Propos recueillis par Gilles Boutin

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