La France ce pays où l'on attire les touristes... pour mieux les taxer<!-- --> | Atlantico.fr
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Laurent Fabius a annoncé une série de mesures pour atteindre les 100 millions de visiteurs par an.
Laurent Fabius a annoncé une série de mesures pour atteindre les 100 millions de visiteurs par an.
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Taxman

Quand une député PS parasite le plan Tourisme voulu par Laurent Fabius au parlement, la situation devient rapidement incompréhensible, incohérente et contre-productive. Pour atteindre les 100 millions de touristes en France, il faudrait peut-être commencer par ne pas leur faire payer plus cher.

Guy Raffour

Guy Raffour

Guy Raffour est le fondateur du Cabinet Raffour Interactif, spécialisé dans les études dédiées au secteur du tourisme depuis 1988. Son site :  www.raffour-interactif.fr

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Atlantico : Lors de la clôture des assises du tourisme jeudi 20 juin dernier, Laurent Fabius avait annoncé une série de mesures pour atteindre les 100 millions de visiteurs par an. Jeudi 26 juin dernier, le Parlement a voté un amendement déposé par une député PS, autorisant une multiplication par 5 de la taxe de séjour. Que révèlent de telles contradictions ?

Guy Raffour : Il y a deux logiques différentes. D'une part, celle de chercher de l'argent pour compenser les déficits, et de l'autre que trop d'impôts tue l'impôt. La France n'est pas seulement le premier pays visité, Le secteur du tourisme est un secteur où nous sommes effectivement très performants. La France n'est pas seulement le premier pays visité, mais est aussiplébiscitée par les Français eux-mêmes pour leurs séjours : nos données montrent que 81% des français qui sont partis en 2013 ont effectué un séjour en France. Il est donc doublement important de maintenir le "juste prix"

D'une manière générale, il est préférable de faire du "volume" dans le tourisme en ne changeant pas à date le niveau des taxes. Parce que mécaniquement, des hausses de ce type-là nous feraient perdre en compétitivité. Nous sommes dans un secteur qui est très concurrentiel : il y a aujourd'hui dans le monde 600 destinations en concurrence alors qu'il y en avait 40 il y a trente ans.

De plus, il y a un développement très important de la location entre particuliers dans les villes, et il n'est donc pas logique de demander aux seuls hôteliers (soumis à des normes très strictes d'hygiène et de sécurité, qui paient des salariés etc) un telle hausse de collecte Il est nécessaire qu'il y ait une équité et de ne pas trop alourdir le secteur des professionnels versus celui des particuliers qui eux ne contribuent pas au même niveau à l'emploi, aux charges, à la fiscalité. Les hôtels sont la première catégorie d'hébergement choisie par les touristes. Pour le client, c'est une hausse du prix de son séjour.

Avant le vote d'un amendement impactant ainsi l'équilibre du secteur, il aurait fallu attendre les résultats de la mission parlementaire sur la fiscalité touristique.

A quel point la limite entre taxation des touristes, et volonté d'expansion de ce marché en France est-elle atteinte ?

Nous venons de publier une étude qui le montre clairement : en volume, la plus importante partie des français qui vont en vacances (44%) font partie de la catégorie des "employés & ouvriers & professions intermédiaires". Plus de 20 millions de français sont partis en séjour marchand, c'est à dire qu'ils ont séjourné dans un hébergement payant en 2013 et en première place dans les hôtels. Avec le pouvoir d'achat qui stagne et le besoin de partir qui lui demeure élevé, avec des portefeuilles qui se rationnalisent, il est évident que toucher à l'équilibre ténu des budgets de dépenses peut modifier les intentions de départ et les réorienter vers d'autres destinations.

Pour justifier sa position en faveur du déplafonnement de la taxe de séjour, la municipalité de Paris avance que le tarif à Bruxelles est 5 fois supérieur, et qu'à Berlin elle représente 5% du coût de la chambre. Nos trois villes sont-elles suffisamment similaires pour que l'on puisse les comparer ?

Chaque ville a ses spécificités et les effets d'annonce de hausse de taxes en ce moment où la concurrence est frontale n'est pas du meilleur effet. La plupart des pays dans le monde recherchent désormais à se saisir du tourisme comme un axe économique majeur pour maintenir ou gagner des emplois car il y a les emplois directs (hébergement, restauration, transports, visites monuments etc) et indirects (tous les services de la vie courante, les dépenses en biens et services etc) La France n'est pas une destination bon marché et à juste titre, de par la qualité des personnels qui travaillent dans le secteur et de par les infrastructures déployées. Il ne faut donc pas alourdir les taxes mais par contre il faut tout mettre en oeuvre pour optimiser l'accueil des touristes, leur proposer des services additionnels, des commerces attrayants et disponibles etc , donc tenter de les faire dépenser davantage. Et ainsi automatiquement faire gagner l'économie locale mais aussi la fiscalité grâce aux taxes existantes et à la TVA (qui a été augmentée rappelons-le).

Dans le même ordre, une taxe transport de deux euros a été votée pour Île de France. Est-il possible que cet ensemble de taxes supplémentaires soit contre-productif lorsque l'on sait que le panier moyen des touristes venant en France n'est que de 600 euros par personne ?

Sur les 21 nouveaux comportements de consommation touristiques que nous avons identifiés, le premier d'entre-eux est de comparer les prix, puis de trouver comment payer le meilleur rapport qualité/ prix; et ensuite de chercher à réduire les dépenses sur place.

La hausse des taxes baisse le pouvoir d'achat, donc les dépenses, donc les recettes fiscales. Les Français comme les étrangers subissent la crise, sont précautionneux, préparent un budget pour pouvoir partir (66% des Français) et celui-ci est en baisse (150 euros). Toute augmentation de taxes dans ce contexte risque de créer l'effet inverse de ce qui est souhaité en termes de recettes supplémentaires.

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