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L’effondrement par la désagrégation interne : la révolution de 1788, un modèle pour 2014 ?
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Bonnes feuilles

Dans cet essai historico-politique, l’auteur compare la situation actuelle à des épisodes de crise graves de son passé et explique pourquoi les Français, à la différence de nombreux autres peuples, ne parviennent pas à résoudre dans le calme les problèmes du pays. Faudra-t-il encore passer par une révolution pour sortir le pays de la crise ? Extrait de "Français, prêts pour votre prochaine révolution ?", de Serge Federbusch, publié chez Ixelles (1/2).

Serge  Federbusch

Serge Federbusch

Serge Federbusch est président du Parti des Libertés, élu conseiller du 10 ème arrondissement de Paris en 2008 et fondateur de Delanopolis, premier site indépendant d'informations en ligne sur l'actualité politique parisienne.

Il est l'auteur du livre L'Enfumeur, (Ixelles Editions, 2013) et de Français, prêts pour votre prochaine révolution ?, (Ixelles Editions, 2014).

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Les analogies entre 1788 et 2014 sont troublantes.

La première et la plus évidente tient précisément à la longue attente, à la période de marasme et de frustration qui précéda l’explosion. En 1788, cela faisait des années que l’opinion publique, comme on ne l’appelait pas encore, était insatisfaite et grommelait face à l’incohérence des dirigeants.

Depuis l’installation des premières assemblées provinciales par Necker en 1778, une espérance de dialogue avec le roi grandissait mais elle était toujours déçue.

Le tiers état attendait vainement d’être considéré à son importance économique et politique réelle, alors qu’il réunissait près de 97 % de la population.

La monarchie absolue, ou ce qu’il en restait, avait tenté de lui répondre par des annonces de réformes vite enlisées, comme celles de Charles-Alexandre de Calonne en 1783.

Les pressions conservatrices de l’aristocratie de robe et la peur communément répandue de l’inconnu s’étaient en effet conjuguées pour conduire Louis XVI à écarter cet impopulaire Premier ministre qui, esprit brillant et politicien retors soutenu par les milieux financiers, avait pourtant connu quelques succès initiaux.

Oscillant entre des mesures de relance financées par l’emprunt dans un esprit pré-keynésien (il voulait notamment percer des canaux, créer des ports et soutenir l’investissement privé par la création de zones franches) et des réformes administratives trop timides pour remettre en cause le pouvoir de ses pairs, Calonne avait fini par perdre sur les deux tableaux dès qu’il affronta directement princes du sang, ducs et haut clergé en tentant d’introduire un impôt qui aurait frappé indistinctement tous les revenus : la « subvention territoriale ».

Espérance déçue dans la relance de l’activité, fuite en avant dans l’emprunt et restructurations administratives insuffisantes, en bref incohérence gouvernementale : la France de Louis XVI et de Calonne ressemble étrangement à celle des Chirac, Sarkozy ou Hollande dont aucun n’osa affronter les fonctionnaires et les élus professionnels qui s’abritent derrière le mécontentement populaire pour justifier leur inertie.

Loménie de Brienne succéda à Calonne en mai 1787 tandis que les périls et l’insatisfaction du peuple montaient. Homme d’Église énergique et pour le moins dénué d’idées préconçues – « Il faudrait au moins que l’archevêque de Paris crût en Dieu », avait dit Louis XVI pour refuser de le nommer à cette fonction ! –, il ne parvint pas davantage à triompher de l’hostilité des parlementaires les plus influents, porte-parole de la noblesse de robe.

Les rivalités au Conseil du roi étaient incessantes et devenaient paralysantes. Toute ressemblance avec la pétaudière dirigée par Jean-Marc Ayrault avant son éviction en l’an de disgrâce 2014 et celle de bien d’autres gouvernements avant lui n’est pas fortuite… Cette nécrose du pouvoir, incapable d’imposer des changements à son entourage le plus proche et perdu dans des actions contradictoires, fut le facteur sournois de la révolution à venir. Le monarque était inapte à briser les réticences de la caste dirigeante en s’appuyant durablement sur les esprits novateurs.

« Le manque de confiance en lui de Louis XVI lui interdit les initiatives audacieuses. (...) C’est le despotisme de la faiblesse » a noté François Bluche dans son ouvrage de 1980 : La Vie quotidienne au temps de Louis XVI 4. En 1783, l’ambassadeur d’Autriche relève que « le roi se méfie des gens de génie ». Il en résulta une inertie mortifère qui rappelle celle de François Hollande.

Dans la France d’aujourd’hui, « corpsards » de la haute administration et oligarques de la politique professionnelle parviennent tout aussi efficacement, en s’appuyant sur des médias conformistes, à discréditer les solutions audacieuses et marginaliser les esprits qui les défendent.

Extrait de "Français, prêts pour votre prochaine révolution ?", de Serge Federbusch, publié chez Ixelles, 2014. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

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