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Contre-budget : 100 députés socialistes (enfin) sur la bonne voie
©Reuters

Appel des 100

Un groupe de parlementaires socialiste a lancé à travers "l'Appel des 100" un cri d'alarme contre la politique économique du gouvernement. Une tribune qui pose (enfin) un constat lucide et plus que nécessaire de notre personnel politique sur la crise que traverse l'Europe.

Nicolas Goetzmann

Nicolas Goetzmann

 

Nicolas Goetzmann est journaliste économique senior chez Atlantico.

Il est l'auteur chez Atlantico Editions de l'ouvrage :

 

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"La politique économique de la France doit rechercher l’efficacité, elle ne saurait aggraver les inégalités. [...] Force est de constater que la situation économique est difficile et les perspectives peu réjouissantes".

C’est par ces mots que l’Appel des 100, collectif de membres du Parti socialiste, souhaite interpeler François Hollande sur la réorientation de sa ligne économique.

L’appel des 100 veut "aider notre pays à trouver le 'bon chemin', une voie juste qui rassemble le pays pour son redressement". Pour trouver cette voie juste, les "100" posent un diagnostic qui repose principalement sur deux points :

"La première est européenne : l’euro est trop cher et la trajectoire de réduction des déficits trop brutale". Puis, "la deuxième raison est nationale, et tient au réglage des politiques macroéconomiques. Aujourd’hui, la plupart des économistes estiment que la stagnation de notre économie provient davantage d’une insuffisance de la demande que de problèmes liés à l’offre : le rapport est de 80% / 20 % par exemple pour l’OFCE, qui se fonde sur les déclarations des chefs d’entreprises eux-mêmes".

Le choc est violent pour un chef d’Etat qui a proclamé les avantages de la politique de l’offre le 14 janvier dernier, notamment à travers le lancement du savoureux pacte de responsabilité. Le fait, parce qu’il s’agit d’un fait, est que le diagnostic posé par "L’Appel des 100" est exact. C’est bien la "demande" qui est la cause de la crise que le pays, mais aussi l’Europe, traverse depuis 2008. Il n’est pas nécessaire d’être de gauche ou de droite pour le constater parce que les chiffres n’ont pas de réflexes idéologiques :

Variation de la demande intérieure par rapport à sa tendance pré-crise. (Prix courants) France. 97-2014. Source : INSEE.

La demande intérieure française a progressé sur un rythme légèrement supérieur à 4% (à prix courants) entre 1997 et 2007, la croisière s’amuse et le chômage atteint son plus bas niveau depuis 30 ans : 7% à la mi 2008. Depuis, cette tendance a été simplement brisée, et l’écart avec le potentiel du pays atteint 17%. Ces 17% correspondent à 360 milliards d’euros pour la seule année 2013.

Evidemment, une telle chute de la demande intérieure a une conséquence fâcheuse, elle fait exploser la niveau de dette. Pourquoi ? Parce que le poids des dépenses publiques a pris l’habitude de progresser dans l’exacte et même proportion que la demande intérieure, et que la rupture de 2007 a déclenché une spirale négative. Si la France avait ajusté la taille de ses dépenses au rythme de sa croissance, le résultat aurait été simple : une grande dépression sur le modèle de 1929. Afin de visualiser l’effet de cause à effet entre les deux phénomènes, il suffit de comparer les deux évolutions :

Variation de la demande intérieure par rapport à sa tendance pré-crise. (Prix courants) France. 97-2014.(échelle de gauche)  Et dette sur PIB en % (échelle de droite) Source INSEE.

C’est bien la chute de la demande qui provoque l’explosion du niveau de dettes. La question posée par l’Appel des 100 relative à la lutte contre les déficits devient décisive.

"La réduction des déficits" serait trop brutale selon l’appel des 100 ? Cette affirmation qui en fera bondir plus d’un n’est pas sans fondement. En effet, même la Commission européenne ou encore le FMI l’ont reconnu. Lors de l’entrée en crise, la "supputation" était qu’un 1 euro économisé sur le budget de l’état ne générait qu’un un effet récessif de 30 centimes. Finalement, après les douloureuses expériences des pays du sud ; il est aujourd’hui avéré qu’en période de faible croissance ou de récession, le résultat est plus proche de 1 à 2.6 euros. C’est-à-dire que pour 1 euro retiré du budget de l’état, l’effet récessif est de 1 euro, et jusqu’à 2.6 euros. Une approche qui peut donc être qualifiée de "contestable" pour ne pas employer de qualificatifs désobligeants.

Pour la première fois depuis 2007, le Parti Socialiste (une frange)  pose le bon diagnostic sur la crise que l’Europe traverse. Le "bon" diagnostic car il s’agit de celui qui est posé par les Etats Unis, le Royaume Uni, ou le Japon, ces "lointains" pays qui ont retrouvé la croissance et l’emploi.

Il reste une faille dans l’"Appel des 100". Car malgré une réelle prise de conscience du problème posée par la demande et  une référence à "l’euro trop cher", les "100" se contentent de proposer de relancer par la voie de la dépense publique, c’est-à-dire par la dette. La faille est que la relance budgétaire est neutre, neutre puisque la demande est l’affaire exclusive de la Banque centrale européenne. Si un état venait à relancer massivement par la dette, la Banque centrale aurait très vite fait de venir le contrer. Un épisode qui a son précédent : les plans de relance européens mis en place en 2009 ont trouvé leur riposte dans une décision de la Banque centrale européenne en 2011 : en relevant ses taux, la BCE a annihilé la relance budgétaire. Toute relance ne pourra avoir lieu qu’à travers la BCE. Toute autre tentative serait vaine. Il suffit de regarder le Royaume Uni qui est en train de se payer le luxe de baisser ses dépenses tout en créant 100 000 emplois par mois avec une méthode simple : Baisse du budget de l’état et relance monétaire massive.

Pour retrouver l'Appel des 100 dans son intégralité : "Plateforme d'appel des 100 pour plus de justice sociale"

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