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Comment le foot est enfin en train de réussir à s'acclimater aux États-Unis
©Kelley L Cox-USA TODAY Sports

Soccer Island

Les Américains n'ont pas une culture du football très approfondie. Cela dit, depuis quelques années, le soccer se fait une place dans le paysage sportif et la Coupe du monde au Brésil pourrait être une belle vitrine de cet engouement.

Arnaud Ramsay

Arnaud Ramsay

Arnaud Ramsay est ancien rédacteur en chef à France Soir, chargé des sports. Passé également par France Football, Le Journal du Dimanche et M6, il est journaliste indépendant. Auteur des biographies de Bixente Lizarazu, Nicolas Anelka ou David Douillet, il vient de publier celle de Mourad Boudjellal " Ma mauvaise réputation" aux éditions La Martinière ainsi que « Ligue 1 : 80 ans de football professionnel » (Solar), avec Paul Dietschy.

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Atlantico : Aux Etats-Unis, le football ne jouit pas du même prestige qu'ailleurs. Les Américains ne s'y sont véritablement intéressés qu'en des périodes très ponctuelles, et pour des figures comme celle de Pelé. Comment expliquer que le sport le plus populaire au monde connaisse une histoire aussi chaotique aux Etats-Unis ?

Arnaud Ramsey : Le football n’appartient pas à l’ADN des Etats-Unis, à la différence par exemple du basket, du baseball ou du hockey sur glace. Si les jeux de balle au pied existent depuis l'Antiquité, ce sont les Britanniques qui ont « inventé » le football. D’ailleurs, le sport roi en Amérique est le football américain, par opposition à l’« autre ». Le football américain se pratique partout mais il a un rayonnement limité, hormis aux Etats-Unis. Le dimanche du Super Bowl, soit la finale du championnat, est ainsi le plus grand événement sportif annuel, un spectacle très show, garanti d’audiences extraordinaires. Bref, le football tel qu’on le connaît est né en Europe et les Etats-Unis y sont venus sur le tard. Mais les choses évoluent doucement. De plus en plus de stars étrangères débarquent dans le championnat, il se pratique de plus en plus à l’université, la sélection est d’un niveau très correct, etc. A noter aussi que le football doit également sa notoriété aux Etats-Unis grâce au palmarès de l’équipe nationale féminine. Incarnée par la star Mia Hamm, elle a été deux fois championne du monde et quatre fois médaillée d’or aux JO.

Récemment, le "soccer" a su séduire les US : en 2012, le match PSG-Chelsea au Yankee Stadium attirait quelques 40 000 spectateurs. D'après une étude de marché ESPN (réseau de télévision thématique sur le sport), 41% des américains sont attirés par le foot. S'agissaient-ils d'événements isolés, où le football pose véritablement le pied outre-Atlantique ?

C’est en effet le signe d’une évolution. On peut aussi observer que la population hispanique est très présente aux Etats-Unis et enclin à le pratiquer, ce qui contribue à accélérer son essor. D’autres signes sont tangibles qui attestent de l’accélération de ce sport, ne serait-ce que le fait que David Beckham, qui a joué à Los Angeles avant d’achever sa carrière de joueur au PSG, ait acheté une franchise du championnat pour l'installer à Miami. L’Anglais détenait depuis 2007 le droit de créer une franchise avec un ticket d'entrée réduit à 25 millions de dollars, privilège accordé par la MLS pour le convaincre de rejoindre son championnat ! Beckham a conscience du potentiel des Etats-Unis, où les affluences dans les stades, longtemps un point faible, grimpent enfin : un peu plus de 18 00 spectateurs par match… Beckham est plus qu’un footballeur : une rock star, une icône. Il fait vibrer le public, ce public qui vient en masse comme vous le soulignez pour voir les étoiles de ce sport, comme lors de PSG-Chelsea. Les grands clubs de foot, comme Paris, Chelsea, le Bayern, Milan, Arsenal, le Real Madrid, la Juventus, Barcelone ou Manchester sont des marques globales, des multinationales en perpétuelle quête de marchés supplémentaires. C’est pourquoi depuis quelques années ces clubs-là disputent des tournées l’été aux Etats-Unis ou en Asie (des marchés encore à conquérir) en guise de préparation de la saison. Les spectateurs sont friands de ce genre d’ « exhibitions. » C’est un premier pas. La véritable réussite sera que le championnat américain, la MLS, gagne en crédibilité.

En 1994, la coupe du monde de football avait lieu aux Etats-Unis, et l'intérêt que pouvaient avoir les américains s'en était trouvé augmenté. Dans quelle mesure le fait que, 20 ans plus tard, la coupe du monde se déroule à nouveau sur leur continent peut-il parvenir à les accrocher de nouveau ?

Le Mondial 1994 n’a pas été une grande compétition au niveau sportif. L’organisation en revanche a été très efficace. Cela a déclenché un réel engouement pour le football aux USA. Le Brésil, même s’il figure sur le même continent, c’est une autre culture, il n’y aura pas de bouleversement à attendre. En revanche, un beau parcours des Etats-Unis ou un exploit lors de cette Coupe du monde est de nature à attirer les lumières. Le combat si je puis dire n’est pas gagné. Le grand New York Cosmos, où a joué Pelé notamment, est en sommeil depuis 30 ans ! Il y a trois ans, notre Eric Cantona a été nommé directeur sportif du club. Son intention était limpide : « Notre ambition est d'avoir la meilleure équipe du pays, mais encore de fournir les joueurs à la sélection nationale pour que celle-ci remporte un jour la Coupe du monde », avait admis Canto. Depuis l’actionnaire du club a changé et le club n’est pas en MLS…

La poule dans laquelle devra jouer l'équipe américaine est parmi les plus coriaces (Allemagne, Portugal, Ghana). Une défaite des Etats-Unis à ce stade de la compétition est-elle envisageable ? Cela porterait-il un coup à l'intérêt américain pour ce sport en tant que tel ?

Jusque-là, le meilleur résultat de l'équipe nationale est une 3e place ; c’était en 1930, lors de la première édition. Depuis, les États-Unis n'ont jamais dépassé les quarts de finale. Mais cette nation est désormais régulièrement qualifiée pour le Mondial. Elle est bien organisée, comporte des éléments de qualité (dont de plus en plus évoluent en Europe, à l’instar de Bedoya, à Nantes). L’équipe peut jouer les trouble-fêtes. Elle est dirigée par un ancien très grand joueur, l’Allemand Jürgen Klisnmann, qui a surpris en ne retenant pas dans les 23 l'attaquant Landon Donovan, meilleur buteur de l'histoire de la sélection américaine, présent au Mondial 2002, 2006 et 2010. Mais le défi est immense car le tirage au sort n’a pas été favorable avec le Portugal de Cristiano Ronaldo, le meilleur joueur au monde, l’Allemagne, l’un des favoris, et le Ghana, éliminé il y a quatre ans en quart de finale seulement. Bref, le groupe de la mort ! Franchir ce premier tour serait un exploit, qui boosterait la notoriété d’une sélection ambitieuse, en manque de star et de reconnaissance. Une élimination ne stopperait pas l’élan et les fondations mais serait une mauvaise nouvelle pour Thierry Henry, Beckham and co qui s’échinent à faire de la MLS un championnat prestigieux.

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