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Après la Grèce, sauver le Maghreb ?
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Printemps arabe, hiver financier

Alors que le sommet de l'Eurogroupe a accouché d'un nouveau plan de sauvetage de 160 milliards d'euros pour la Grèce, les Européens pourraient être appelés plus rapidement que prévus à mettre la main à la poche. Lourdement frappés par le printemps arabe, le Maghreb pourrait en effet se retrouver dans une situation financière très délicate... avec des conséquences directes sur l'Europe.

Abdelmalek Alaoui

Abdelmalek Alaoui

Abdelmalek Alaoui est directeur général du cabinet de communication d'influence Guepard Group.

Il est l'auteur du livre Intelligence Economique et guerres secrètes au Maroc (Editions Koutoubia, Paris).

 

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« S’ils hésitent autant avant de venir au secours de la Grèce, qu’en sera-t-il demain, si la Tunisie, l’Egypte, l’Algérie ou le Maroc connaissent un moment difficile ? Est-ce que l’Europe les laissera tomber ? ». Cette interrogation, quasiment tous les économistes maghrébins semblent se la poser en ce moment, en estimant dans leur majorité que les atermoiements autour de l’avenir de l’euro constituent un danger réel pour l’avenir de leur région. Cette dernière est en effet fortement accrochée à la monnaie unique et elle est dépendante des marchés européens.

Les maghrébins sont d’autant plus étonnés par cette crise que la monnaie européenne est le symbole de ce qu’ils n’ont jamais réussi à réaliser : incarner monétairement une union économique et politique. En effet, au-delà de la matérialisation physique d’un processus d’intégration régionale sans précédent dans le monde (la construction européenne), l’Euro représente pour les non-européens l’étendard d’une certaine conception du « vivre ensemble », ainsi que la promesse d’affronter de manière solidaire les aléas économiques.

Europe et Maghreb : deux destins économiquement liés

De fait, cet édifice européen qui se fissure fait prendre conscience aux pays du Maghreb que leur arrimage à l’Europe n’est pas exempt de risques substantiels pour leur développement économique futur, surtout dans un contexte de transition politique où leurs systèmes sont particulièrement fragiles.

En effet, le « printemps arabe » a non seulement ouvert la voie à des changements politiques profonds, mais a également fait entrer les pays du Maghreb dans une zone de turbulence économique dont l’on ne connaît, à ce jour, ni la portée ou la durée. Or, l’Europe a destin lié avec le sud de la Méditerranée sur nombre de sujets.

Réservoir de croissance pour les entreprises, marché en expansion rapide, ou encore zone d’immigration, le Maghreb concentre à la fois peurs et promesses pour l’Europe, d’où la nécessité pour l’Union de se tenir prête à le soutenir au cours des prochaines années, qui se révéleront sans doute cruciales pour l’avenir de cette région du monde.

Car, bien qu’elle ne soit pas envisageable dans l’immédiat, une crise durable pourrait se profiler à l’horizon si jamais l’on assistait à un démantèlement de l’Euro. En effet, au delà des répercussions économiques immédiates, s’installerait alors une véritable crise de confiance qui affecterait les marchés maghrébins, conduisant probablement à une vague d’immigration massive, qui viendrait « surinfecter » le mal originel.

Les enjeux pour créer les conditions d’une prospérité commune durable sont donc considérables, et dépassent le cadre étroit de l’Union Européenne. Cette situation a même poussé Joseph Stiglitz à tirer récemment la sonnette d’alarme dans les colonnes du New York Times. Pour le prix Nobel, « rien ne garantit mieux le succès des transitions des pays du Printemps arabe que des liens plus proches et plus forts avec une Union Européenne stable et prospère ».

Relancer le projet d'Union pour la Méditerranée ?

Ce discours, que l’on entend rarement à Bruxelles, a le mérite de mettre les européens face à leurs responsabilités en termes de politique de voisinage, et de préparer l’Union a un effort supplémentaire d’accompagnement économique et politique des réformes au sud de la Méditerranée. Concrètement, l’Europe devra probablement mettre la main à la poche dans les années à venir et étendre son devoir de solidarité au Maghreb après avoir trouvé une solution à la crise économique que traverse l’ « économie du palmier » (Portugal, Italie, Espagne, Grèce).

Au delà des aides directes – qui demeurent nécessaires – l’Union devra surtout trouver les moyens de soutenir les pays du Maghreb afin qu’il créent plus de croissance, en favorisant notamment des programmes de co-développement économique et en encourageant ses entreprises à investir dans ces zones d’avenir. Reste un élément majeur pour que cette réalité émerge : trouver un moteur à cette communauté de destins, un véhicule qui en serait à la fois l’animateur et le promoteur. A cet égard, seule l’Union pour la Méditerranée (UpM) – bien que pour l'instant moribonde – pourrait trouver dans ce sujet sa véritable colonne vertébrale. En se consacrant à des dossiers économiques concrets, et en s’attaquant à ce problème de fond, le projet d’Union pour la Méditerranée pourrait enfin trouver ses marques. 

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