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Marketing : 
les nouveaux pigeons de La Poste
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Zone franche

La Poste alimente ses bases de données commerciales sous couvert d'amélioration de son service aux usagers. Ce n'est pas illégal, mais on peut trouver ça déplaisant tout de même.

Hugues Serraf

Hugues Serraf

Hugues Serraf est écrivain et journaliste. Son dernier roman : La vie, au fond, Intervalles, 2022

 

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La Poste, dont l’activité « courrier des particuliers » est de plus en plus anecdotique (3% du total pour un volume devant encore chuter de 30% d’ici à 2016), est en pleine mutation. Les services bancaires, le transport de marchandises, l’acheminement de colis pour la VPC et les sites internet marchands : c’est là qu’est son avenir.

OK, c’est sans doute difficile à avaler si l’on est convaincu que chaque bureau rural qui ferme, c’est un peu de l’âme de la France républicaine qui disparaît... Mais, hey, même à Trifouilly-sur-Pouflon, on envoie désormais des mails et on passe des coups de fil !

Une autre façon de gagner des sous pour rémunérer Olivier Besancenot pendant qu’il se repose de ses tournées à vélo en faisant des régates, c’est le « marketing direct ». La Poste dispose en effet d'un fichier d’adresses considérable (le SNA) qu’elle vend ou loue à des tiers. Jusqu’ici, rien d’anormal : le journal auquel vous êtes abonné, la salle de gym que vous fréquentez, la banque où vous déposez vos éconocroques, le site Web qui enregistre votre adresse mail transmettent tous vos coordonnées à d’autres acteurs économiques ― en principe en vous demandant préalablement l’autorisation de le faire.

Rien d’anormal ? Voyons voir. Pour mettre à jour ou affiner le contenu de ses bases, La Poste n’hésite pas à se prévaloir de sa qualité d’institution publique respectable pour vous expliquer que, si vous souhaitez vraiment continuer à recevoir du courrier, il serait bien de corriger d’éventuelles « erreurs » dans l’adresse dont elle dispose et de lui signaler le nom de tous les occupants de votre foyer...

« Assurer la qualité et la régularité de votre courrier... »

« Votre facteur a constaté à plusieurs reprises des anomalies dans la rédaction de l’adresse des correspondances qui vous sont adressées ou qui sont destinées à l’une des personnes de votre foyer, vient-elle justement de m’écrire. Une adresse inexacte ou incomplète peut être source de retard dans la distribution de votre courrier, voire de retour à l’expéditeur. Pour assurer la qualité et la régularité de la distribution de votre courrier et de celui des membres de votre foyer, La Poste vous propose de communiquer le libellé exact de votre adresse, telle que rédigé sur l’imprimé joint au présent courrier ».

En d’autres termes, La Poste prétend avoir besoin de ces informations pour aider ma cousine Albertine qui, comme tout un chacun, dispose d’un code d’accès à la base de données et y vérifie systématiquement la validité d'une adresse avant d'expédier une carte postale de la dune du Pyla…

A la direction de l’entreprise, on avoue que c’est effectivement un peu limite :  « Il est vrai que ces informations sont destinées à un fichier que nous commercialisons, mais c’est aussi le moyen d’avoir son adresse à jour dans la base… »

― Ah bon, mais qu’est-ce que ça m’apporte, à moi, d’avoir mon adresse à jour dans votre base ?
― Eh bien, la certitude de recevoir le courrier que l’on vous envoie…
― Vous voulez dire le courrier des entreprises auxquelles vous vendez mon adresse, puisqu’il ne s’agit pas d’un fichier public…
― Euh, oui…
― Et pourquoi me demander les noms de toutes les personnes qui habitent dans mon foyer ? Qu’est-ce que ça ajoute à la précision de l’adresse ?
― Ces personnes reçoivent aussi du courrier, non ?
― Mouais... Ça accroît surtout la valeur du fichier du point de vue de vos clients, qui savent s’ils achètent l’adresse d’un célibataire à qui vendre des plats cuisinés individuels ou celle d'une famille à qui fourguer des vacances en hôtel-club !
―…

Le plus agaçant, au final, c'est cette histoire de facteur signalant des « anomalies » quand il s'agit en fait d'un « courrier-type fourni par le SNA aux établissements dans le cadre de la mise à jour de la Base des Bonnes Adresses (BBA) ». Pour ne rien dire de la manière sournoise dont La Poste obtient le droit d'utiliser une adresse qu'elle commercialisait jusqu'alors sans autorisation…

Franchement, qui a dit que La Poste était dépassée ?

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