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Coup d'envoi officiel de la campagne des primaires socialistes ce mardi.
Coup d'envoi officiel de la campagne des primaires socialistes ce mardi.
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PS academy

C'est ce mardi que Martine Aubry, François Hollande et leurs camarades déposeront officiellement leur candidature à la primaire socialiste. L'occasion de tenter d'éviter les divisions qui ont pu conduire le PS à ne pas figurer au second tour de la présidentielle 2002.

Gérard Grunberg

Gérard Grunberg

Gérard Grunberg est directeur de recherche émérite CNRS au CEE, Centre d'études européennes de Sciences Po. 

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Atlantico : Quelles sont les différentes lignes de fracture idéologiques qui se dessinent actuellement au sein du PS à l'occasion de la primaire ?

Gérard Grunberg : Martine Aubry se situe dans le projet socialiste. Elle est soutenue par la gauche du parti, par les fabiusiens. Au départ c’est un programme assez à gauche dans la tradition du socialisme français. François Hollande est lui plutôt autonome, indépendant et joue davantage la carte de la personnalisation et du réformiste responsable, sur la fiscalité et le nucléaire notamment. Il existe donc des différences de positionnement.

Mais, sur le fond, si on regarde leurs trajectoires politiques personnelles, je pense qu’il n’y a pas de différences très sensibles entre ces deux candidats pour la primaire : tous les deux sont de centre gauche, européens, ont voté oui au traité de Maastricht (même si ce n’est pas le cas d’autres dirigeants politiques qui soutiennent Martine Aubry). Ils sont tous les deux réformistes, ils ont soutenu tous les deux Lionel Jospin (l’une en tant que ministre, l’autre comme Premier secrétaire du PS). Toutefois, Martine Aubry - consciente du fait qu’elle ne doit pas se laisser enfermer par le projet socialiste ou par la gauche du parti - va probablement avoir un discours adouci, un peu plus responsable.

Ce qui les différencie aussi ce sont leurs tempéraments. Dans la campagne cela peut jouer. Pour l’instant, il semble que Martine Aubry manque de crédibilité présidentielle - elle en a moins en tout cas que François Hollande - mais cela peut changer lorsqu’elle entrera en campagne. On constate également dans les sondages qu’il pourrait il y a avoir un soutien plus net d’une partie de l’électorat centriste en faveur de François Hollande par rapport à Martine Aubry, notamment dans les intentions de vote pour le second tour.

Et à part Martine Aubry et François Hollande, comment analysez-vous le positionnement des autres candidats ?

Ségolène Royal est toujours très déterminée et décidée à se faire entendre, mais on sait qu’elle a perdu une grande partie des positions qu’elle avait dans l’électorat des classes moyennes à gauche. Mais elle a montré qu’elle savait faire une campagne. Elle va être confrontée au danger de voir la campagne se polariser autour de Martine Aubry et François Hollande. Il faudrait donc pour elle qu’elle arrive à desserrer cet étau des deux candidats et qu’elle se fasse sa place comme elle avait parfaitement su le faire en 2006. Pour l’instant, elle ne fait pas partie des deux favoris, et vous savez que seuls deux candidats peuvent concourir pour le second tour de la primaire.

Est-ce qu’elle peut desserrer l’étau des deux favoris? Je ne le crois pas, mais il faut quand même rester attentif à ce qu’elle fait, parce qu’elle a montré qu’elle savait parfois, grâce à ses intuitions, coller à un certain nombre de préoccupations des Français.

Que pensez-vous des candidatures d’Arnaud Montebourg ou Manuel Valls ?

Ils sont relativement jeunes. Ils sont là pour préparer l’avenir, se faire une image, montrer qu’ils existent. Je ne crois pas qu’ils pourront beaucoup menacer les autres candidats. Manuel Valls se positionne à la droite du parti, Montebourg est le plus à gauche ; c’est le seul à défendre la « démondialisation ». Chacun va essayer sur ce thème là de se faire une place, je ne pense pas qu’ils iront très loin, mais, avec une primaire ouverte, beaucoup de monde vote et après tout qui sait aujourd’hui ce que donnera cette campagne ? Il faut se montrer très prudent dans l’analyse de la situation.

S’il existe si peu de différences majeures entre les candidats, à quoi bon une primaire pour les départager ?

Une primaire est nécessaire. Tout d’abord parce qu’ils veulent tous être candidats. C’est simple mais il faut quand même le rappeler ! En outre, même s’il n’y avait pas de primaire ouverte, il y aurait une primaire fermée comme en 2006. Beaucoup de gens ont du mal à réaliser que la vie politique c’est aussi une compétition. Cela ne date pas d’hier : souvenez-vous qu’en 1995, il y avait eu une primaire interne entre le Premier secrétaire du PS de l’époque Henri Emmanuelli et Lionel Jospin. Comment voulez vous faire autrement lorsqu’il y a plusieurs candidats ?

Savoir s’il faut faire une primaire ouverte ou fermée est une question différente. Moi je  pense que s’il doit y avoir une primaire et vu ce qui s’est passé en 2006 où les sondages ont joué un rôle important, autant que ce soit les électeurs qui s’expriment, autant qu’il y ait un ou deux millions d’électeurs plutôt que 40 000. Je considère donc que ces primaires sont une bonne chose.

Même si sur l’essentiel tous les candidats sont à peu près d’accord ?

Choisir un président c’est choisir une personne. Leurs tempéraments et leurs préférences ne sont pas exactement les mêmes. La primaire n’implique pas que l’on soit totalement en désaccord sur tout.

La gauche n’aime pas lorsqu’on parle de leadership et d’autorité, mais il faut choisir un patron pour la France et cela implique que les électeurs se fassent une idée sur les qualités personnelles des candidats et sur la manière dont ils défendent et proposent leurs programmes. Je crois que c’est tout de même mieux que du temps ou c’était simplement un appareil de parti. Même le Parti communiste n’arrive plus à empêcher la tenue d’une primaire. Il s’agit d’un mouvement dans la démocratisation de nos régimes occidentaux, il ya un désir de participation un peu plus grand des électeurs.

Jusqu’à présent, c’était le premier tour qui jouait le rôle de primaire. Cela s’est révélé désastreux. Le Front national est un parti important et, au premier tour, il peut toujours arriver en second voire en première position. Par conséquent, la primaire a cette finalité de protéger un camp important ou un ensemble de partis importants de l’élimination. Il ne faut pas l’oublier. Regardez comment Nicolas Sarkozy rame pour essayer d’empêcher que Jean-Louis Borloo soit candidat. Cela montre bien que les partis ne peuvent plus contrôler et que la primaire reste pour eux la meilleure solution pour éviter ce type de problème.

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