« Air France doit acheter des avions Airbus ! »<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Economie
« Air France doit 
acheter des avions Airbus ! »
©

Le pour

Une centaine de parlementaires a demandé à Air France de privilégier Airbus à Boeing dans le renouvellement de sa flotte de longs-courriers. Un contrat qui s'élève à 20 milliards d'euros. Bernard Carayon, le député UMP à l'origine de cette initiative, explique à Atlantico pourquoi la compagnie aérienne doit faire preuve de "patriotisme économique".

Bernard Carayon

Bernard Carayon

Bernard Carayon est ancien député du Tarn, maire (LR) de Lavaur, Avocat au barreau de Paris. 

Voir la bio »

Atlantico : Le Boeing est-il privilégié par Airbus parce qu'il est moins cher ?

Bernard Carayon : Non, les deux offres sont comparables, techniquement et financièrement. Et à supposer même que l'Airbus soit un peu plus cher, n'oublions pas qu'il y a des économies qui coûtent cher, et des dépenses qui rapportent. Les 20 milliards d'euros que représentent ce marché auraient des répercussions considérables en termes d'emploi : 50% des sous-traitants d'Airbus sont chez nous, contre 10% pour Boeing. Surtout, ce succès commercial en générerait d'autres et permettrait également de financer la recherche de demain : la réussite d'aujourd'hui génère l'investissement et de futurs succès commerciaux.

Votre position relève-t-elle du « protectionnisme européen » ?

Non : cette étiquette est une injure utilisée par les ultra-libéraux pour discréditer l'adversaire. Moi-même issu des rangs libéraux, je crois au marché quand il marche. Les États-Unis, berceau du libéralisme, sont le pays le plus protecteur et le plus prometteur de ses intérêts industriels, commerciaux et scientifiques.

Je ne crois pas au protectionnisme, c'est totalement saugrenu : autant élever une muraille de Chine ou un Mur de Berlin. Mais entre le protectionnisme et le libre-échangisme, il y a ce que j'appelle le patriotisme économique : qu'il soit à dimension régionale, nationale ou européenne, il est le véritable moteur de notre cohésion. Défendre ses intérêts plutôt que ceux des autres, ce n'est pas seulement un réflexe humain, mais aussi un réflexe collectif, et toutes les grandes nations qui souhaitent rester puissantes défendent cette politique.

Imposer Airbus à Air France ne présente-t-il pas le risque de fausser la concurrence et le marché ?

Non, c'est un argument de salon qui occulte le fonctionnement des vrais libéraux que sont les Américains. On a en France une vision naïve et universaliste du libéralisme qui méprise nos intérêts. Je pense aux ingénieurs et aux ouvriers français, je travaille pour les territoires français et je ne suis pas payé par le contribuable américain. Je défends donc les intérêts d'un programme financé par les Européens à travers l'A-350, à hauteur de 13 milliards d'euros, qui est redistributeur de richesses pour le continent européen, et dont on a peu d'exemples de tels succès en Europe.

Il y en a qui préfèrent défendre des principes, comme le marché. Mais quand le marché fait la promotion d'intérêts concurrents qui vont détruire nos propres entreprises, quel intérêt ?

Votre démarche a-t-elle des chances d'aboutir ?

Oui. Air France, qui souhaitait acheter 100% de ses appareils chez Boeing il y a quinze jours, est aussi disposée à partager le marché. Si par notre initiative nous avons pu faire gagner 10 milliards d'euros à la France, à l'Europe et à notre déficit commercial, c'est quand même pas mal.

L'Etat n'a certes pas d'influence juridique [même si avec ses 3 administrateurs il peut peser sur le renouvellement du mandat du PDG, qui aura lieu début juillet, ndlr], mais une influence comme celle qui a pu s'exercer sur le groupe Peugeot, qui voulait supprimer deux sites industriels. Il ne faut que les grands patrons soient « hors-sol », il ne faut pas qu'ils ne considèrent la valeur de leur entreprise qu'à l'aune de ses résultats boursiers. Une entreprise, c'est aussi de la chair et du sang, ceux des salariés, des chercheurs et des élus locaux. Quand on a en face de soi le regard de quelqu'un qui vient de perdre son emploi, on raisonne différemment que quand on regarde les cours de bourse.

Et cela ne s'applique pas seulement aux entreprises ayant des liens avec les pouvoirs publics. Pendant la crise, les secteurs bancaires et automobiles étaient à genou, et ce sont ces politiques qui les ont sauvés. Par ailleurs, avec le Fonds Stratégique d'Investissement (FSI), dont je fais partie, on a sauvé 80.000 emplois grâce à des investissements cumulés de 4 milliards d'euros.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !