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Pour Lamour, Delanoë favorise
 les plus aisés et les plus aidés
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Logement

A l'occasion des états généraux du logement, Jean-François Lamour revient sur la proposition du maire de Paris d'encadrer les loyers à la relocation. Une proposition "irréaliste" pour le député de Paris, qui concourt à accroître les difficultés des familles pour se loger et qui participe à la ghéttoïsation de certains quartiers.

Jean-François Lamour

Jean-François Lamour

Jean-François Lamour est député de Paris et président du groupe UMP au Conseil de Paris. Il est aussi ancien champion olympique de sabre.

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Atlantico : Bertrand Delanoë propose d’encadrer les loyers à la relocation pour favoriser notamment l’accès des classes moyennes aux logements parisiens. Qu’en pensez-vous ?

Jean-François Lamour : C’est une proposition irréaliste. On a connu cette logique d’encadrement des loyers au début des années 80 : le résultat avait été catastrophique puisque les propriétaires et les bailleurs avaient immédiatement arrêté de louer leurs biens. D'ailleurs, l’encadrement des loyers ne correspond pas à la culture de la location et de l’achat à but locatif en France où nous privilégions historiquement l’aide à la pierre.  

La proposition de Bertrand Delanoë est révélatrice de l’impasse dans laquelle se trouve le maire de Paris. Quand il est arrivé à la tête de la mairie de Paris en 2001, il avait à sa disposition un stock de 20 000 logements dits « intermédiaires ». Or, il n’a eu de cesse de les transformer en logements sociaux et très sociaux. Il a donc fait disparaître un outil indispensable du « parcours résidentiel » : la possibilité de trouver des loyers à 15 euros le mètre carré par mois. Que font donc les familles avec un ou deux enfants ? Soit elles louent un logement trop exigu dans le privé (à 21 euros le mètre carré en moyenne) ; soit elles quittent Paris. André Santini [maire d'Issy-les-Moulineaux, NDLR] me confiait il y a quelques semaines que 25 % des nouveaux arrivants dans sa ville provenait du XVème arrondissement de Paris, pour les raisons que j’évoquais plus avant.

La capitale souffre également d’un manque au niveau de l’accession sociale à la propriété. De plus en plus de bailleurs sociaux délivrent une petit partie de logements en accession sociale à la propriété, mais on ne créé pas assez de mouvement pour donner aux locataires qui en ont les moyens la possibilité de devenir propriétaires de leur logement social. Cela se fait pourtant partout ailleurs en France. Le dernier projet de ce type date de l’ère Tibéri, il concernait une centaine d'habitations dans le quartier de la Bibliothèque Nationale François Mitterrand. Les aspirants propriétaires faisaient alors la queue pour acquérir leur bien !

Dernier élément qui charge la barque de M. Delanoë : il doit produire du logement social à marche forcée pour atteindre les 20 % qu’il s’est fixés pour la fin son deuxième mandat en 2014. Il est donc obligé d’acheter dans le secteur privé, par blocs d’immeubles entiers, sans créer de logements. Les nouveaux locataires sont évidemment admis sous condition de ressources, mais aucune offre locative nouvelle n’est créée. Je précise que ces préemptions municipales se chiffrent en centaines de millions d’euros. Ce mécanisme, financé en partie par l'Etat, entretient la spéculation, dont la mairie de Paris est encore la principale bénéficiaire puisqu’elle touche chaque année près d’un milliard d’euros de droits de mutation. Une politique de créations de logements intermédiaires plus intelligente et plus ciblée serait donc largement possible.

Cela dit, faire de Paris la ville des plus aisés et des plus aidés correspond peut-être à un calcul politique, en particulier dans les arrondissements contrôlés par l’opposition municipale (XVe ou XVIIe arrondissement, par exemple). M. Delanoë explique que le solde de la population parisienne reste positif, mais à quel prix ? En creusant le fossé entre les plus aisés et les plus aidés. A terme, je crains une ghettoïsation de certains quartiers, qui constitue de mon point de vue une bombe à retardement.


Quelles sont les alternatives ? Construire davantage de logements ?

Benoist Apparu [secrétaire d'Etat en charge du logement, NDLR] a déjà critiqué le fait que la ville de Paris ne construit pas suffisamment de logements, de tous types. La part du logement social devient contre-productive en termes de mixité et d’accès au logement à Paris. Cela dit, la construction reste possible uniquement dans les limites du foncier existant. Or, à chaque fois que du foncier se libère, Bertrand Delanoë le préempte pour édifier des logements sociaux. Au Batignolles par exemple (XVIIe arrondissement), il veut construire des tours de 50 mètres de logements sociaux. C’est une hérésie : on les détruit partout en France, et on veut en bâtir à Paris.

Nous demandons aussi, et surtout, de concevoir une politique régionale de production de logements. Le président de la République a eu l’excellente initiative de lancer le projet du Grand Paris pour mettre les deux extrémités de la métropole à 30 minutes l’une de l’autre via un système de transport en commun extrêmement rapide et sûr. Profitons-en pour créer une réelle politique de production de logements, privés ou publics, en Ile-de-France. Nous nous réjouissons que Benoît Apparu imagine également travailler à une politique régionale en ce sens.

Aujourd’hui à Paris, il existe 130 000 demandeurs de logements sociaux, contre 90 000 à l’arrivée de Bertrand Delanoë à la mairie. Voilà les réalités d’une politique du logement purement parisienne.  Je concède bien évidemment que l’attractivité de la capitale y concourt, mais la politique actuelle ne fait qu’amplifier la rareté. L’inflation des loyers peut être aussi atténuée par cette politique globale que j’appelle de mes vœux, au niveau de la métropole.

J’ajoute que les socialistes entendent porter le logement social à 25 % en cas de victoire en 2012. Vous imaginez bien l’explosion du  coût du mètre carré disponible qui touchera alors le logement privé étant donné que la mairie préempte tout. Ce serait une catastrophe pour la stabilité des prix à Paris, du moins pour leur croissance raisonnable.

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