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Un enfant provenant d'un milieu défavorisé aura plus de risques de souffrir d'obésité.
Un enfant provenant d'un milieu défavorisé aura plus de risques de souffrir d'obésité.
©Reuters

I need a dollar

Manger équilibré coûte cher. Et selon de très nombreuses études, une bonne alimentation pourrait diminuer le risque de développer une maladie chronique. Un enfant provenant d'un milieu défavorisé aura en effet plus de risques de souffrir d'anémie, de dépression et d'obésité et de développer des problèmes comportementaux ainsi que des retards à l'école. Quant aux adultes, ils seront plus exposés à l'obésité, l'hypertension artérielle et au diabète.

Nathalie Hutter-Lardeau

Nathalie Hutter-Lardeau

Nathalie Hutter-Lardeau est nutritionniste diplômée d'Etat, et auteur de nombreux ouvrages sur le sujet. 

Parmi ses livres figurent notamment La True Food aux Editions du Moment,  dans lequel elle explique comment déguster ses produits préférés en toute lucidité, 101 restos, 0 kilo, coécrit avec Nathalie Helal et Catherine Roig (Hachette, mars 2013), Mince Alors ! (Odile Jacob, Juin 2011), Des mots sur les maux du cancer  (Mango, 2009) avec le Professeur David Khayat et Wendy Bouchard, et  Le vrai régime anti-cancer  (Odile Jacob, 2010) avec le Professeur David Khayat et France Carp.

Elle a fondé en 2000 l'agence conseil en nutrition Evidence Santé, qui travaille avec l'Agence nationale de sécurité alimentaire sur la sécurité alimentaire, et le plan national nutrition santé, ainsi qu'avec plusieurs entreprises du secteur agro-alimentaire.

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Atlantico : Quels liens directs peut-on établir entre l'alimentation et les maladies chroniques comme l'asthme, le diabète ou une tension artérielle élevée ?

Nathalie Hutter-Lardeau : Savoir qu'une mauvaise alimentation a des conséquences néfastes n'empêche pas les excès et les dérives alimentaires. Les statistiques mondiales de l’Organisation mondiale de la santé sont pourtant sans appel : responsables des deux tiers des décès,  les maladies chroniques (cardiopathies, accidents vasculaires cérébraux, cancers, affections respiratoires chroniques, diabète...) sont la toute première cause de mortalité dans le monde. En cause principalement, le tabagisme, la sédentarité, l'excès d'alcool, mais aussi la mauvaise alimentation.

Si l'on observe le nombre de décès qui peuvent leur être imputés, les principaux facteurs de risque de malades chroniques sont l’hypertension artérielle (16,5% des décès dans le monde), suivie du tabagisme (9%), de l’hyperglycémie (6%), de la sédentarité (6%) et du surpoids ou de l’obésité (5%).

Le surpoids et l'obésité, dont les causes sont un déséquilibre entre excès d'apports et insuffisance de dépenses énergétiques ainsi que la sédentarité, sont aussi responsables de 44% de la charge du diabète, de 23% de la charge des cardiopathies ischémiques et de 7% à 41% de la charge des cancers qui leur sont en partie attribuables.

Le défi pour la nutrition d'aujourd'hui est d'inverser cette spirale négative en démontrant qu'il est très possible de réconcilier les impératifs de l'alimentation quotidienne de notre époque (facile à mettre en oeuvre, coûts) avec ceux de la santé : cela signifie favoriser l'accès à l'information en impliquant les prescripteurs de santé, mais aussi proposer des solutions pratiques, personnalisées, que chacun peut s'approprier.

Une étude* très récente a prouvé que l’usage d’ustensiles conçus pour cuisiner avec gourmandise mais de manière plus saine et plus créative tout en préservant les apports et les qualités nutritionnelles des aliments donne de bons résultats dès 3 mois d'utilisation, mesurables sur le tour de taille et la diminution de l'IMC des participants. Des résultats encore améliorés si le changement d'ustensiles culinaires est conjugué à une application d'accompagnement en libre accès qui leur fournit des conseils et des recettes ciblées.

Une alimentation spécifique peut-elle prévenir les problèmes de santé ?

Une alimentation quotidienne équilibrée, mais surtout variée, conjuguée à une activité physique régulière est le fondement même d’une bonne santé.

La promotion des recommandations de santé publique a été initiée en France dès 2001 par le PNNS,  Programme National Nutrition Santé afin de promouvoir une alimentation et une activité physique favorables à un état nutritionnel et un état de santé optimaux. Etablis pour la moyenne de la population générale, ces principes de bonne alimentation (cf repères nutritionnels du PNNS) devront ensuite être adaptés selon la physiologie (âge, grossesse, etc)  l'état de santé ou les prédispositions spécifiques (cholestérol, prédiabète, diabète, hypertension..) de chaque individu. Dans ce cadre, l'aide d'un professionnel de santé ou d'un programme d’accompagnement virtuel s'est révélée efficace pour accompagner les choix et les établir dans la durée.

Des conseils éclairés sont utiles pour adapter les choix alimentaires aux pathologies à prévenir ou à contrôler. Par exemple :

  • en cas d’excès de cholestérol sanguin on favorisera une alimentation riche en fibres, (fruits et légumes, céréales complètes), on rééquilibrera les matières grasses (plus AGPI moins AGS), on favorisera les activités d’endurance régulières qui limitent la surcharge abdominale ;
  • en cas de diabète lié au surpoids, on favorisera un apport en aliments à faible index glycémique comme les céréales complètes et les fruits et légumes ; on  sera vigilant sur la régularité des rythmes de prise alimentaire et on favorisera des activités physiques quotidiennes très modérées ;
  • Suivre les recommandations du PNNS constitue le fondement de la prévention. Il faut savoir aussi que ne sommes pas tous égaux face à la maladie. Des facteurs environnementaux extérieurs et génétiques entrent également en ligne de compte.

Comment concilier une alimentation saine malgré un budget réduit ?

Le problème  des personnes ayant un budget alimentation limité est de privilégier les aliments énergétiques, gras et sucrés, par habitude, par méconnaissance ou tout simplement pour se faire plaisir autant que possible à peu de frais.

Des travaux scientifiques* ont démontré que l'on peut très bien se nourrir équilibré avec un petit budget (3,50 euros par jour). Un défi qui requiert quelques connaissances nutritionnelles suffisantes pour faire des choix alimentaires bien raisonnés et diversifiés : choisir des légumes et des fruits de saison, savoir utiliser des conserves, notamment de poissons gras, ou des légumes secs. Des conseils qui pourront être assortis de recettes simples et peu coûteuses (gratuites sur internet). En résumé, manger sain avec un budget réduit est avant tout une question de motivation.

Qu'en est-il de l'influence de notre alimentation sur le développement de certains cancers ?  

Parmi les  facteurs de risques cancers liés à l'environnement, l'alimentation joue un rôle essentiel et fait partie des éléments sur lesquels il est possible d'agir pour accroître la prévention primaire.

Le surpoids et obésité comme marqueurs de cette mauvaise alimentation sont des facteurs de risques prouvés de cancer. Comme pour l'ensemble des pathologies liées à l'alimentation, il a été démontré que s'alimenter de manière équilibrée et diversifiée, limiter la consommation de boissons alcoolisées et pratiquer une activité physique pouvait réduire le nombre de nouveaux cas de cancers.

D'après la source INCA, certains aliments sont désormais reconnus pour contribuer à diminuer le risque de cancers. Certains aliments, notamment les fruits et légumes, peuvent contribuer à prévenir la survenue de cancers. Une bonne raison de suivre les recommandations du PNNS et de manger 5 fruits et légumes par jour. Ils contribuent à vous protéger de certains cancers grâce à leur richesse en fibres, vitamines et minéraux antioxydants : les études montrent en effet que la consommation d'aliments variés d'origine végétale a un effet protecteur probable sur les cancers des voies aérodigestives supérieures (œsophage, cavité buccale, larynx et pharynx), les cancers de l'estomac et du poumon (pour les fruits seulement).

On sait aussi qu'une alimentation riche en fibres (céréales complètes, fruits, légumes, légumineuses) diminue le risque de cancer colorectal.

En outre, les fruits et légumes, faibles en calories, participent à la prévention du surpoids et de l'obésité, facteur de risque d'augmentation de certains cancers (sein, pancreas colorectal rein endomètre...)

Par ailleurs, l'allaitement est associé, chez la mère, à une diminution du risque de cancer du sein. Il contribue également probablement à diminuer le risque de surpoids et d'obésité chez les enfants allaités.

Le régime alimentaire des enfants a-t-il autant d'impact sur leur santé que celui des adultes ? Quels sont les risques spécifiques d'une alimentation carencée pour les enfants ?

Chez le jeune enfant, l’alimentation est d’autant plus importante qu’il a besoin de nutriments essentiels pour sa croissance et que la période de la jeune enfance est également celle de la formation de ses préférences  alimentaires qui détermineront ses comportements alimentaires de demain. Lui apprendre à manger de tout en quantités raisonnables,  à ne pas grignoter entre les repas, notamment des produits trop riches en gras et sucrés, y compris les boissons, mais aussi à pratiquer une activité physique régulière constitue la clé de bonnes règles à adopter pour la vie.

Durant toute la croissance, il est essentiel d’assurer des apports en protéines, calcium , fer, acides gras essentiels (oméga 3). Il est plus indispensable encore qu'à l'âge adulte d'éviter toute forme de carence et donc toute forme de régime (végétarien par exemple) chez de jeunes enfants (pas avant 10 ans ?).

Un des risques de carence les plus fréquents chez les enfants est le manque de fer, avec des risques d'anémie, et pour conséquences fatigue et moins grande résistance aux infections.

Dans le traitement de certaines maladies, les médecins français prennent-ils suffisamment en compte le facteur alimentation dans le processus de guérison ? 

Un ré-équilibrage alimentaire de 3 mois est recommandé par la HAS mais en pratique on assiste trop souvent à une prise en charge médicamenteuse trop systématique.

Une nécessaire formation pratique pourrait être prodiguée à tous les niveaux : des scolaires aux prescripteurs en passant par les salariés. Une action qui relèverait de l'intérêt de notre sécurité sociale autant que de leur intérêt individuel. On ne peut que trouver à tous points de vue des avantages à la généraliser en matière de gestion de stress, d’énergie, et en matière de prévention des principales pathologies, causes de grand nombre de décès à notre époque.

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