DSK : les médias en font-ils trop ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Dans l'affaire DSK, les médias sont à l’affût du moindre battement de cils.
Dans l'affaire DSK, les médias sont à l’affût du moindre battement de cils.
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EDITORIAL

Toutes les Unes des quotidiens et des hebdos sur l'affaire Strauss-Kahn.

Gilles Klein

Gilles Klein

Gilles Klein,, amateur de phares et d'opéras, journaliste sur papier depuis 1977 et en ligne depuis 1995.

Débuts à Libération une demi-douzaine d’années, puis balade sur le globe, photojournaliste pour l’agence Sipa Press. Ensuite, responsable de la rubrique Multimedia de ELLE, avant d’écrire sur les médias à Arrêt sur Images et de collaborer avec Atlantico. Par ailleurs fut blogueur, avec Le Phare à partir de 2005 sur le site du Monde qui a fermé sa plateforme de blogs. Revue de presse quotidienne sur Twitter depuis 2007.

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Une semaine entière sur l'affaire DSK, du matin au soir sur les chaînes d'infos, le sujet principal de tous les journaux télévisés de TF1 et France 2, toutes les Unes des hebdos et des quotidiens : les médias en font-ils trop sur l'affaire DSK ?

C'est le sentiment que l'on pourrait avoir en voyant le nombre de pages consacrées à DSK en six jours, de lundi à ce samedi, en plus des Unes bien sûr : nous avons compté 56 pages pour Libération, 43 pages pour le Figaro, 32 pages pour Aujourd'hui en France, en gros, au total plus de 130 pages pour ces trois seuls quotidiens nationaux, il faudrait ajouter France Soir, l'Humanité, 20 Minutes, Metro, Direct Matin et autres.

Les médias en font-ils trop ? En fait non, les quotidiens ont augmenté le nombres d'exemplaires imprimés et les ventes semblent avoir suivi : on parle de plus de 100% pour Libération, plus 40% pour Le Monde, 27% pour le Figaro, et 15% pour les Echos. Ce dernier, le grand quotidien économique français, explique avoir connu une hausse de 60% sur son site Internet lundi, et un article sur l'emploi du temps de DSK a été lu plus de 110 000 fois.

Pour le Monde, hausse des ventes de 55% pour l'édition datée du 17 mai, avec un tirage augmenté de 45% selon Reuters et France Soir a vu ses ventes monter de 15% pour les trois premiers jours de la semaine.

Son site internet a attiré lundi près de 2,3 millions de visiteurs et enregistré 3,5 millions de visites, soit le double du trafic d'une journée normale et un record pour Le Monde.fr.

Vendredi soir, pendant cette interminable soirée où l'on annonçait toutes les cinq minutes la sortie de prison de DSK,où l'on a repassé, sur BFM TV, et ailleurs, des dizaines de fois consécutives les images de deux camionnettes du service des prisons de Rikers, sans bien sûr savoir qui était dedans, la saturation et la dérision commençaient à envahir le cerveau fatigué du journaliste-téléspectateur auteur de cet éditorial. Sans oublier ce, tout aussi interminable, défilé d'avocats inscrits aux barreaux de Paris et New York, qui répétaient la même chose, sans que l'on sache si l'un d'entre eux avait jamais plaidé devant un tribunal américain.

Mais en fait non, les journaux télévisés des chaînes nationales ont vu leurs audiences augmenter : selon les chiffres Médiamétrie dimanche à 20H00, le journal de TF1 a été regardé par 8,4 millions de personnes, soit 1,2 million de téléspectateurs de plus que le dimanche précédent. Augmentation de plus d'un million aussi lundi, tandis qu'iTélé approchait 900 000 téléspectateurs, et BFM TV dépassait 1,1 million de téléspectateurs, soit 4 à 5 fois plus que d'habitude selon Les Echos. Information citée aussi par Le Parisien : la retransmission de l'audience pendant laquelle Dominique Strauss-Kahn a comparu lundi, a attiré lundi vers 18h45 sur BFM TV quatre à cinq fois plus d'audience, toujours selon Médiamétrie.

Présentée par David Pujadas, l'émission spéciale de France 2 "DSK : et après..." jeudi soir a attiré en moyenne près de 4,7 millions de téléspectateurs  avec des va-et-vient incessants entre le plateau et les envoyés spéciaux devant le tribunal à New York. L'invité était maître Badinter ancien ministre et supporter inconditionnel de DSK, qui n'a pas eu un mot de compassion pour la plaignante américaine, avant que l'on ne lui pose la question. Ce que lui a vertement fait remarquer Laurent Joffrin, le patron du Nouvel Observateur, tandis que le socialiste Manuel Vals explosait de colère sans que l'on sache vraiment pourquoi. C'est ce soir là que l'on a appris que DSK serait libéré sous caution.

Envers et contre tout, même si les médias semblent avoir répondu aux attentes du public, si l'on en croit les ventes de journaux, les audiences des chaînes et des sites, je trouve ce matraquage indigeste et lassant. Ce samedi, Libération consacre encore l'intégralité de sa Une à DSK avec 8 pages sur le sujet. Idem pour Le Monde d'aujourd'hui, daté dimanche qui consacre toute la largeur de la Une avec une photo et un titre bien plat "En liberté très surveillée, DSK prépare sa défense".

Ceci alors que des manifestations spontanées de jeunes, de chômeurs et de personnes lassées par la crise économique, agitent l'Espagne depuis une semaine, à la surprise générale. L'information n'a droit qu'à une page dans Libération (avec une grande photo, ce qui diminue d'autant la longueur du texte, alors qu'elle aurait mérité au moins un coin de Une, et plusieurs pages dans un journal réputé "de gauche" et proche des mouvements sociaux. 

On pourrait aussi ajouter les informations alarmantes en provenance du Japon, où l'opérateur de la centrale estime que les coeurs de trois réacteurs nucléaires ont fondu. Ce n'est pas un détail, cela nous aurait valu des gros titres et des Unes en d'autres temps, mais DSK l'a fait passer à la trappe.

Obama semble avoir pris la mesure du printemps arabe, et après la mort de Ben Laden, saisi l'importance de faire évoluer l'image de l'Amérique dans le monde musulman, il change d'attitude : pour la première fois, il réclame la création d'un état palestinien clairement et demande qu'Israël revienne aux frontières de 1967. 

Les médias pleurent leur candidat favori qui devait assurer un feuilleton digne de ce nom jusqu'à l'élection présidentielle, mais ils le remplacent par un feuilleton juridique et humain qui va durer quelques mois. Nous n'avons pas fini d'en entendre parler.

La presse écrite, et les médias français (sauf la presse économique qui a continué à traiter ses sujets traditionnels, en parallèle de l'affaire DSK) auraient pu faire cohabiter DSK  avec ces trois sujets : le choix a été de les traiter de manière mineure. Dommage. 

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