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Net recul sur l'emploi à domicile : l'autre visage de l'explosion du "black" en France
©Reuters

Allo Nounou bobo

La masse salariale des particuliers-employeurs a baissé de 3 %. L'activité s'est déplacée vers des emplois non déclarés, entrainant une perte de cotisations sociales mais aussi un coût supplémentaire : celui des allocations chômage perçues frauduleusement par les travailleurs au noir.

François Taquet

François Taquet

François Taquet est professeur en droit du travail, formateur auprès des avocats du barreau de Paris et membre du comité social du Conseil supérieur des experts-comptables. Il est également avocat à Cambrai et auteur de nombreux ouvrages sur le droit social.

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Atlantico : Selon la Fepem (Fédération des particuliers-employeurs), la masse salariale des particuliers-employeurs a reculé de 3 % en 2013.  Suppression de l'abattement de cotisation de 15 points, suppression de la possibilité de déclarer au forfait, plafonnement global des niches fiscales à 10 000 € de réduction d'impôts... Les particuliers-employeurs ont la vie dure. Les charges qui pèsent sur les employeurs jouent-elles eu raison du secteur ?

Maître François Taquet : Effectivement selon la FEPEM, le volume d’heures déclarées et la masse salariale nette des emplois à domicile ont reculé de 5 à 6% sur l’année 2013. Certes, le secteur des assistantes maternelles résiste le mieux sachant que les couples avec 2 actifs peuvent moins s’en passer que d’une aide ménagère. Alors que l’on considérait il y a encore quelques années que l’aide à domicile était un vivier d’emplois, force est de constater un net recul de ce secteur. Les causes peuvent être trouvées dans de nombreuses directions : crise économique qui incite certaines personnes à se séparer d’une aide ménagère, charges sociales trop élevées mais également un formalisme juridique qui n’est absolument pas adapté aux particuliers. Sait-on par exemple que rompre le contrat de travail d’une assistante maternelle relève du casse-tête ?

Cela signifie-t-il que le nombre total de personnes employées sous ce régime est vraiment en recul, ou le travail dissimulé vient-il compenser les chiffres officiels ? A-t-on une estimation du nombre de salariés à domicile non-déclarés ?

Il est très difficile de savoir évidemment la proportion de travail dissimulé dans ce secteur mais il est évident que dès lors que le formalisme juridique est trop important ou que les charges sociales obèrent les salaires, ces deux éléments ne font qu’inciter au travail dissimulé.  Certes, l’employeur prend des risques mais, le salarié conservera intact ses droits à l’assurance chômage et il est parfois demandeur de ce type de situation.

Quel est le poids de l’emploi à domicile dans l'économie française ? Dans quelles proportions le travail non déclaré constitue-t-il un manque à gagner ?

Selon les chiffres dont nous disposons, l’emploi à domicile concernerait 2 millions de salariés. La FEPEM estime qu’avec un pacte emploi-domicile 50 000 emplois pourraient être créés et 2 millions d’heures de plus seraient déclarées. Toutefois ces chiffres sont difficilement vérifiables.

Quelles mesures M. Rebsamen, nouveau ministre du Travail, de l'emploi et du dialogue social, doit-il prendre pour compenser ce problème ? Pourquoi sont-elles difficiles à mettre en place ? (cf. les difficultés rencontrées par Christian Eckert, rapporteur général de la Commission des Finances, de l'Economie générale et du Contrôle budgétaire de l'Assemblée nationale, pour instaurer un rabattement à 75 centimes d'euros l'année dernière)

On notera que l’emploi à domicile ne bénéficie ni des allègements généraux de charges sur les salaires ni du crédit d’impôt compétitivité emploi. Le premier coup de grâce a été porté par le gouvernement Fillon avec la suppression depuis 2012 de l’abattement de cotisation de 15 points pour les particuliers déclarant leurs salariés au régime réel. Un an plus tard est intervenu la suppression de la possibilité de déclarer au forfait, possibilité qui concernait 30% des employeurs. En outre, les niches fiscales ont été plafonnées à 10 000€ de réduction d’impôt. En contrepartie le gouvernement avait instauré au 1erjanvier 2013 une baisse de charges sous la forme d’un abattement de 75 centimes d’euro de l’heure. Comme on le voit, cette dernière usine à gaz n’a pas permis d’inverser la tendance. Certes, au milieu d’une crise économique catastrophique, il ne peut y avoir de miracle sur un secteur. Toutefois, ainsi que nous ne cessons de le répéter, deux éléments doivent être pris en compte. Il n’est pas normal que le Droit entrave l’emploi. Or, ceux qui se sont confrontés à l’embauche d’une assistante maternelle ou d’une « nounou » savent que l’embauche est compliquée. Ensuite, simplifions les réglementations fiscales et sociales au lieu de créer des monstres juridiques où plus personne ne comprend quelque chose !

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