Ces sophistes qui nous gouvernent : comment nos dirigeants (et la gauche) ont perdu la raison depuis 20 ans<!-- --> | Atlantico.fr
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"Sur les cultures OGM, le gouvernement annule les autorisations en toute illégalité."
"Sur les cultures OGM, le gouvernement annule les autorisations en toute illégalité."
©Reuters

Ils ont perdu la tête !

OGM, diesel, énergie, pesticides... L'attitude du gouvernement face à ces grands défis découle-t-elle vraiment d'une prise en compte de la réalité des faits ?

Jean de Kervasdoué

Jean de Kervasdoué

Jean de Kervasdoué est un économiste de la santé français, titulaire de la chaire d'économie et de gestion des services de santé du conservatoire national des arts et métiers (CNAM)et membre de l’Académie des technologies. Il a été directeur général des hôpitaux.

Ingénieur agronome de l’Institut national agronomique Paris-Grignon il a également un MBA et un doctorat en socio-économie de l’Université de Cornell aux Etats-Unis. Il est l'auteur de Pour en finir avec les histoires d’eau. Imposture hydrologique avec Henri Voron aux Editions Plon et vient de publier Les écolos nous mentent aux éditions Albin Michel. 

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Atlantico : A la lumière des conclusions de votre essai et de votre critique des faux-semblants de la gauche, notamment sur le thème de l'environnement, quelle est votre analyse aujourd'hui de la défaite du camp de la majorité aux municipales ? Comment expliquez-vous cette défaite ?

Jean de Kervasdoué : Je crois que le fait que les politiques aient perdu la raison s'applique autant aux partis de droite qu'aux partis de gauche. Il y a cinq siècles,  des génies précurseurs ont découvert la méthode scientifique, la seule méthode pacifique, avec la justice, pour résoudre des conflits. "Les scientifiques font pourrir leurs hypothèses à leur plave", indiquait Karl Popper.

Le progrès de l'humanité est venu de la séparation de l'ordre des croyances de celui des faits tangibles. Or, au cours des 20 dernières années, nous revenons à la confusion des ordres. On voit ainsi le Parlement voter des lois mémorielles et donc la loi s’immiscer dans la recherche d'une vérité historique, ou, encore, le Parlement  voter une loi pour interdire l'usage du bisphénol A, alors que l'académie de médecine a rédigé, 18 mois plus tôt, un excellent rapport soulignant les risques minimes de cette substance et ses avantages tangibles qui n'ont, pour l'instant, pas d'équivalent. Le Parlement s'attribue ainsi des compétences scientifiques et médicales et ne s’arrête pas là puisque, au Sénat, une proposition de loi a été débattue sur les conséquences sanitaires supposées des antennes relais alors que des centaines d'articles scientifiques sur ce sujet ne trouvent aucun effet de ces antennes relais sur la santé.  

Ces peurs peu ou mal fondées conduisent à prendre des mesures aussi inutiles qu'onéreuses. Si la croissance du chômage en France tient notamment, à la faible rentabilité du capital investi dans les entreprises, à l'absence de prise de risque industriel des épargnants, aux difficultés d'entreprendre, au coût du travail, à cela s'ajoute encore cette folie réglementaire qui fait que, par exemple, en France, il est maintenant quasiment impossible de créer une industrie chimique, ou une usine d'aliment du bétail, alors que cela est possible en Suisse.

Ces réglementations folles, et ces décalages entre les faits et la réalité, ont joué un rôle dans la montée de l'abstention, le vote contestataire pour le FN et celui du vote systématique contre le parti au pouvoir. Lorsque l'on dit que le moteur diesel tue 42 000 personnes, cela est inexact. Lorsque l'on prétend que les propriétaires de Peugeot sont des assassins parce qu'ils vendent des voitures propulsées par ce type de moteur, cela est aussi infondé que scandaleux. L'étude de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) cité par les Écologistes ne dit rien de cela.

Vous traitez dans votre livre des thèmes suivants : OGM, diesel, énergie, nucléaire, santé, pesticides... Comment qualifiez-vous l'attitude du gouvernement aujourd'hui sur ces sujets-là ? En quoi cette attitude est-elle caractéristique d'une manière de faire et quelles conséquences concrètes en découlent ?

Il y a malheureusement une continuité entre les différents gouvernements sur ces questions.

Sur les cultures OGM, le Gouvernement annule les autorisations en toute illégalité. Plus grave, c'est toute une industrie que la France est en train de perdre. Le premier OGM était franco-belge. On sait pourtant que les OGM actuels ne comportent  aucun danger pour la santé humaine. Dans 10 ans, toute la biologie végétale utilisera la transgenèse (sauf pour quelques marchés de niches), car elle est la méthode de sélection la plus précise et la plus efficace. Aujourd'hui, nous avons encore une balance commerciale des semences qui est positive, et qui s'élève à près d'un milliard d'euros, dans 10 ans, nous devrons en importer.

La politique de l'énergie elle, comporte plusieurs dimensions : géologiques, économiques, sanitaires, climatiques et techniques.  Du point de vue sanitaire, la méthode de production d'énergie la moins dangereuse est aujourd'hui le nucléaire, Tchernobyl et Fukushima inclus. Le nucléaire tue 4000 fois moins que le charbon. Les conséquences de l'industrie nucléaire sur la santé sont beaucoup moins graves qu'on ne le dit. Du point de vue climatique, la source d'énergie qui rejette le moins de gaz à effet de serre est encore le nucléaire et pour l'économie française, c'est un avantage considérable. Les énergies alternatives elles (soleil, vent)  ne produisent pas toujours d'électricité lorsque l'on en a besoin. Un système alternatif doit être forcément compensé par un autre système. C'est ainsi que les Allemands compensent leurs éoliennes par l'utilisation du charbon. Je note aussi une certaine contradiction des écologistes qui ne veulent pas de gaz à effet de serre ni de nucléaire. On ne voit pas très bien comment y parvenir. L'exemple allemand montre que les énergies alternatives conduisent à la croissance du rejet de gaz carbonique.

En ce qui concerne les pesticides, les gens pensent que les produits "bios" sont meilleurs pour la santé alors que toutes les plantes produisent des toxines naturelles et que les fruits et légumes "bios", moins protégés, peuvent être attaqués par des bactéries et des champignons et, ainsi, produire un nombre de toxines supérieurs à d'autres produits de l'agriculture conventionnelle. Or, on ne peut pas nourrir 7 milliards d'être humains sans pesticide dont on découvre l'utilité quand on s'enduit l'été de crèmes anti-moustique ou quand l'on frictionne la tête des enfants pour en chasser les poux ! 

Vous parlez d'objectifs en matière d'énergie qui seraient totalement contraires aux intérêts de la France, quels sont ceux qui vous paraissent les plus flagrants ?

Les intérêts de la France sont assez simples, il faut maintenir un coût d'énergie bas et limiter les importations ce qui se fait aujourd'hui, pour la production d'électricité, grâce au nucléaire. Et l'on sait très bien que si l'on réduisait la part du nucléaire à 50 % d'ici à 2025 dans notre pack énergétique, ce qui me semble impossible, on augmenterait très fortement le prix de l’électricité.

De surcroît, on ne veut pas entendre parler de l'exploitation du gaz de schiste. C'est de  l'hypocrisie : soit il est véritablement dangereux  d'aller chercher du gaz de schiste et je ne vois pas pourquoi on laisserait les autres se mettre en danger, soit l'exploitation du gaz de schiste n'est ni dangereuse, ni plus polluante que l'exploitation d'une mine, alors cela ferait grand bien à notre économie d'éviter d'importer 11 milliards d'Euro de gaz.   

Sur les OGM comme je le disais, on a tout perdu, une recherche, une industrie… et on en importe !

Noel Mamère caractérisait il y a peu le diesel comme scandale d’Etat, êtes-vous d'accord avec cette vision des choses et pourquoi ?

Les moteurs diesel avec filtres ne produisent pratiquement plus de particules. Ils ont par ailleurs un meilleur rendement (25%) et ne polluent pas plus, à kilomètres déplacés, qu'un moteur à essence.

Les grands pneumologues parlent de malades du tabac certes mais pas de malades du diesel qu'ils n'ont jamais vu.

La pire des pollutions provient notamment du charbon, qui rejette à la fois des particules, du CO2 et du souffre. Il suffit de voyager en Chine pour s'en rendre compte.

Le Giec publie ce lundi un nouveau volet de son prochain rapport sur le dérèglement climatique. La France en fait-elle suffisamment sur le sujet ?

La France, comme les autres pays, ne fait pas grand-chose, mais - toujours grâce au nucléaire - elle pollue moins que ses voisins et  rejette notamment 40% de CO2 de moins que l'Allemagne.

Par ailleurs, si l'Europe menait la politique qu'elle entend mener, cela coûterait des sommes considérables qui se chiffreraient en centaines de milliards d'euros. Si la masse de CO2 produite par l'Europe baissait comme le souhaite l'Europe, l'impact sur le climat nous conduirait à gagner en 50 ans, seulement 3 mois de marge dans le processus du réchauffement climatique !

Par ailleurs, et ce n'est ni un souhait, ni un jugement de valeur, je pense que les hommes utiliseront toute l'énergie fossile dont ils disposent, car c'est une énergie facile.

En quoi l'émotion politique perturbe selon vous toute véritable réforme du système de santé français ?

Dans la mesure où vous pensez que la politique consiste à émouvoir au détriment de l'analyse des faits et de la prise de décision qu'ils imposent, il est plus facile d'être généreux avec l'argent des autres que demander de la rigueur. La politique, et le journalisme, de l'émotion dominent, jusqu'au jour où l'on aura de réelles raisons d'être émus, mais il sera trop tard. 

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