Municipales 2014 : tous les enjeux du premier tour<!-- --> | Atlantico.fr
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Les bureaux de vote seront ouverts dimanche pour les élections municipales
Les bureaux de vote seront ouverts dimanche pour les élections municipales
©Reuters

Jour J

Rarement une élection intermédiaire ne se sera déroulée dans un contexte aussi hostile au pouvoir en place. UMP ou FN, qui va en profiter lors de ce scrutin ? Le PS va-t-il néanmoins garder les grandes villes dans lesquelles il est en place ? Tels sont les enjeux du premier tour de ces municipales.

Yves-Marie Cann

Yves-Marie Cann

Yves-Marie Cann est Directeur en charge des études d'opinion de l'Institut CSA.
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  • La gauche et la droite se disputent les grandes villes. Atlantico passe au crible les différentes situations à Paris, Marseille, Bordeaux, Lille, Lyon et Nice
  • Le Front national pourrait jouer un rôle d'arbitre lors de ces élections municipales. Zoom sur Forbach et Hénin-Beaumont
  • L'UMP semble en bonne position pour glaner de nombreuses villes de 30 000 habitants et plus
  • Les triangulaires devraient être nombreuses. Analyse de qui devrait en profiter


Le premier tour des élections municipales a lieu ce dimanche. A l'approche du scrutin les enjeux sont multiples. Malgré un contexte difficile et attaquée de toute part, la droite est donnée favorite par tous les spécialistes. Va-t-elle réellement en profiter ? A gauche, l'impopularité socialiste a rarement été aussi grande et une large défaite est attendue. Quant au Front national, il semble bien parti pour jouer les arbitres en imposant des triangulaires au second tour dans de nombreuses villes. A quoi faut-il vraiment s'attendre ? Yves-Marie Cann, le directeur en charge des études d'opinion de l'Institut CSA, apporte un éclairage.

  • Les grandes villes  

Comme Yves-Marie Cann le fait remarquer, "il y a toujours un certain nombre de villes où le suspense quant à l'issue de l'élection est très faible, voire inexistant. L'enjeu étant plutôt de savoir si la ville en question sera gagnée au premier tour ou au second". Quelles sont-elles ?

Les villes les plus indécises : Paris et Marseille

- "A Paris, compte tenu du mode de scrutin spécifique à la ville, il apparaît évident, sauf énorme surprise, que Anne Hidalgo devrait être élue maire. Il demeure tout de même quelques incertitudes. Sur le premier tour, elle se situe sur l'ordre d'arrivée des principales listes. Dans les dernières enquêtes réalisées, certes les listes de la candidates socialiste sont créditées de pourcentage d'intention de vote supérieur à celle de Nathalie Kosciusko-Morizet, mais on était à 38,5% pour Hidalgo contre 37,5% pour NKM. C'est donc extrêmement serré. Un dernier sursaut des électeurs de droite pourrait faire basculer, en prenant en compte la marge d'erreur inhérente à chaque sondage, le scrutin. 

L'hypothèse d'une arrivée en tête au premier tour des listes de NKM n'est pas à exclure. Ce qui consisterait une belle performance pour la candidate de l'opposition. A Paris, finalement, tout l'enjeu va être de savoir quel va être le score des listes dissidentes (Beigbeder , Tibéri…) Si elles sont proches de 3%, NKM a des chances d'arriver en tête, si c'est 5%, en revanche, cela va la pénaliser".

- "L'incertitude quant à l'issue du scrutin est plus grande à Marseille qu'à Paris. Pour ce qui est de l'ordre d'arrivée au premier tour, dans notre dernière enquête en date de mercredi les listes de Jean-Claude Gaudin (UMP) totalisaient 37% des intentions de vote, 28% pour celles de Mennucci (PS) et 18% pour le FN. Sans surprise, cela devrait être c'est ordre d'arrivée au soir du premier tour. Cet écart de 9 points entre le maire sortant et le candidat socialiste s'explique notamment par un éparpillement des voix à gauche dû, entre autres, à la présence des listes de Pape Diouf (4% des intentions de vote).

Mais en termes de rapport de force au premier tour, la gauche (42,5%) est devant la droite (38%). Ce qui laisse un vrai suspens quant à l'issue finale du scrutin. La mairie de Marseille ne tient qu'à un seul secteur : le troisième. Il suffit que celui-ci, actuellement détenu par la droite, bascule à gauche pour que le PS remporte la ville. Les derniers sondages donnent d'ailleurs un léger, mais fragile; avantage à la gauche. La bascule est donc possible".

Bordeaux : Juppé, l'inamovible

Les élections municipales laissent peu de place au suspense dans cette ville où l'ancien Premier ministre est le maire UMP depuis 1995 (avec une interruption de 2004 à 2006 suite à sa peine d'inéligibilité et son "exil" à Montréal). Elu en 2008 avec 56,6% des voix dès le premier, il est le favori des sondages face à la tête de liste PS-EELV, Vincent Feltesse.
L'avis d'Yves-Marie Cann : "Il apparaît très probable qu'Alan Juppé soit réélu dès le premier tour. L'enjeu ici sera de savoir s'il le sera à 55% ou à 60% en termes de suffrages exprimés. Notre dernier sondage date de décembre 2013 et le donne vainqueur à 59% dès le premier tour. On est donc sur un score très important qui est dans la tradition bordelaise d'élire leur maire dès le premier tour".

Nice : Estrosi en roue libre

Après avoir accédé à la mairie de Nice en 2008 à l’issue d’une triangulaire face notamment au maire sortant, Jacques Peyrat - proche de l’extrême droite et qui se représente cette année -, l'ancien ministre Christian Estrosi (UMP) est donné largement favori dans les sondages.
L'avis d'Yves-Marie Cann : "Dans les dernières enquêtes réalisées, Christian Estrosi approchait les 50% d'intentions de vote et serait donc en mesure d'être réélu dès le premier tour. C'est pratiquement la seule incertitude de ce scrutin : sera-t-il réélu au premier ou au second tour ?"

Lille : l'intouchable Martine Aubry

Depuis 2001, l'ancienne ministre du Travail est maire de la ville. Réélue confortablement en 2008 avec 66,56% des suffrages exprimés, cela devrait une nouvelle fois être le cas en 2014. D'autant plus que depuis l'élection de François Hollande à la présidence de la République, la socialiste ne semble plus avoir d'aspirations ministérielles et être totalement dévouée à la cause lilloise.
L'avis d'Yves-Marie Cann : "Il apparaît acquis que Martine Aubry sera réélue. Cependant, ici, un second tour sera en tout état de cause nécessaire. Dans notre dernier sondage, du mois de novembre, Martine Aubry était créditée de 40% des intentions de vote au premier tour et 60% des suffrages exprimés en cas de triangulaire avec le FN".

Lyon : Gérard Collomb en route pour un troisième mandat

Le sénateur-maire socialiste de la ville devrait continuer à diriger la troisième ville de France au mois d'avril prochain. C'est une quasi-certitude. E n place depuis 2001, et conseiller municipal depuis 1977, il fait partie du décor local et fait campagne sur son bilan. Face à lui, et malgré une campagne de primaire réussie (à l'inverse de Paris) Michel Havard (UMP-UDI) n'est qu'un simple outsider. Pas suffisant pour empêcher sa réélection.
L'avis d'Yves-Marie Cann : "Peu de suspens sur l'issue du scrutin à Lyon où Gérard Collomb va sans aucun doute être réélu. Mais il sera quand même intéressant de voir dans quelle mesure le contexte national peut peser, notamment en termes de démobilisation de l'électorat de gauche. Il sera donc intéressant de bien analyser les résultats des différentes listes et notamment celles emmenées par le maire sortant, de voir comment il se situera par rapport aux résultats de 2008".

  • Les villes qui peuvent passer sous pavillon FN

Le Front national va jouer un rôle d'arbitre lors de ces élections municipales. Dans de nombreuses villes, le parti d'extrême droite semble en situation de se maintenir au second tour dans des triangulaires. Mais le parti de Marine Le Pen est aussi favori pour rafler un certains nombres de villes telles que Hénin-Beaumont, Saint-Gilles, Fréjus, Perpignan ou encore Forbach.

L'avis d'Yves-Marie Cann : "Sur la base des villes de plus de 10 000 habitants, le CSA a recensé une quinzaine de villes où le score du FN pourrait être très élevé au premier tour avec la possibilité de candidats frontistes qui dépasseraient, en suffrages exprimés, ceux de l'UMP. Et dans certains cas effectivement, le FN pourrait même remporter la mairie.

Il est à noter que les villes en question sont très localisées. Elles se trouvent principalement dans le Gard, le Vaucluse, les Bouches-du-Rhône et le Var pour ce qui concerne le sud-est et le Pas-de-Calais avec Hénin-Beaumont et l'Est avec notamment Forbach. Ce sont des zones très localisées qui correspondent aux territoires où le Front national réalise des scores élevés depuis plusieurs années".

Hénin-Beaumont : la tentation Steeve Briois

Régulièrement cité parmi les outsiders mais jamais placé. Depuis le temps, Steeve Briois ne devait plus vraiment l'espérer. Après avoir échoué lors des deux dernières élections municipales, le candidat du Front national est cette fois donné gagnant à Hénin-Beaumont. Conseiller municipal dans la commune depuis 1995, il arriverait largement en tête du premier tour avec 45 % des voix, suivie de celle du maire sortant (DVG) Eugène Binaisse, soutenue par le PS, EELV, le PRG et le PCF, à 34 %, selon un sondage Ipsos-Steria paru mercredi pour France 3 Nord-Pas de Calais et France Bleu Nord.
L'avis d'Yves-Marie Cann : "Steeve Briois progresse fortement au fil des sondages et par rapport aux élections de 2008. Une bascule est donc tout à fait possible à Hénin-Beaumont. Steeve Briois est quelqu'un de très implanté dans la ville, il s'est présenté à de nombreuses élections et progresse continuellement. Ce n'est donc plus vraiment une surprise de le retrouver si haut dans les sondages."

Forbach : Florian Philippot en outsider

L'ancienne cité minière de 22 000 habitants fait partie des villes que le Front national ambitionne de gagner. Avec 42% des voix aux dernières législatives, le bras droit de Marine Le Pen, Florian Philippot, entend ravir la mairie à Laurent Kalinowski, le socialiste sortant. Dans les sondages, les deux hommes sont au coude-à-coude et tout semble possible dans cette petite ville de Moselle.
L'avis d'Yves-Marie Cann : "Florian Philippot apparaît en mesure de réaliser un très bon score. Mais pour une éventuelle bascule, tout va dépendre des résultats du premier tour."

  • Les villes qui peuvent basculer de gauche à droite

Dans beaucoup de villes, la majorité ne tient qu'à un fil. Et si en 2008, une véritable vague rose avait déferlé sur la France, qu'en sera-t-il en 2014 ? Selon un sondage réalisé par l'institut CSA pour BFMTV, Le Figaro et Orange, à trois jours du premier tour des élections municipales, les intentions de vote mesurées auprès des électeurs des villes de plus de 3 500 habitants donnent une large avance aux listes du centre ou de la droite sur celles de gauche. L'UMP, ses alliés MoDem ou UDI et les candidats divers droite sont crédités de 49% des intentions de vote contre 41% pour les listes PS, Europe Écologie, Front de gauche et divers gauche. Mais pour combien de bascule ? Réponse le 31 mars.

L'avis d'Yves-Marie Cann : "En métropole sur la base des villes de 30 000 habitants et plus, on a recensé une quarantaine de villes qui pourraient basculer de gauche à droite. Parmi elles, on peut citer Reims, Amiens, Auxerre, Blois, Angers, Laval, Toulouse, Strasbourg…On pourra parler de sanction sévère, voire de bérézina pour la gauche, si la droite parvient à effacer au moins la totalité de ses pertes de 2008. A cette époque, le différentiel entre la gauche et la droite était de +40 villes de 30 000 habitants en faveur de la gauche. Tout l'enjeu est de savoir si la droite sera en mesure d'effacer cette défaite et donc de reconquérir 40 villes".

Le cas particulier de Reims :

En 2008, la socialiste Adeline Hazan avait pris la ville avec 56,07% des voix face à une UMP divisée par une primaire entre deux ex-ministres, Catherine Vautrin et Renaud Dutreil. Pour ce scrutin, la droite entend bien récupérer son dû. S'il y a deux mois, un sondage CSA donnait Arnaud Robinet, le candidat UMP, en tête au premier comme au second tour. Mais une enquête Ipsos/Steria publié mercredi par France 3 Champagne-Ardenne indique que Adeline Hazan qui conduit la liste PS-EELV-PCF PRG obtiendrait 42 % des suffrages au premier tour devant la liste UMP-UDI-Modem d'Arnaud Robinet (39 %) et celle du frontiste Roger Paris qui serait en mesure de se qualifier pour une triangulaire avec 13 % des voix. Le suspens est donc entier.
L'avis d'Yves-Marie Cann : "Reims est une ville traditionnellement à droite qui avait basculé à gauche en 2008 à cause de la bisbille entre les deux candidats UMP (Renaud Dutreil et Catherine Vautrin). Mais aujourd'hui, la droite a su faire l'union dès le premier tour qui devrait lui permettre d'aborder beaucoup plus sereinement et confortablement le scrutin. Mais rien n'est acquis car il existe une vraie incertitude quant aux comportements des électeurs du FN."

  • Les villes où il y a un risque de triangulaire

Comme indiqué plus haut, le FN va jouer un rôle d'arbitre dans ces élections. Dans de nombreuses villes, le parti d'extrême droite devrait se maintenir au second tour dans des triangulaires.

Quel parti sera avantagé ?
"On voit bien que dans toutes les villes incertaines où le FN apparaît en mesure de se qualifier pour le 2nd tour, c'est l'UMP qui sera la plus pénalisée. Il peut y avoir cependant des éléments de nuance, notamment selon que ce soit des villes du Nord ou du Sud. Dans le sud, il est clairement établi que l'électorat est de droite et donc ce sont les listes UMP qui seront les plus pénalisées par la présence du FN au second tour."

Un Front républicain ? Quel Front républicain ?
"Cette thématique risque d'agiter quelque peu l'entre-deux-tours. Mais on a bien vu lors des dernières élections partielles que le Front républicain n'existait plus dans les urnes. Il n'est plus aussi efficace que par le passé parce que l'image du Front national s'améliore. Le parti de Marine Le Pen est nettement plus ancré dans le système désormais qu'à l'époque de son père."

Des alliances avec le FN ?
"Tant les dirigeants nationaux de l'UMP que ceux du Front national ont insisté : il n'y aura pas d'alliances, ni de désistement lors des élections municipales. C'est la règle établie à l'échelle nationale. Mais c'est avant tout un scrutin local qui à lieu et donc sous la pression de la base militante des exceptions peuvent exister. La question peut par exemple se poser dans des villes comme Brignoles, Fréjus ou Béziers."

Propos recueillis par Maxime Ricard

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