Le plan de Zuckerberg pour convertir le prochain milliard d'utilisateurs d'internet à Facebook<!-- --> | Atlantico.fr
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Le patron de Facebook envisage de racheter un spécialiste des drones, a affirmé mardi le site spécialisé TechCrunch.
Le patron de Facebook envisage de racheter un spécialiste des drones, a affirmé mardi le site spécialisé TechCrunch.
©Reuters

Internet pour tous

Tout le monde pourra avoir accès à un internet simplifié essentiellement réduit à du texte, tout ça à un prix accessible ou gratuit. C'est la nouvelle ambition de Marck Zuckerberg. Le patron de Facebook serait en discussion pour racheter l'entreprise américaine Titan Aerospace, qui fabrique des drones à énergie solaire, dans le but d'apporter une connexion Internet aux populations les plus défavorisées.

Maxime Pinard

Maxime Pinard

Maxime Pinard est directeur de Cyberstrategia, site d'analyse stratégique portant sur les enjeux du cyberespace et de la géopolitique en général. Il est adjoint aux formations à l'IRIS, en charge de l'enseignement à distance et de la formation "Action humanitaire : enjeux stratégiques et gestion de projet".

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Atlantico : Le patron du réseau social envisage de racheter un spécialiste des drones, a affirmé mardi le site spécialisé TechCrunch. Pour transformer ces robots volants en satellites miniatures et ainsi connecter les pays émergents à Internet. Et à Facebook, bien entendu. Jusqu’où va aller Mark Zuckerberg ?

Maxime Pinard : Le fondateur de Facebook part d'un constat à la fois simple et délicat pour le géant des réseaux sociaux : sa croissance est en perte de vitesse, il a perdu en attractivité et ne séduit plus sur ses marchés historiques, américain et européen principalement. Mark Zuckerberg cherche donc d'autres moyens d'attirer de nouveaux utilisateurs, issus désormais de pays où les conditions d'accès à Internet ne sont pas aussi optimales qu'en Europe ou qu'aux Etats-Unis. Il lance ainsi des initiatives pour palier les défaillances et retards technologiques des pays visés (continents africain, sud-américain, asiatique) avec des projets de mini-satellites ou de ballons atmosphériques embarquant des relais wifi par exemple. Le succès de Facebook ne peut se mesurer que sur la durée : Internet regorge de géants éphémères du Web et Mark Zuckerberg veut éviter une telle fin à sa société, d'où ses actions tous-azimut dans les sociétés technologiques.

Connecter la population des pays émergents à Facebook, est-ce vraiment la priorité de l’accès au numérique ? Ont-ils vraiment un intérêt à être connecté ?

Le dogme de la connectivité, tel qu'il est présenté en Occident, tend à forcer chacun à développer sa vie dans le cyberespace, avec les risques que l'on connaît (perte de son identité numérique, vulnérabilité accrue avec des cybercriminels difficilement retrouvables, dépendance à l'égard d'Internet, accentuation du phénomène de consumérisme...). Pour autant, il y a aussi des aspects positifs dans l'accès au numérique qu'il ne faut pas négliger : que ce soit pour des questions de santé (avertir rapidement d'un début d'épidémie), de gestion de crise (localiser rapidement des populations fragilisées lors de catastrophes naturelles) ou économiques (permettre à des travailleurs éloignés des centres d'information d'avoir les éléments de compréhension suffisants pour optimiser leur travail), le numérique peut être un plus pour le développement de régions, voire de pays, à condition que ce processus soit fait dans le respect des droits de chacun et qu'il ne soit pas le résultat de la seule volonté d'une multinationale des NTIC.

Développer un accès internet gratuit depuis des téléphones portables low-cost pour les pays émergents (1 milliards de $ investi par Facebook pour connecter 2 à 3 milliards de personnes d’ici à 10 ans). C’est le nouveau grand projet de Marck Zuckerberg qu’il a présenté au "Mobile World Congress 2014". Est-il le visionnaire qui va connecter toute la planète ou un très bon communicant ?

Je pense que Mark Zuckerberg n'est pas qu'un bon communiquant. Il y a de la sincérité dans sa démarche, même si l'argument financier n'est évidemment pas à oublier. Il cherche à faire passer sa plateforme Facebook de "service d'ordinateur" à "service de téléphone", conscient de la formidable croissance des smartphones qui sont des outils fantastiques pour augmenter la facilité d'achat chez l'utilisateur. L'objectif est simple: à terme, lorsqu'on allumera son téléphone, on devra passer par une interface Facebook avec toutes nos informations qui seront utilisées à des fins commerciales. Cependant, on peut remarquer que les premières tentatives en Occident ont reçu un accueil assez froid et surtout, les opérateurs téléphoniques ne semblent pas particulièrement disposés à baisser les forfaits de connexion aux utilisateurs. C'est une guerre qui sévit depuis plusieurs années entre les FAI et les fournisseurs de contenu, ces derniers utilisant toujours plus de bande passante, obligeant les premiers à des investissements faramineux pour tenir la cadence. Le jeu se trouble en tout cas avec des FAI qui se veulent aussi fournisseurs de contenu et inversement.

Avec ce projet, tout le monde pourra avoir accès à un internet simplifié essentiellement réduit à du texte, tout ça à un prix accessible ou gratuit. Facebook n’aura pas d’intérêt direct. Quels seront les bénéfices pour la firme à long terme ?

Même si Facebook a reconnu qu'avec un tel projet, il y aurait plusieurs années de pertes réelles, les bénéfices peuvent être colossaux. En devenant un FAI et un fournisseur de contenus, Facebook contrôlerait des pans du cyberespace entier, avec des utilisateurs que l'on forcerait à privilégier telle ou telle plate-forme. Le risque de monopole ne serait d'ailleurs pas à écarter et il est clair que si cette initiative, louable par certains aspects, était un succès, cela poserait de sérieuses questions quant au poids géopolitique d'une telle société, qui connaîtrait la vie de près de la moitié de la population mondiale... Elle pourrait servir les intérêts d'Etats, au premier rang desquels les USA, et deviendrait une machine publicitaire sans équivalent avec des retombées financières difficilement envisageables. Néanmoins, rappelons que l'histoire d'Internet va à une vitesse très rapide et qu'un géant comme Facebook aujourd'hui pourrait très bien se retrouver avec des concurrents plus importants demain. L'objectif est, rappelons-le si besoin, non pas philanthropique, mais bien économique et financier.

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