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Chirac, cet inconnu
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Retraité célèbre

Alors que le tribunal correctionnel de Paris a décidé de renvoyer au 20 juin le procès de Jacques Chirac, Véronique de Bure publie chez Stock une biographie de l'ancien président, "Un retraité", sans l'avoir rencontré. Est-il possible de dresser le portrait d'une personne que l'on ne connait pas ?

Tristane Banon

Tristane Banon

Tristane Banon est écrivain et journaliste.

Elle écrit pour Atlantico essentiellement sur les jeunes dans le cadre de la rubrique "Jeunesse se passe".

Photo © Fanny Falourd

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Mercredi 9 mars au soir, tard, j’allume la télévision. Le Soir 3, Taddéï suivra. L’animateur présente les invités et, entre Bruno Gaccio et Denis Tillinac, face à Ghislaine Ottentheimer, je la vois elle, mon éditrice, ma toute belle éditrice à moi ! L’émission fait la revue de presse de ces derniers jours, essentiellement de la politique, rien qui ne puisse passionner Véronique de Bure, ma Véronique de Bure. Alors quoi ? Alors la madame sort le lendemain Un retraité sous-titré « Comme les autres », un essai fruit d’entretiens multiples avec un « très proche » de Jacques Chirac, son « Messager » comme elle l’appelle.

Le procès de l’ancien Président a été reporté le matin-même et c’est ce petit fait d’actualité qui justifie la présence de Véronique. Ma propre éditrice ne m’a rien dit, elle a gardé ce livre comme un secret, elle que je la voyais la veille encore. Elle m’a fait un livre dans le dos comme dira par la suite un autre de ses auteurs fétiches. Qu’importe, je l’écoute. Frédéric Taddéï l’annonce « Véronique de Bure qui sort un livre sur Jacques Chirac, qu’elle n’a jamais rencontré ». Personne ne relève « qui sort un livre sur Jacques Chirac qu’elle n’a jamais rencontré ».

Personne ne relève qu'elle ne l'a jamais rencontré

L’émission glisse, Véronique avoue ne rien n’y connaître en politique et, encore une fois, personne n’est surpris. Alors, je l’appelle vers minuit, j’exige mon exemplaire du bouquin et la gronde, pour rire et pour de vrai, parce que quand même ! Le lendemain matin (j’écris ces lignes à chaud), le livre arrive par coursier, à l’aube. Je lis le petit chose en une heure et, depuis, je m’interroge : peut-on raconter un homme sans ne jamais l’avoir croisé ? Peut-on relater la parole d’un autre sans qu’il ait approuvé cette chose-là ?

Car enfin, le « messager » n’a jamais donné son accord à la publication de l’ouvrage. Peut-on enfin faire de la littérature avec les traits vieillissants d’un homme qui fut notre dirigeant ? J’ai refermé le livre persuadée que oui. Évidemment, l’essai est remarquablement écrit, évidemment je ne suis sans doute pas objective sur ce point. Reste que la question demeure : ce court récit est-il honnête ? La réponse ne va pas de soi. Lorsqu’un homme devient Président, ne faut-il pas qu’il accepte d’être le Président de tous, un peu « à tous » ? Véronique de Bure n’a pas écrit un livre voyeuriste sur les dernières années glauques et sinistres d’un personnage médiatique, elle a voulu conter ce qu’était devenu « son président », celui qui l’a fait se rendre fêter la victoire place de la Concorde en 1995 quand elle n’avait jamais rien entendu à la chose électorale avant ça.

Séduite par Chirac, comme tant d'autres

Véronique votait blanc jusqu’à Chirac, cet homme l’a séduite comme il a su draguer des milliers de français, existe-t-il plus romanesque comme histoire ? Comme on prend des nouvelles d’un ancien amant, Véronique a voulu savoir ce qu’il devenait dans sa vieillerie. En avait-elle le droit ? Chacun lira et édictera sa loi sur le sujet. En attendant, après le livre Off de Maurice Szafran et Nicolas Domenach consacré à Nicolas Sarkozy avec qui ils n'auraient plus discuté depuis 2008, il semblerait qu'écrire sur celui qui ne vous parle pas soit une solution d'avenir. Je vais peut-être écrire à mon voisin, j'ai des choses à lui dire !

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