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Si les chefs syndicaux s’attaquent avec une telle violence au FN, c'est d’abord pour sauver leur peau
©Reuters

L'Edito de Jean-Marc Sylvestre

La montée du Front national n’a pas épargné le monde syndical qui se retrouve pris en porte-à-faux parce que beaucoup de ses adhérents n’ont pas résisté au chant des sirènes.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Au lendemain des résultats du 1er tour des élections régionales, donnant un score historique au FN, les dirigeants syndicaux eux-mêmes se sont réveillés avec la gueule de bois. A l’image des organisations patronales (Medef et CGPME), la CGT a réagi avec beaucoup de violence dénonçant le Front national qui n’est pas un parti comme les autres et dont le programme est fondé sur la gestion des inégalités. La CFDT a été un peu plus modérée mais a publiquement refusé le choix frontiste en disant que ce parti n’apportait aucune réponse aux problèmes économiques et sociaux. Les syndicats UNSA et FSU sont au diapason… FO, CFDT et CGT restent sans voie mais très gênés et résignés.

Traditionnellement, les syndicats de salariés sont plutôt engagés à gauche, voir à l’extrême gauche, comme la CGT qui a toujours été liée au Parti communiste. Les syndicats ont souvent soutenus les partis de gauche en fournissant des militants de campagne, mais ils ont très rarement pris des positions publiques contre des partis de droite.

 Le coup de colère de cette semaine est donc particulièrement spectaculaire. Les chefs syndicaux nous expliquent que les valeurs portées par le Front national sont aux antipodes de celles que défendent les syndicats. Ils ajoutent sans beaucoup de conviction que le Front national au pouvoir des régions conduirait au désastre car le programme est absolument inapplicable.

Ceci dit, les vraies raisons sont ailleurs. Les dirigeants syndicaux se sont aperçus qu’ils étaient touchés à l’intérieur de leur organisation par le FN. A la CGT et ailleurs, on sait qu’une quantité non marginale des adhérents ont quitté le syndicat pour s’engager au Front national.

On s’est aperçu aussi que le vote FN provenait également des adhérents syndicaux. Que le FN ait trouvé des électeurs parmi les couches populaires, menacées par la mondialisation et le chômage, n’est pas un scoop. Mais que le recrutement de sympathisants aille se faire jusqu’au cœur des centrales syndicales, ça crée un choc. Des sondages sont effectués depuis dix ans pour mesurer qui vote FN. Aujourd’hui, près de 22% des CGT seraient votant pour le FN. Près de 33% des adhérents de CGT-FO voteraient pour Marine Le Pen.

Sur l’ensemble des syndicats de salariés, le nombre de sympathisants qui auraient voté FN, oscillerait entre 27% et 29% des effectifs.

Pour les dirigeants syndicaux , c’est un cataclysme. D’abord les sympathisants FN  s'ils sont aussi nombreux vont être ingérables à l’intérieur de la centrale. S’ils restent inscrits, il constituent plus qu'une minorités d'agités capables de perturber les directions ou de créer des syndicats dissidents. S’ils partent, ils vident les syndicats de leurs effectifs. Dans tous les cas de figure, les prochaines élections professionnelles risquent d’être sportives.

Les réactions des leaders sont donc très légitimes. Ce sont des réactions de protection. Reste à savoir si elles pourront être efficaces, mais c'est peu probable. Les adhérents syndicaux sont sensibles aux arguments du Front national, parce qu’ils n’ont pas trouvé dans le discours de leurs dirigeants des réponses plus adéquate à la situation.

Les adhérents des syndicats font le même raisonnement que l’opinion publique française. Les élites sont à coté de la plaque, pour apporter ce qui  manque à la très grande majorité des Français : "de la sécurité pour notre vie quotidienne, et du boulot pour nos enfants". Marine Le Pen donne le sentiment d’apporter des réponses neuves.

Il existe une rupture profonde entre les classes dirigeantes de la politique, de l’Europe et la base des électeurs. Les dirigeants  des syndicats sont considérés comme les politiques. Ils sont dans le système, celui  qui nous a conduit à la faillite. La riposte des chefs prouve qu’ils n’ont pas  compris les vrais raisons de cette rupture. Quand ils se fâchent, ils accroissent la rupture et quelque part ils favorisent le vote FN.

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