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Mais pourquoi ceux qui se battent contre le glyphosate ne s’attaquent ni au tabac, ni à l’alcool ? Alors que...
©EMMANUEL DUNAND / AFP

Atlantico Business

S’il faut lutter contre le cancer, interdire la consommation de tabac ou d’alcool serait tout aussi urgent que d’interdire le glyphosate.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Le débat sur le glyphosate tourne au psychodrame et démontre l’incapacité des sociétés modernes et démocratiques à prendre des décisions rationnelles et cohérentes.

Le glyphosate est un herbicide utilisé massivement par toute l’agriculture mondiale depuis plus de trente ans. Selon certaines études scientifiques, le glyphosate contiendrait des substances cancérigènes ou des composants qui pourraient favoriser le développement du cancer chez les agriculteurs utilisateurs et chez les consommateurs de produits agro-alimentaires.

Toutes ces affirmations sont au conditionnel parce qu’il n’existe pas de résultats scientifiques certains et crédibles qui émaneraient d’organismes connus et reconnus dans le monde pour leur expertise dans le domaine.

Donc, à partir de ces études « fragiles », beaucoup de groupes de pression, des organisations écologistes notamment et une partie de l’opinion publique, beaucoup de populations diverses tiennent donc le glyphosate comme probablement cancérigène et en appellent au principe de précaution pour demander, exiger et même imposer l’interdiction du glyphosate.

Du coup, la confrontation, entre ceux qui sont pour et ceux qui sont contre, part dans tous les sens et tourne au psychodrame.

D’un côté, les contres qui ont le vent en poupe, qui dénoncent non seulement le caractère dangereux du produit, mais qui accusent les grands fournisseurs de l‘agrochimie comme Monsanto de faire pression pour freiner les audits scientifiques, les mêmes soupçonnent à mi-voix les grandes coopératives agricoles et la FNSEA, d’avoir intérêt à continuer d’utiliser le glyphosate pour des raisons financières puisqu’elles commercialisent toutes ces herbicides.

Et puis de l’autre, on a la grande masse des agriculteurs qui expliquent que sans glyphosate, ils ne peuvent plus travailler puisqu‘ils ne pourront pas maintenir les rendements et les prix de revient. Pour eux, c’est d’autant plus grave qu’ils n’ont pas de produits alternatifs. Les agriculteurs qui rappellent au passage que le taux de cancer n’est pas plus important chez eux que dans le reste de la population. Et si le nombre de cancers détectés a un peu augmenté depuis trente ans, personne ne peut l’attribuer au glyphosate, mais plus surement à l’allongement de la durée de vie. L’espérance de vie a gagné plus de 15 ans lors des trente dernières années ; et 15 années de vie supplémentaire laissent le temps à certaines maladies de se déclarer.

Donc, le débat échappe désormais aux arguments rationnels. Ce débat est envahi par les arguties politiques, les clichés idéologiques. Et on a fait de l’interdiction du glyphosate un marqueur de modernité. Les responsables politiques ont beau rappeler les contraintes de production et les objectifs économiques et financiers dont les agriculteurs ont besoin, ils s’engagent vers une suppression prudente, donc rationnelle. Mais du coup ces dirigeants politiques qui essaient d’avoir un comportement responsable, puisqu’ils sont aux affaires, passent pour de dangereux conservateurs soumis aux puissances d’argent de l’industrie chimique. Ces excès de langage sont ridicules.

Si on interdit le glyphosate parce qu’il serait cancérigène, pourquoi ceux-là mêmes qui brandissent des dangers pour la santé, pourquoi ne se battent-ils pas avec autant de détermination et de conviction pour demander l‘interdiction absolue de fumer du tabac (et autre substance) ? Pourquoi ne demandent-ils pas l’interdiction de consommer de l’alcool ? Parce que le tabac et l’alcool sont enracinés dans la culture populaire ou parce que le tabac et l’alcool appartiennent aussi à des puissances d’argent ?

Ce qui est cocasse dans le débat, c’est que ceux qui réclament l’interdiction du glyphosate le font au nom de la responsabilité sociale et collective mais ils épargnent le commerce de l’alcool et du tabac au nom du respect de la liberté individuelle.  

Or, messieurs les procureurs, s’il y a des substances qui tuent des millions d’hommes et de femmes, c’est bien le tabac dont on sait avec certitude qu’il est à l’origine de 80% des cancers du poumon. On sait aussi avec autant de certitude que l’alcool est à l’origine de maladies gravissimes du foie, du système cardio-vasculaire et du système neurologique. Les cancers et les maladies cardio-vasculaires représentent plus du tiers des dépenses de l’assurance maladie.

Ces produits de grande consommation sont directement dangereux pour ceux qui les consomment... mais pas seulement. Le tabagisme passif ça existe. L‘alcoolisme tue aussi sur la route et ailleurs beaucoup de gens qui ne boivent pas, mais qui pour leur malheur ont croisé des alcooliques.

Quant aux partis politiques de droite comme de gauche, ils sont en général moins vaillants à demander des restrictions sur le tabac et l’alcool, que pour freiner le glyphosate.  C’est bizarre, non ?

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