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Joe Biden s'exprime lors de la COP26 à Glasgow, en Ecosse, le 2 novembre 2021.
Joe Biden s'exprime lors de la COP26 à Glasgow, en Ecosse, le 2 novembre 2021.
©Steve Reigate / POOL / AFP

Environnement

Point n’est besoin que l’OPEP ou la Russie créent des difficultés énergétiques pour renforcer leur hégémonie. Le G7 s’en occupe très bien.

Samuel Furfari

Samuel Furfari

Samuel Furfari est professeur en géopolitique de l’énergie depuis 20 ans, docteur en Sciences appliquées (ULB), ingénieur polytechnicien (ULB). Il a été durant trente-six ans haut fonctionnaire à la Direction générale de l'énergie de la Commission européenne. Auteur de 18 livres.

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En octobre 1973, à l’occasion de la guerre de Kippour, les pays arabes de l’OPEP (Organisation des pays exportateurs de pétrole) suivant en cela le colonel Kadhafi ont augmenté brutalement le prix de leur pétrole et surtout instauré un embargo de livraison aux pays amis d’Israël. En février 1979, l’ayatollah Khomeiny a durci le choc pétrolier. L’OCDE contusionnée découvrait la dure réalité de sa dépendance énergétique[i].

Avant cette crise, l’intérêt pour l’énergie était porté par les ingénieurs, les grandes entreprises et quelques diplomates ; dans la douleur, le monde découvrit qu’il avait un besoin criant d’énergie, l’impératif majeur du monde moderne encore plus pressant aujourd’hui. Sans énergie, on reviendrait au travail pénible, au bien-être pour les riches seulement, aux difficultés de déplacement, à l’hygiène précaire, à l’espérance de vie courte et à l’absence de loisirs et de médias. Les Grecs avaient posé les bases de la science ; Galilée, Newton et leurs émules l’ont formalisée et lui ont donné ses lettres de noblesse, mais leurs enfants et petits-enfants ont continué à vivre comme eux, dans un monde de précarité où seuls les nantis qui exploitaient des servitudes avaient un minimum de confort. Puis survint l’énergie fossile et tout bascula, comme le montre si bien Richard Rhodes dans son livre qui porte si bien son sous-titre ‘Energy – A human history’. La révolution industrielle devenait possible et elle a créé le monde que nous connaissons. Tout — tout ! — ce que vous touchez et voyez en lisant ces lignes a été produit et transporté grâce à de l’énergie fossile abondante et bon marché. Rien n’y a échappé.

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Pourquoi les Kadhafi, Khomeiny et autres ont-ils pu nous mettre à genoux pendant quelques années ? Parce que nous leur avons donné un bâton pour nous battre. Ce ne sont pas eux qui ont créé le Club de Rome ! Ce ne sont pas eux qui ont fait tourner des modèles qui annonçaient la fin du pétrole pour 2000 ! Ce ne sont pas eux qui ont endoctriné toute une génération avec des affirmations du style « on ne peut pas continuer comme ça, on n’aura pas assez de ressources ». Ce sont les dirigeants et les académiques des pays de l’OCDE les plus influents ― qui forment aujourd’hui le G7 ― qui ont dit qu’il n’y aurait plus de pétrole. Au contraire, les pays pétroliers savaient très bien combien leurs réserves étaient abondantes, bon marché et sûres. Ils se sont dit que puisque l’OCDE croyait à la fin du pétrole, ils allaient pouvoir dominer l’Occident en le muselant à travers l’énergie. Cela a déclenché une inflation qu’il a fallu des décennies pour juguler. Les pays en développement, qui sortaient du colonialisme et tentaient d’industrialiser leurs pays, ont été lourdement affligés par cette inflation galopante au point qu’ils ne parvenaient pas à payer les intérêts sur les intérêts. Cela a mis fin à leur rêve légitime d’industrialisation.

Les réponses réussies aux chocs pétroliers

Heureusement, les pays de l’OCDE ont réagi et ils ont pu se délivrer de l’asservissement géopolitique, mais pas de l’inflation. Comment fut résolue cette « crise du pétrole » ? L’UE créa immédiatement le programme de démonstration « Oil and gas » qui finançait les industries parapétrolières — celles qui développent les technologies utilisées par les entreprises productrices — ce qui permit de développer la production de pétrole et de gaz naturel dans la mer du Nord. L’autre solution fut l’apport de l’électricité nucléaire. Décidée dans les années 1950 par les fondateurs de l’UE, elle arriva fort opportunément à maturité pour être déployée au moment de la crise. En 1973, 31,9 % de l’électricité produite dans l’UE de l’époque provenait des produits pétroliers et de l’énergie nucléaire (à ses débuts seulement 7,5 %). En 1985, j’écrivais dans un livre de mon institution que ces chiffres en 1983 étaient respectivement de 13,1 % et 27,5 %[ii]. La conséquence de ces mesures occasionna « le contre-choc pétrolier » avec un prix de baril de seulement 15 $/b en 1986. On créa aussi une arme abordée plus loin. L’OPEP et l’Iran durent rentrer dans les rangs.

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On le voit, les bonnes réponses ont été de produire plus d’énergie et non pas d’en produire moins. Les économies d’énergies ont contribué et contribueront, mais soyons sérieux  : l’UE consommait 52 exajoules en 1973 et 55 exajoules dix ans plus tard, preuve que l’on n’en a pas consommé moins.

Le G7 crée une nouvelle débâcle

Mais à présent, le G7 ― sous la houlette des États-Unis et de l’UE ― nous entraine dans une nouvelle débâcle énergétique. Nous avons la chance qu’à ce jour l’OPEP et la Russie ne jouent pas la carte géopolitique qu’ils ont pourtant bien en main. Imaginez ce que provoquerait un nouvel embargo pétrolier ! Il serait bien plus pénible, car nous sommes bien plus dépendants de l’énergie pour notre vie quotidienne que nous ne l’étions il y a quatre décennies ans : aujourd’hui (avant la Covid), le monde a besoin de 97 millions de barils de pétrole par jour (Mb/j) alors qu’en 1979 ce n’était que 59 Mb/j.

Les mêmes erreurs conduisent aux mêmes conséquences. Aujourd’hui, les acteurs ne s’appellent plus Club de Rome, mais GIEC ; ils ne s’appellent plus Kadhafi, mais Jo Biden, Khomeiny, mais Franz Timmermans. L’officine des Nations Unies et les dirigeants de l’UE ont convaincu presque toute la population ― et surtout la jeunesse ― que nous courons à la catastrophe si l’on n’arrête pas d’utiliser les énergies fossiles alors qu’elles ont amélioré notre façon de vivre sans équivalent dans l’histoire de l’humanité. J’entends déjà les cris de ceux qui sont offusqués et qui répètent comme en 1973/1979 « on ne peut pas continuer comme çà… ».

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Sauf que cette fois il y a une grande différence qui va fortement pénaliser ceux qui prophétisent la catastrophe à venir. Comme l’ont montré vingt-six COP successives, les pays en développement n’ont que faire des études du GIEC, des dirigeants démocrates aux États-Unis, de l’establishment de Bruxelles et Strasbourg, voire du gouvernement de Berlin.

La Chine consommait 1 MB/j lors des chocs pétroliers ; elle en consomme aujourd’hui 14 Mb/j. Cela change tout, car on sait que la Chine continuera sa croissance, quelles que soient ses émissions de CO2. En 1973, elle ne représentait que 6 % des émissions mondiales ; aujourd’hui, elle est de très loin la première émettrice avec 31 %. Puisque seulement 400 millions de Chinois vivent dans des conditions semblables à celle des habitants du G7, pour amener l’autre milliard de Chinois au même niveau, la seule façon de le faire sera d’augmenter de manière vertigineuse la consommation d’énergie fossile et nucléaire. La Chine de Xi Jinping s’organise pour que l’Iran soit un fournisseur principal d’hydrocarbures sans négliger tout le potentiel d’importation de gaz et de pétrole depuis l’Afrique et l’Asie centrale[iii], potentiel qu’il a patiemment tissé. Quant au nucléaire mal aimé à Bruxelles et Berlin, il est en plein essor dans les technologies conventionnelles (Gen-II, Gen-III) et non conventionnelles (Gen-IV).

On pourrait dire la même chose pour l’Inde et en fait pour tous les autres pays non OCDE. Peut-être que ces chiffres vont convaincre les sceptiques : depuis 1992, lorsque l’ONU a prêché qu’il fallait réduire les émissions de CO2, les émissions mondiales ont augmenté de 58 % et, incidemment, celles du Vietnam de 1 100 %.

Alors penser que le monde va abandonner les énergies fossiles et l’énergie nucléaire est d’une naïveté désarmante. Le président Macron ferait bien de donner une injonction à « son » entreprise Engie qui veut abandonner les centrales nucléaires en Belgique, car la France aura du mal à vendre des centrales si « son » entreprise ne promeut pas le nucléaire[iv].

Ce n’est pas tout. Pour mettre en œuvre leur politique suicidaire, la plupart des membres du G7 — en premier lieu l’UE et les États-Unis — autocensurent leur production d’hydrocarbures. Nous ne prendrons que deux exemples : États-Unis et Italie.

Biden principal responsable de l’envolée des prix de l’énergie

Joe Biden avait annoncé lors de sa campagne électorale qu’il allait détruire l’industrie pétrolière américaine. Il est en train de réussir son engagement grâce à un plan couteux pour pousser les solutions concurrentes, même si elles sont non économiques. Pris de panique face à la montée du prix du pétrole qu’il a créé en fustigeant les industriels du secteur, il a l’outrecuidance de demander à l’OPEP et à la Russie d’augmenter leur production afin de faire baisser le prix de l’essence aux États-Unis.

Il manipule aussi les règles de l’AIE (Agence internationale de l’énergie), agence créée par l’OCDE pour réagir à la tentative de contrôle géopolitique de l’OPEP. Rappelons, comme nous l’avons annoncé au début de cette tribune, que pour répondre aux pénuries physiques de 1973/1979, cette institution a créé l’obligation pour ses États membres de posséder 90 jours de réserves de pétrole brut ou de produits pétroliers qui ne peuvent être utilisés que par une décision unanime des membres et uniquement en cas de rupture physique de l’approvisionnement. Cette stratégie équilibrée a contraint les pays de l’OPEP à ne plus jamais utiliser l’arme de la ‘fermeture du robinet’. En violation des règles de l’AIE, Joe Biden a pris à lui seul l’initiative de libérer des réserves à cause d’une augmentation de prix sans qu’il y ait rupture d’approvisionnement. Personne n’a réagi pour dénoncer le non-respect d’un président ‘politiquement correct’ d’une pratique datant de près d’un demi-siècle.

En plus, Biden s’est entouré de personnes qui détestent le pétrole et le gaz naturel. Par exemple Saule Omarova, nominée pour le poste de direction de la régulation bancaire des États-Unis a ouvertement déclaré que « nous voulons que [les entreprises pétrolières et gazières] fassent faillite » et que « la façon dont nous nous débarrassons de ces financiers du carbone est de les priver de leur source de capital »[v] (vidéo ici). Tout cela a des conséquences néfastes sur la production et l’exploration. Au Texas, les pétroliers ont du mal à financer les nouveaux forages,[vi] car des banques craignent de ne pas récupérer leurs prêts étant donné la politique d’abandon du pétrole et du gaz naturel de l’Administration Biden. Les États-Unis, qui grâce au savoir-faire de ses pétroliers étaient devenus grâce au pétrole et gaz de roche-mère le premier producteur au monde, se voient brusquement arrêtés dans ses exploits par des conséquences indirectes du rapport du GIEC et de l’accord de Paris.

Cet assaut contre le symbole de la réussite des É.-U. aura probablement un impact majeur sur les prochaines élections législatives du 8 novembre 2022 qui doivent renouveler un tiers du Sénat et l’ensemble de la Chambre des représentants.

L’UE a endoctriné l’Italie

Dans l’UE, des pays du G7 ont interdit jusqu’à la prospection d’hydrocarbures. L’exemple de l’Italie est le plus invraisemblable qui soit. Avec le potentiel de pétrole et le gaz naturel que recèle l’Adriatique, l’Italie pourrait être une puissance énergétique. La fédération pétrolière italienne a réalisé des études[vii] pour vérifier la présence d’hydrocarbures même là où cela était impensable : le bassin entre la Sardaigne et la Toscane, la mer Tyrrhénienne, la Campanie, la Calabre, le Molise et la Vénétie. L’Italie détient des ressources encore ignorées. Non loin de là, l’Égypte avec son gisement Zohr (découvert par l’entreprise italienne ENI), et Israël, avec son bassin Léviathan, sont devenus des producteurs en mer Méditerranée. Si l’Italie se décidait à faire de même dans sa zone économique exclusive, ce pays deviendrait un producteur important de pétrole et de gaz.

Non seulement il est interdit d’explorer en Italie, mais le pays se prive de tout ce qui pourrait en découler du point de vue industriel. Au lieu de cela, elle finance des énergies intermittentes et variables chères et qui ne diminuent presque pas ses émissions de CO2 puisqu’elles ont besoin d’un backup pilotable… d’énergies fossiles. ENI qui est une des compagnies les plus compétentes au monde en matière de prospection grâce à son savoir-faire et son centre de calcul de San Donato Milanese se fourvoie dans des projets solaires en Grèce en entrant dans le capital d’une entrepris financière allemande[viii].

Le chef d’orchestre de cet invraisemblable repliement est la Commission européenne. L’article 194.2 ne l’autorise pas à imposer un choix énergétique aux États membres, mais par le truchement des aides d’états[ix] et de la taxonomie, elle impose de facto son choix idéologique : stop aux énergies fossiles et à l’économie de marché dans le domaine de l’énergie. À présent, l’idéologie est totale. En quelques années, le soviétisme étatique s’est imposé à Bruxelles. Au cours de mes 36 années en tant que fonctionnaire à la direction générale de l’énergie de la Commission européenne, je n’ai jamais connu cela.

Comme les Américains reprochent à Joe Biden l’augmentation du prix de l’essence, les autres habitants des pays du G7 vont apprendre à leurs dépens qu’arriver à zéro pour cent d’énergie fossile est une grande utopie, comme cela a été démontré dans une étude récente publiée dans The European Physical Journal Plus[x]. La facture sera très élevée. Depuis que l’UE suit les ukases des Kadhafis et Khomeinys actuels, les énergies renouvelables qu’elle a poussées — l’énergie éolienne et solaire photovoltaïque — en dépensant plus de mille milliards d’euros[xi] rien que depuis 2000 n’ont permis que de remplacer 2,9 % des énergies fossiles[xii]. En presque un demi-siècle, moins de trois pour cent ! Seuls des démagogues peuvent imaginer arriver à 100 % en 28 ans.

Le principe de précaution, la politique climatique et la grande finance ont tué le marché

Lorsqu’en novembre 1980 ― en pleine crise énergétique ― Ronald Reagan devint président des États-Unis, des experts lui ont donné une série de conseils et de points d’attention, dont celui-ci qui nous concerne plus que jamais : « La bataille entre la réglementation gouvernementale et le marché privé n’est nulle part plus évidente que dans le domaine de l’énergie, où le marché dispose d’un avantage comparatif décisif. L’intrusion des pouvoirs publics dans la production et l’utilisation de l’énergie est un exemple flagrant de la façon dont la réglementation nous coute cher à tous[xiii]». Le G7 fait exactement l’inverse avec un contrôle total de la politique énergétique qui si ce n’était pour les subsides — c’est-à-dire nos taxes — s’écroulerait immédiatement.

Telle la grenouille qui se laisse bouillir parce que la température de l’eau monte lentement, nous découvrons aujourd’hui les méfaits des politiques qui apparaissaient sympathiques, mais qui sont aujourd’hui brutales.

En 2007, l’économiste Henri Lepage avait averti qu’« on va demander aux juges de vous sanctionner en décidant a posteriori de ce que vous auriez dû faire (ou ne pas faire) en fonction d’un ensemble d’informations qui n’étaient pas disponibles au moment où vous aviez à prendre la décision. On entre dans un univers qu’il faut bien qualifier de délirant »[xiv]. Nous y sommes. Les grandes compagnies productrices d’énergies fossiles font l’objet d’attaques de la part d’activistes climatiques par les tribunaux, voire de certains de leurs actionnaires. Nous ne prendrons que l’exemple de Shell qui a été obligée par une juge néerlandaise de réduire ses émissions de CO2 de 45 % entre 2019 et 2030 parce que les Amis de la Terre et six autres ONG ont déposé plainte. Pour la juge, Shell est coupable d’avoir contribué depuis des années à déstabiliser le climat. Pourtant, comme on vient de le voir, la Chine est responsable d’un tiers des émissions de CO2 mondiales. Shell, compagnie anglo-néerlandaise, a très bien réagi en déplaçant son siège au Royaume-Uni bien qu’elle soit très politiquement correcte. Mais comme Boris Johnson est autant écologiste que la juge néerlandaise, la major fondée en 1907 ferait mieux de se réfugier à Moscou.

Ces attaques contre les entreprises qui ont tiré d’embarras les pays de l’OCDE dans les années 1980 ne proviennent pas de l’OPEP, de l’Iran ou de la Russie, mais c’est en son sein que se trouve la matrice destructrice. Cette destruction de valeur se fait avec la complicité d’un monde financier toujours plus puissant comme le montre l’exemple de Black rock. Ce géant de la gestion d’actifs qui pilote quelque 10 000 milliards de dollars, soit 10 % du PIB mondial en 2020, a choisi d’imposer les mesures de décarbonation de l’économie. Elle est parvenue à imposer trois administrateurs chez ExxonMobil, l’entreprise pétrolière qui fut la plus grande au monde. Toshiba, autre géant industriel a changé son conseil d’administration pour des raisons semblables.

Les menaces se font de plus en plus pressantes partout ; même au Texas où les foreurs de gaz et pétrole de schistes ont à présent du mal pour obtenir des crédits bancaires. C’est évident que si les dégâts préparés par Biden, son responsable du climat — John Kerry — et les politiciens activistes tels Alexandria Ocasio-Cortez, adviennent même dans l’état le plus pétrolier des États-Unis, l’Iran a de beaux jours devant lui. En effet, le monde peut certes se passer des hydrocarbures américains, mais pas des hydrocarbures quitte à les payer plus cher et ainsi enrichir les adversaires des États-Unis. Et puisque le régime installé par Khomeiny en 1979 n’a pas changé et veut toujours la destruction d’Israël, est-ce que Washington et Bruxelles/Strasbourg réalisent que leur endoctrinement vert pourrait causer un désastre mondial dans quelques années ? La catastrophe serait bien pire que celle envisagée par les modèles du GIEC.

Ces idéologues du climat n’ont pas compris que pénaliser, voire éliminer, les six géants pétroliers et gaziers du G7 (ExxonMobil et Chevron des USA, Shell, BP, ENI et TotalEnergies de l’UE) ne va absolument pas impacter le climat ni mettre fin à la demande en hydrocarbures. Ce ne sont pas eux qui créent la demande, mais c’est notre vie moderne comme nous le rappelions au début de ce texte. De plus, ces ‘géants aux pieds d’argiles’ ne représentent que 15 % de la production pétrolière mondiale[xv]. Leur destruction par l’internationale verte des politiques, financiers et des ONG écologistes ne fera que renforcer l’hégémonie de ceux qui en produisent 85 % et qui pourraient bientôt en pomper 100 %, tout en créant des actifs échoués dans l’OCDE.

Saluons l’exception de l’Australie, un géant du charbon, du pétrole, du gaz naturel et en uranium. Son Premier ministre, Scott Morrison, avait même décidé de ne pas se rendre à Glasgow pour la COP26, mais la reine Élisabeth l’y a contraint. Vu le flop de cette COP, les faits ont donné raison au Premier ministre, un chef d’État qui contrairement à ses collègues du G7 entend sauvegarder l’économie de son pays. N’a-t-il pas dit au Parlement que l’Australie produira tout le charbon dont le monde a besoin ?

La Chine et la Russie, les bénéficiaires de la débâcle énergétique des pays du G7

 Cette débâcle énergétique qui est la nôtre — que je n’appelle pas crise, car il n’y a pas de rupture d’approvisionnement comme en 1973/1979 — est bien la faute de dirigeants du G7. La Chine (premier consommateur d’énergie au monde), la Russie (plus grandes réserves de gaz au monde) et l’Iran (10 % des réserves pétrolières et secondes réserves de gaz) s’en réjouissent. Ces trois adversaires des États-Unis vont continuer à produire et surtout consommer ce qui leur procure une énergie abondante et bon marché leur assurant ainsi un avantage de développement économique sur l’UE. L’UE — idiot utile — subira bien plus que les États-Unis les conséquences de cette débâcle.

Ali Al-Naimi, lors d’une réunion à Washington en 2002 alors qu’il était ministre de l’énergie de l’Arabie saoudite, a déclaré, « le pétrole n’est pas un char. Le pétrole n’est pas un F-16. Le pétrole n’est pas un missile. Il ne sera pas utilisé comme une arme. Il est une source de prospérité »[xvi]. Dommage que le G7 ne l’ait pas compris tandis que la géopolitique de l’énergie discrédite son écologisme. Ils ont préféré s’enfoncer dans l’idéologie verte au lieu de poursuivre comme par le passé la prospérité qui ne peut exister qui si l’on dispose d’énergie abondante et bon marché.

Les chefs de file du G7 se dirigent irrémédiablement vers un suicide géopolitique de l’énergie. Leur arrogance climatique les conduit à croire aux peurs décrétées par des modèles, à nier la réalité des causes profondes qui provoquent l’augmentation des prix de l’énergie — dont en particulier la pénalisation continue des énergies fossiles et de l’énergie nucléaire et la promotion inconsidérée des énergies renouvelables —, et à s’en prendre à Poutine alors que Gazprom respecte ses obligations contractuelles de livraisons de gaz. L’exploration du gaz est interdite, mais on exige que la Russie livre plus de gaz pour remplir nos stocks. On croit rêver !

L’aveuglement de Bruxelles/Strasbourg va conduire à amplifier hélas le rejet de l’UE comme le montre déjà la campagne électorale française en cours, sans même parler de la stupeur des pays d’Europe centrale et orientale. Quel gâchis ! On était pourtant bien partis.

Le dernier ouvrage de Samuele Furfari est « Écologisme. Assaut contre la société occidentale » (Éditions VA)

Samuel Furfari
Professeur en géopolitique de l’énergie
Président de la Société Européenne des Ingénieurs et Industriels
Ancien haut fonctionnaire à la Direction générale énergie de la Commission européenne
Docteur en Sciences appliquées, ingénieur polytechnicien



[i] Samuele Furfari, Le monde et l’énergie, Technip, 2007, Page 45

[ii] Samuel Furfari, General strategy for energy in the European Community, in G.E. Beghi, Syntetic Fuels, Reidel Pub. Comp. 1985,

[iii] Tom Miller, Asie centrale : la perte de l’Amérique est le gain de la Chine, Revue Conflits, 31 décembre 2021, https://www.revueconflits.com/asie-centrale-la-perte-de-lamerique-est-le-gain-de-la-chine/

[iv] Marc Deffrennes et Samuel Furfari, La France peut-elle ignorer l'impact de la sortie du nucléaire en Belgique ?, La Tribune, 28 décembre 2021

[vi] WorldOil, Shale drillers face record cost pressures as banks shun the sector, 12/29/2021, https://www.worldoil.com/news/2021/12/29/shale-drillers-face-record-cost-pressures-as-banks-shun-the-sector

[ix] European Commissiojn, Guidelines on State aid for climate, environmental protection and energy 2022, C(2021) 9817 final21.12.2021

[x] Furfari, S., Mund, E. Is the European green deal achievable? Eur. Phys. J. Plus 136, 1101 (2021), https://link.springer.com/article/10.1140%2Fepjp%2Fs13360-021-02075-7

[xi] Samuel Furfari, Le masochisme énergétique de l'Europ, Les Echos, 22/12/2021 https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/opinion-le-masochisme-energetique-de-leurope-1374341

[xii] Ernest Mund et Samuel Furfari, Énergies renouvelables dans l’UE : de la perception aux réalités, 22/11/2020, https://www.connaissancedesenergies.org/tribune-actualite-energies/energies-renouvelables-dans-lue-de-la-perception-aux-realites

[xiii] Wall Street Journal, Advice for a New President, 16 Novembre 1980, https://www.wsj.com/articles/SB10001424052970204880404577225870253766212, republié le 25 mai 2012

[xiv] Henri Lepage, Le principe de précaution : la fin du règne du droit, Objectif Liberté, 2007, https://www.objectifliberte.fr/ih-precaution-principle-fin-regne-droit.html

[xv] Dominique Finon, Les compagnies pétrolières face à la coercision climatique, La revue de l’énergie, n° 658, septembre-octobre 2021, page 32

[xvi] Samuele Furfari, Le monde et l’énergie. 1. Les clefs pour comprendre, Technip, 2007, page 252

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