"Libéralisation du commerce et mortalité ; données tirées des comtés américains". Alors que le débat général autour de la notion même de mondialisation divise largement les populations occidentales, la Réserve fédérale des États Unis publiait, en ce mois de novembre, un rapport de recherche au titre provocateur, n'hésitant pas à créer un lien de causalité entre le développement du commerce mondial et la surmortalité observée aux États Unis lors des 15 dernières années. Il ne s'agit plus de pointer les dégâts causés sur les usines ou les emplois manufacturiers, mais bien de mettre en évidence un niveau de détresse sociale, pouvant conduire jusqu'à la mort, d'un mouvement mondial orchestré depuis 15 ans.
Que cette publication, au-delà d'être émise par la Fed elle-même ; ait pu être relayée aussi bien par le Washington Post que par le Wall Street Journal, est également un choc en soi.
Tout a commencé lors de l'année 2015, lorsque le Prix Nobel d'économie Angus Deaton avait pu relever, aux États Unis, une hausse de la mortalité des personnes blanches de 45 à 54 ans, venant briser une tendance lourde de baisse observée depuis des décennies. Deaton avait alors pu démontrer que l'alcool, la prise de drogue, les cirrhoses, les maladies du foie, le suicide étaient les facteurs explicatifs de cette rupture.
En partant de ce constat, les économistes Justin Pierce et Peter Schott ont voulu aller plus loin, en testant, entre 1990 et 2013, comté par comté, la corrélation entre cette surmortalité observée et l'exposition à la mondialisation. Afin de tester efficacement leur hypothèse, les deux économistes ont souhaité observer plus particulièrement les 15 dernières années, c’est-à-dire depuis l'entrée de la Chine dans l'Organisation mondiale du commerce, et l'abaissement des barrières douanières américaines par l'administration Clinton, en 2000. Leur conclusion est nette.
"Nous relevons que les comtés les plus exposés (…) à la libéralisation du commerce présentent un taux de suicide plus élevé ainsi que d'autres causes connexes de décès, concentrés chez les blancs, et surtout chez les hommes blancs. Ces tendances sont conformes à notre conclusion indiquant que les comtés les plus exposés subissent un déclin relatif de l'emploi manufacturier, secteur dans lequel les hommes blancs sont représentées de façon disproportionnée."
Ici encore, les économistes confirment les premières estimations formulées par Deaton, en observant une hausse des décès par suicide, alcool, ou overdoses, pour les hommes blancs de 45 à 54 ans, qui se matérialise à partir de l'an 2000. La surreprésentation des hommes blancs dans le secteur manufacturier venant appuyer leur hypothèse.
Les deux économistes vont alors s'intéresser aux conséquences de la mondialisation sur l'emploi manufacturier américain, afin d'établir une éventuelle corrélation avec la hausse de la mortalité. Dans un précédent document, datant de 2014, Pierce et Schott avaient en effet établi un lien de causalité entre importations chinoises et baisse soudaine de l'emploi manufacturier aux États-Unis :
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