Atlantico : Ce vendredi 5 janvier, Emmanuel Macron recevra RecepTayyipErdogan, président de la Turquie, dans le cadre d'un entretien et d'un déjeuner à l'Elysée. Alors que la tentative de coup d'Etat en Turquie a pu être à l'origine d'un tournant politique en Turquie, comment envisager la relation de la France, de l'Europe avec le pays ?
Cyrille Bret : la visite du président turc à Paris marque le retour de la Realpolitik. Les dernières années ont été marquées, dans les relations entre la Turquie et l’Europe, par de nombreuses tensions. La tentative de coup d’Etat du 16 juillet 2016, la répression aux formes de purge massive de la fonction publique qui lui a répondu depuis, la réforme constitutionnelle d’avril 2017, le rapprochement avec Moscou et Téhéran dans la guerre en Syrie ont déboussolé puis rebuté les alliés occidentaux (Américains, Européens, Français) de la Turquie.
Cela s’est manifesté à plein, l’année dernière, lors des meetings que les proches d’Erdogan ont tenus ou essayé de tenir en Europe. On se souvient que les autorités néerlandaises avaient interdit les meetings du 11 mars 2017 qu’avaient organisé le ministre des affaires étrangères MevlutCavusoglu et la ministre de la famille Fatma Betül Sayan Kaya. Aujourd’hui, les Européens, sous l’impulsion du président Macron, semblent revenir à une approche désabusée de la Turquie. Ni naïveté pleine d’espoir ni cynisme sans principes, telle est la difficile ligne de crête à trouver.
Fabien Laurencon : En Allemagne, on constate – avec un vrai décalage par rapport aux positions françaises - l’esquisse d’une évolution similaire après la crise très grave de l’été 2017 traversée par les deux pays, marquée par des provocations verbales inouïes du président Erdogan, qualifiant la chancelière et son ministre des affaires étrangères Sigmar Gabriel de nazis et appelant en pleine campagne électorale allemande à voter pour les autres partis – cas unique d’ingérence dans la vie politique allemande.
Fin décembre 2017,RecepTayyipErdogansur le chemin du retour de son voyage en Afrique a multiplié les déclarations apaisantes devant la presse turque, n’excluant pas un déplacement en Allemagne ou aux Pays-Bas. S’agissant du sort des journalistes allemands détenus en Turquie, Ankara a également fait plusieurs gestes de bonne volonté au cours des dernières semaines, en libérant ainsi Peter Steudtner puis la journaliste Mesale Tolu, même si huit journalistes restent emprisonnés dont le plus emblématique, le correspondant du quotidien Die Welt, DenizYücel, est le plus sensible, Berlin considérant que sa détention sans aucune base juridique est un obstacle à la normalisation des relations entre les deux pays. Il est intéressant de mettre en perspective le cas de DenizYücel avec celui de son confrère français, Loup Bureau. La visite de Cavatoglu à son homologue allemand, Sigmar Gabriel prévue le 6 janvier à Goslar devrait marquer une nouvelle étape dans le « reset » de la relation germano-turque.
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