Le fondateur de MegaUpload lance son parti : du web à la politique, une transition difficile<!-- --> | Atlantico.fr
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"Je peux aider à transformer la Nouvelle-Zélande en un acteur important de l’économie numérique", affirme Kim Dotcom
"Je peux aider à transformer la Nouvelle-Zélande en un acteur important de l’économie numérique", affirme Kim Dotcom
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A l’abordage

Kim Dotcom, le célèbre et provocateur fondateur de la plateforme MegaUpload, a déclaré vouloir lancer un parti politique en Nouvelle-Zélande. Il met en exergue par ces propos les enjeux fondamentaux et les difficultés liés à la mobilisation numérique.

David Lacombled

David Lacombled

David Lacombled est journaliste de formation. Après ses missions gouvernementales comme chargé de cabinet entre 1993 et 1995, il devient consultant et fonde en 1997 la Société européenne de conseil et de communication, Orange bleue. Il est aujourd'hui directeur délégué à la stratégie des contenus du Groupe Orange. En mars 2013, il a publié Digital Citizen, manifeste pour une citoyenneté numérique chez Plon.

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Atlantico : Le fondateur de MegaUpload, Kim Dotcom, a annoncé au site d’information TorrentFreak qu’il comptait créer un parti politique en Nouvelle-Zélande, avec pour objectif de présenter plusieurs candidats aux élections parlementaires de novembre 2014. « Je peux aider à transformer la Nouvelle-Zélande en un acteur important de l’économie numérique », affirme-t-il. Sur quelle légitimité se fonde-t-il pour prétendre porter un programme politique ? S'agit-il d'un pur « coup de com’ » ?

David Lacombled, auteur de Digital Citizen (Plon) : La légitimité d’une femme ou d’un homme politique est celle que le scrutin électoral lui apporte. Le rôle d'un dirigeant politique est d'aller au feu électoral et il est assez cocasse de vouloir lancer un mouvement politique sans pouvoir se présenter soi-même. En France, on voit bien l’importance pour un parti politique de disposer d’un candidat crédible à l’élection présidentielle. Kim Dotcom n'est pas éligible en Nouvelle-Zélande. C'est un indicateur de la profondeur de son engagement pour des électeurs Néo-zélandais...

Internet est, avant tout, une agora politique particulièrement fréquentée dans les pays occidentaux où la population est majoritairement connectée. Les internautes, d'une manière générale, sont d'autant plus sensibles à la chose publique qu'Internet leur ouvre, de manière permanente une fenêtre sur le monde et leur donne tous les outils nécessaires à réagir à son évolution. C'est pourquoi la mobilisation numérique est une pratique courante, notamment chez les plus jeunes que ce soit à travers un don, la signatures de pétition, la participation à des manifestations.

Développer l'économie numérique, seule, ne saurait être un programme en soi. Elle doit faire partie intégrante d'une politique globale. 

Kim Dotcom n’est pas la première figure du web à se lancer en politique, les "partis pirates" sont déjà nombreux dans le monde. Que peuvent-ils apporter au débat politique ? Quelle population représentent-ils ?

Avec un milliard d'abonnés, Facebook pèse deux fois la population de l'Union européenne. C'est un Etat-continent en soi derrière la Chine et l'Inde. Il ouvre la voie à de nouvelles formes de citoyenneté. Les réseau sociaux fonctionnent comme un mégaphone planétaire permettant d’alerter et de mobiliser. Ils permettent également de cristalliser des engagements pour des causes sociétales ou politiques. 

Attention néanmoins au risque d'un engagement débridé voire superficiel. On ne s'engage pas à la légère en politique. Le Web est un moyen, pas une fin en soi. Néanmoins, on voit bien dans les manifestations à travers le monde le rôle catalyseur joué par les réseaux sociaux. L'effet a également joué à plein, en France, en début d'année. Le mouvement des Pigeons, des entrepreneurs mobilisés face aux réformes fiscales, a pu ainsi jouir du soutien de l'opinion publique.

Peuvent-ils se contenter de défendre les libertés sur le web pour durer en tant que parti politique ? Doivent-ils s’approprier toutes les autres questions politiques, économiques et sociétales pour espérer exister ?

La liberté est certainement la valeur clé qui réunit chaque citoyen connecté, quelque soit sa conviction politique. Mais aucun parti n'a jamais réussi à percer sur la défense d'une seule question. Pour vous présenter à une élection, vous devez avoir une réponse globale à tous les enjeux de société. Ne représenter qu'un thème, c'est prendre le risque d'obtenir un score très faible et de discréditer votre propre thématique, aussi belle soit-elle.

Le numérique est une formidable aventure. Cette révolution ne peut pas laisser de côté la moitié de la population mondiale. La responsabilité de ceux qui portent cette révolution est d'emmener ceux qui n'y ont pas encore accès. La première des priorités passe par l'éducation et la lutte contre l'illettrisme dès lors que plus aucun métier ne pourra se pratiquer sans ordinateur, tablette ou smartphone et la maîtrise d'un clavier.

Les partis déjà "traditionnels" déjà existants pourraient-ils s’approprier les thèmes défendus par les partis pirates, de telle sorte que ces derniers n’aient plus de raison d’être ? Au contraire, leur cause pourrait-elle continuer d’être boudée par les acteurs politiques traditionnels ? Pourquoi ?

Le numérique parle à l'individu là où la politique devrait parler à tous. Mais les deux notions sont réconciliables. Il y a certes une aspiration à plus de liberté mais aussi à plus de sécurité. Les citoyens veulent plus de transparence et plus de sens. La transparence exige des émetteurs bien identifiés à même de les garantir contre la désinformation, la manipulation et le viol des libertés. Le sens doit fournir les repères nécessaires à tout engagement. 

Les hommes politiques utilisent encore trop le numérique comme un outil de communication là où ils doivent entamer la discussion avec leurs électeurs car le numérique bouleverse toute notre société.

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