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Les bonnes et mauvaises nouvelles de l'urbanisation récente en Ile-de-France
©CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP

Pas très Haussmanien

Grand Paris, construction de quartiers résidentiels, l'Ile-de-France s'urbanise tous azimuts. Une vague de construction qui amène son lot d'inconvénients avec elle.

Quels sont les aspects positifs à retenir de l'urbanisation récente en Île de France ? 

Laurent Chalard: Avant d’en déterminer les aspects positifs, il convient de rappeler le contexte de mise en place de l’urbanisation récente de l’Ile de France. A la fin des années 2000, la région capitale se caractérisait par une pénurie importante de logements du fait d’un rythme de construction insuffisant depuis les années 1990 avec peu de terrains disponibles immédiatement à la construction dans un contexte de PLU et de SDRIF malthusiens. Il s’en suivait des tensions importantes sur le marché du logement avec une multiplication des ménages en suroccupation, la prolifération des marchands de sommeil et la difficulté de la décohabitation pour les jeunes. Pour résorber la pénurie en logements, la politique d’urbanisation lancée par l’Etat, impulsée sous Nicolas Sarkozy dans le cadre de sa politique du « Grand Paris » puis prolongée sous François Hollande par le gouvernement Manuel Valls, visait à produire « un choc de l’offre », avec comme objectif chiffré affiché : construire 70 000 logements par an. Qu’en est-il donc en 2018 ?

Le premier point positif de l’urbanisation récente en Ile de France, qui n’en est pas un des moindres, puisque c’était l’objectif premier recherché, concerne le plan quantitatif, avec un rythme de construction qui n’a jamais été aussi élevé depuis la fin des Trente Glorieuses, soit 81 300 logements mis en chantier pour l’année 2017, un doublement par rapport aux années de vaches maigres et 22,8 % de plus qu’en 2016. Les incitations de l’Etat ont donc été couronnées de succès, permettant de surmonter les réticences de nombreux élus locaux à construire plus. Un deuxième point positif concerne la politique d’urbanisation, qui privilégie la densification des zones déjà construites, que ce soit par la récupération de friches industrielles ou la destruction de pavillons pour laisser place à de l’habitat collectif. Contrairement à ce qui a pu se constater auparavant, l’augmentation du volume de construction ne contribue pas à la progression de l'étalement urbain. Enfin, un troisième point positif porte sur la localisation des nouveaux logements, qui privilégie, en règle générale, les axes de transport existants (métros, tramways) ou à venir (Grand Paris Express).

Quels en sont les aspects négatifs ? 

Si au premier abord, il pourrait paraître légitime de considérer que l’action de l’Etat central a pleinement atteint, tout du moins temporairement, ses objectifs, il n’en demeure pas moins que l’urbanisation récente de l’Ile de France souffre de nombreux maux, d’ordre qualitatif, le quantitatif l’ayant emporté sur le reste.

Le premier point négatif concerne l’architecture médiocre de la plupart des nouveaux quartiers de logements, avec des bâtiments géométriques (l’angle droit a fait son retour en force !), très souvent avec des toits plats et de couleur blanche. Ils donnent l’impression d’être des immeubles des années 1960 améliorés. Un deuxième point négatif a trait à la politique de densification de l’habitat, qui ne se fait pas toujours de manière pertinente, dans le sens qu’elle s’applique dans des zones sans centralité préexistante, or, l’expérience nous montre que les centralités créées ex-nihilo fonctionnent mal. Un troisième point négatif, consécutif de la densification, est que le pavillon devient une denrée rare, inabordable, contribuant à cantonner la majorité des franciliens à vivre dans un habitat collectif alors qu’une part non négligeable préfèrerait résider en maison. Ce processus renforce l’exode vers la Province. Enfin, dernier point négatif, certaines opérations massives, d’au moins un millier de logements, rappellent grandement les grands ensembles des Trente Glorieuses, comme « l’écoquartier » des Temps Durables à Limeil-Brévannes.

Quelles sont les priorités à suivre pour améliorer la situation actuelle ? 

Si les améliorations doivent concerner le plan qualitatif, néanmoins, sur le plan quantitatif, il convient de poursuivre l’effort car, étant donné les retards accumulés, il faudra au moins une décennie de construction massive de logements pour espérer amorcer une réduction des tensions sur le marché.

Sur le plan qualitatif, il convient que les acteurs locaux, à commencer par les édiles municipaux, comprennent l’intérêt qu’ils ont à ce que l’urbanisation soit qualitative, s’ils ne veulent pas que se constituent de nouveaux ghettos sur le modèle des grands ensembles des Trente Glorieuses. Il ne s’agit donc pas de construire n’importe où, n’importe quoi, n’importe comment, juste parce que c’étaient les seuls terrains urbanisables, mais d’avoir une réflexion poussée sur les densités à mettre en place (élevée dans les zones centrales, faible dans les zones périphériques même si elles sont desservies par un transport en commun), la qualité architecturale des bâtiments (abandonner la géométrie, refaire des toits à tuile, mettre de la couleur) ou encore sur l’intérêt de multiplier les petites opérations d’urbanisme plutôt que d’en effectuer de grandes, comme les écoquartiers, qui risquent de poser à terme les mêmes problèmes que les grands ensembles. Par ailleurs, la question de la place de l’habitat individuel en Ile de France doit être posée. Quel est son devenir ? 

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