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Ces hommes de plus en plus nombreux qui se font "gonfler" le pénis malgré les dangers encourus
©MARTIN BUREAU / AFP

Chirurgie esthétique

Les hommes sont nombreux à recourir à la chirurgie afin d'augmenter la taille de leur sexe. Cette pratique n'est pas sans risque.

Michelle  Boiron

Michelle Boiron

Michelle Boiron est psychologue clinicienne, thérapeute de couples , sexologue diplomée du DU Sexologie de l’hôpital Necker à Paris, et membre de l’AIUS (Association interuniversitaire de sexologie). Elle est l'auteur de différents articles notamment sur le vaginisme, le rapport entre gourmandise et  sexualité, le XXIème sexe, l’addiction sexuelle, la fragilité masculine, etc. Michelle Boiron est aussi rédactrice invitée du magazine Sexualités Humaines

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Atlantico : Pour quelle raison les gens se tournent-ils vers la chirurgie pour augmenter la taille de leur sexe ? Quel est leur profil ?

Michelle Boiron : Pour la première fois dans l’histoire, l’homme doit rendre des comptes  sur sa sexualité. Le dévoilement de son intimité et sa codification ont fait apparaitre de nouvelles normes  esthétiques pour être « sexuellement correct » !
La taille du sexe en fait partie. L’homme est examiné, scanné, mesuré, évalué par ce monde extérieur sans pitié : sa sexualité n’échappe plus à l’évaluation.
Avant il était déjà confronté à une réussite business, politique sociale. 
Aujourd’hui Il est question de la taille de son sexe, de la durée de son érection, de sa capacité à faire jouir la femme… Et aussi de quelle manière la partenaire obtient  l’orgasme.  Clitoridien ce n’est pas tendance,  aujourd’hui la femme exige l’orgasme vaginal. Alors comment y arriver ?
La norme non atteinte entraine chez l’homme culpabilité, honte, désespoir crainte d’être quitté, licencié pour objectif non atteint…. Quelquefois sans indemnité. Alors apparait la taille de son sexe, comme peut être une solution pour résoudre tous ces problèmes. Précisément parce que ses  repères viennent souvent des films pornos visionnés.  
Or les acteurs pornos ne sont pas représentatifs d’une normalité quelconque pas plus qu’un gage de réussite sexuelle. Néanmoins l’homme prend comme repère ce qu’il a vu et pense naïvement que c’est la panacée et qu’il va atteindre le nirvana grâce à la taille de son sexe. 
La chirurgie lui propose de réaliser ce fantasme d’un grand pénis comme lorsqu’il était petit et qu’il apercevait  celui de son père ! Alors certains tentent l’opération sans forcément mesurer l’impact psychologique de toucher à cette zone sexuelle.  Ce n’est pas anodin. La décision doit être murement réfléchie. Si l’homme est en couple l’adhésion de la partenaire est préférable. De la même manière l’opération des seins chez la femme est aussi à envisager, parler,  au « sein » de la cellule du couple. 
Même si, à priori chacun dispose de son intimité et sait ce qui est bon pour lui.
L’impact sur l’homme, sans tiers (sans partenaire), est une meilleure indication.  L’homme qui a un complexe non lié à une norme faussée par les magazines et la société peut l’envisager en n’oubliant pas de prendre quelques précautions médicales et psychologiques.

Assiste-ton à une hausse de ce genre de demandes ? A quoi peut-on le relier

De manières générales l’homme  consulte alors qu’il n’y a pas si longtemps nos consultations étaient plutôt féminines, l’homme ne venait que contraint et forcé souvent par madame qui avait une plainte à formuler contre lui.
La demande de l’homme était surtout orientée en premier lieu sur l’aspect fonctionnel de son sexe. Avait-il une érection suffisante ? Etait-il sujet aux pannes ? L’arrivée des nouvelles molécules de types IPDE5 ont permis à l’homme de régler ce problème dans un premier temps. Ca marche. La panne érectile est enrayée. Il restait toujours  la question de l’autonomie. L’homme n’était plus maitre de son érection. Il dépendait d’un tiers médicament, d’une molécule pour l’atteindre. Et surtout la question va se poser à chaque rapport envisagé.  
Le trouble érectile vaincu, c’est aujourd’hui  la taille du sexe qui est questionnée, même si évidemment ce n’est pas de même nature.   
C’est une interrogation posée par l’homme depuis toujours. La médecine grâce à l’acide hyaluronique notamment et la chirurgie esthétique peut lui apporter une réponse. Les interventions chirurgicales ont pris un essor inouï chez l’homme  depuis quelques temps.  L’homme se trouve soumis, au même titre que la femme a pu l’être,  au dictat de l’esthétique. En témoigne  le congrès de Médecines et de Chirurgies esthétiques uniquement consacré à l’homme.  
Il s’est tenu  au palais des congrès Porte Maillot le 8 septembre 2018. Cette chirurgie, jusqu’alors plutôt féminine touche l’homme.  On a pu constater un marché gigantesque qui touche les zones sexuelles mais aussi les cheveux, le visage, la zone abdominale… 
La tendance est donc à la retouche des imperfections du corps dans sa totalité, du visage précisément parce que tout est possible aujourd’hui d’un point de vue technique. L’aspect psychologique n’est pas souvent pris en compte et peut donner lieu a des retombées douloureuses.  

Les résultats parviennent-ils à satisfaire les patients ? 

Tout dépend de la demande que le patient a formulée avant l’opération ? Qu’attend-il comme résultat ? Le résultat esthétique ? Le résultat de performance sexuelle ? Palier au complexe du vestiaire ? D’où émanait cette demande : de lui, de la partenaire, de la norme de la société ?
Comme dans n’importe quelle chirurgie, les suites opératoires peuvent être douloureuses. En revanche du fantasme à la réalité il y a souvent tout un monde dont la nouvelle « mesure » ne prend pas en compte.  L’anxiété voire l’angoisse d’utiliser son nouveau sexe lors d’un rapport peut parfois déclencher une crainte et un résultat un peu décevant. S’approprier son nouveau sexe n’est pas une mince affaire.  Le leurre, de la toute puissance liée à quelques centimètres de plus, n’est pas forcément atteint par le résultat opératoire et la déception est à la hauteur d’une attente mal formulée ou démesurée.
N’oublions pas que la rencontre sexuelle sera toujours la rencontre de deux êtres de deux corps imparfaits. Il ne peut être une obligation de résultat, de performance. Ce n’est pas une équation mathématique ni une recette de cuisine. Encore moins le leurre de la perfection comme sauveur de la relation sexuelle entre deux êtres.
Alors que l’homme redevienne juste un homme avec une part de virilité (pas liée à quelques centimètres de plus ou de moins de pénis), de force, une part d’humilité, de spiritualité, d’amour. L’homme n’est pas comme le proclament  certaines féministes une femme comme une autre. L’image de soi peut être évidemment corrigée quand le défaut est majeur et invalidant. La chirurgie fait alors des miracles. Mais lorsqu’il s’agit d’une intervention pour restaurer l’estime de soi ce n’est pas si évident que le résultat soit à la hauteur des attentes. On est aux portes de l’intime. Ce n’est pas rien.

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