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Ces dangers que court l’Europe à croire que l’inflation est en hausse alors qu’en réalité, elle baisse
©DANIEL ROLAND / AFP

Dans le détail

Selon les données fournies par Eurostat, l'inflation au sein de la zone euro a atteint 2% en août, en légère hausse. Mais hors alcool, alimentation et tabac, elle a en fait baissé.

Frederik Ducrozet

Frederik Ducrozet

Frederik Ducrozet est économiste senior chez Pictet Wealth Management, en charge de l'Europe, depuis septembre 2015. Auparavant, il était économiste chez Credit Agricole CIB entre 2005 et 2015. Spécialiste de l'économie européenne, et de la politique monétaire de la BCE en particulier, ses travaux portent notamment sur le cycle du crédit, les politiques monétaires non-conventionnelles et leurs conséquences pour les marchés financiers.

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Atlantico : Selon les données fournies par Eurostat, l'inflation au sein de la zone euro a atteint 2% en août, soit une légère hausse de 0,1 point par rapport au mois précédent. Cependant, derrière cette hausse, la baisse de l'inflation hors alcool, alimentation, tabac s'est pour sa part contractée à 0,9% contre 1,0% le mois suivant. Entre la hausse et la baisse, cette contraction de l'inflation "core" n'est-elle pas la plus à "surveiller" ?

Frederik Ducrozet : Si l’inflation en zone euro est au-dessus de 2%, c’est avant tout le résultat de la hausse des cours du pétrole, un effet qui est amené à s’estomper dans les mois qui viennent. La vraie déception du mois de septembre vient encore une fois du « noyau dur » de l’inflation, sa tendance sous-jacente, qui a légèrement ralenti sur le mois. En pratique, la baisse est minime, de 0.96% en août à 0.94% en septembre, mais une hausse était attendue notamment après de bons chiffres publiés en Allemagne.

La BCE attend depuis longtemps un rebond plus marqué et durable de l’inflation sous-jacente pour valider sa stratégie de normalisation de la politique monétaire. Le taux de chômage continue de baisser, les salaires ont accéléré en 2018, ce qui laisse espérer que la fameuse courbe de Phillips reste valide comme cadre d’analyse même sous une forme « recalibrée ». Ne reste que l’inflation, en bout de chaîne, pour le confirmer. Or si ce rebond tarde à se matérialiser et que de nouveaux risques interviennent, la BCE pourrait se retrouver une nouvelle fois contrainte de repousser les hausses de taux.

Quels sont les risques de voir apparaître une insatisfaction liée à la hausse des prix, notamment dans les pays qui y sont le plus confrontés, dans un tel contexte ?

Le risque d’une déflation généralisée à l’ensemble de la zone euro est quasi nulle aujourd’hui, mais la croissance des salaires et des prix domestiques n’est pas encore suffisamment forte pour devenir auto-alimentée. L’inflation importée, qui a pu aider à stabiliser les anticipations au début du cycle, n’est plus un atout.

En Italie, le risque immédiat est celui d’un effondrement de la confiance et de l’activité. Mais si les salaires et l’inflation venaient à ralentir également, ce serait un risque supplémentaire pour la soutenabilité de la dette publique puisque c’est la croissance nominale qui intervient au dénominateur du ratio de dette sur PIB.

Que peut-on anticiper pour les prochains mois sur cette question ?

A très court terme, un certain nombre de facteurs exogènes vont pousser l’inflation sous-jacente à la hausse, notamment un effet de base purement technique lié à la baisse des prix de l’éducation en Italie en octobre 2017 qui va disparaître du calcul de l’inflation le mois prochain. Ces facteurs sont connus, et c’est l’ampleur du rebond qui sera déterminante pour les perspectives à moyen terme, à commencer par les projections d’inflation de la BCE qui seront mises à jour en décembre.

En 2019, là aussi, des vents contraires pourraient de nouveau entraîner de la volatilité dans l’évolution des prix à la consommation au mois le mois mais la tendance devrait rester à la hausse si la croissance tient le choc dans un environnement mondial incertain, le chômage baisse, et les salaires se raffermissent. Autant de conditions à remplir pour que la BCE puisse effectivement espérer relever ses taux en fin d’année, pour la première fois depuis plus de huit ans.

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