JC Fromantin : "Le centre ça n’est pas se situer dans un équilibre droite gauche ni un consensus tiède comme celui de François Bayrou"<!-- --> | Atlantico.fr
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Selon Jean-Christophe Fromantin,"Le centre, ça n’est pas se situer dans un équilibre droite-gauche".
Selon Jean-Christophe Fromantin,"Le centre, ça n’est pas se situer dans un équilibre droite-gauche".
©Reuters

Mise à jour du logiciel politique

A l'occasion de la sortie de son dernier livre," La France réconciliée", Jean-Christophe Fromantin nous fait part de son diagnostic sur les fractures entre les élites politiques et l'électorat. Selon lui, le centre ne doit plus se contenter d'une attitude médiatrice entre deux partis mais incarner une véritable vision pour la France.

Jean-Christophe Fromantin

Jean-Christophe Fromantin

Jean-Christophe Fromantin est Maire de Neuilly-sur-Seine depuis 2008 et député des Hauts-de-Seine depuis 2012. Entrepreneur dans le secteur du commerce international, il a créé plusieurs sociétés et il est l’un des rares chef d'entreprise à siéger à l’Assemblée nationale. Il crée le groupe UDI à l’Assemblée nationale avec Jean-Louis Borloo en 2012 puis participe à la création de l’UDI dont il fut candidat à la présidence et vice-président jusqu'en novembre 2014.

Convaincu que la France a besoin d'un grand projet qui confirme sa vocation dans la mondialisation, fixe ses axes de croissance et stimule son attractivité, Jean-Christophe Fromantin est à l'origine du projet d’Exposition Universelle pour la France en 2025.

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Atlantico : Dans votre livre "La France réconciliée" vous proposez de nombreuses propositions "afin de changer le logiciel politique". Comment diagnostiquez-vous les fractures que vous dénoncez, principalement entre les partis politiques et le peuple ? Une plus grande collégialité n'est-elle pas justement à l'origine d'un affaiblissement de la représentation des différentes sensibilités électorales ?

Jean-Christophe Fromantin : La politique a trop souvent recherché le plus petit dénominateur commun. Pourtant, l'attitude qui consiste à essayer de convenir à tout le monde est contraire à l'ambition politique qui doit se positionner comme une démarche pleinement engagée. Un projet politique doit être fort et innovant, risqué en somme. Or, ce que je note c'est que les politiques sont de moins en moins engagés.

Comment ce phénomène s'illustre-t-il ?

La majorité des expressions politiques aujourd'hui relèvent davantage de la réaction, de l'émotion ou du court terme. La mondialisation ou l’Europe, par exemple, sont trop souvent des boucs-émissaires plutôt que des nouvelles échelles à intégrer dans un projet politique  … Nous nous retrouvons donc davantage dans une politique qui subit, qui ajuste, que dans une politique qui propose une véritable vision.

A l'une des questions fondamentales de notre séquence politique, à savoir - quelle position adopter face à la mondialisation ? - la droite comme la gauche n'apportent pas de réelles perspectives. La droite se cantonne le plus souvent à occuper le terrain des thématiques populistes, là où il y a le plus d'échos, alors qu'elle devrait décrire son projet pour la France.

Est-ce d'après vous pour cette raison que le terrain de la vision politique à long-terme est aujourd'hui investie par les intellectuels, comme Alain Finkilekraut, Eric Zemmour, ou encore Emmanuel Todd ? Qui souhaitent renouveler les systèmes politiques ?

Les intellectuels sont aussi des politiques, c’est important qu’ils s’engagent. Mais à bien y regarder la politique gravite en réalité autour des corporatismes, des syndicats et des contre-pouvoirs. Elle se fait également dans les think-tanks, ou dans les grandes entreprises qui rythment de plus en plus la vraie politique économique et celle de l'emploi. Cet écosystème périphérique à la politique occupe de plus en plus le terrain des idées, des projets et de l'action, et engendre une perte de crédit des politiques, sensés occuper ce rôle. Le politique devrait être l'aiguillon d'une pensée, d'un projet. Quand par exemple l’Etat délègue le dialogue et la négociation sociales aux partenaires sociaux plutôt que de prendre ses responsabilités avec de grandes réformes de structures – comme l’ont fait les Allemands dans le cadre des réformes Hartz – on peut alors douter de son efficacité à engager la France sur une réelle trajectoire d’avenir.

Où se situe donc le problème dans la chaîne entre les idées novatrices, et leur incarnation par les politiques ? Se résume-t-il à un manque de courage de la part de ces derniers ? -          

La racine de ce problème tient au fait que les partis politiques ne sont plus des lieux de réflexion et de décision pour un construire un avenir collectif et une perspective de bien commun, mais des espaces où on assure la pérennité des carrières. On m'a trop souvent dit que l'objectif d’un parti n'était pas de faire un projet, et que je n'étais pas suffisamment "politique". Or je ne peux me résoudre à imaginer que le débat de fond appartienne à d’autres et que les partis gèrent des carrières. Arrêtons de penser la politique comme un métier, réhabilitons le sens de l’engagement. Faire de la politique de façon professionnelle ne veut pas dire devenir un professionnel de la politique. C’est à cette condition qu’on retrouvera les valeurs d’audace et de courage.

Pour en revenir au centre, ne pensez-vous pas à contrario que c'est le rejet du bonapartisme qui écarte toute incarnation d'un projet ?

Il y a clairement une ambiguïté que je dénonce, celle de se situer dans un équilibre droite-gauche, un consensus tiède que l'on retrouve dans les positions de François Bayrou par exemple. Or le centre a une ligne extrêmement claire, issue de la démocratie chrétienne, qui comporte trois marqueurs fondamentaux que sont le territoire, la base de départ de tout projet politique pour réorganiser l'Etat et les institutions dans un esprit de subsidiarité ; l'entreprise qui est le moteur de l'économie ; et la famille qui est un élément fondamental pour une construction humaine comme politique ; sans oublier la perspective européenne comme un formidable médiateur entre la France et la mondialisation.

Ces marqueurs-là nous dissocient véritablement de l'UMP et du jacobinisme sous-jacent à son identité. L'UMP est une autre droite, et nos deux formations proposent des solutions différentes bien que souvent compatibles.

En quoi peut-on dire que nos entreprises et nos territoires peuvent s'adapter à l'économie mondialisée ? Dans un contexte économique difficile, comment les Français pourraient ne plus percevoir la mondialisation comme un double risque, à la fois économique et social ?

Si on prend conscience des atouts de notre identité et de l'appétence du monde pour notre pays, alors les Français comprendront que la mondialisation est aussi une chance. Les nouveaux consommateurs des pays émergents, future classe moyenne mondiale, sont les grands moteurs de la croissance. La France est toujours classée dans les trois premiers pays qui les intéressent en termes de culture, de façon de vivre, de marques… Quand on vit dans un pays qui porte naturellement autant d'atouts, on n'a pas le droit de se plaindre et de ne pas tout mettre en œuvre pour réussir. Nous devons fertiliser nos atouts en permanence. C'est d'ailleurs tout le sens du projet que je porte d’une candidature de la France à une exposition universelle de 2025, pour mobiliser les entreprises, innover et valoriser nos savoir-faire

Comment notre société peut-elle placer les jeunes au cœur de son projet d'avenir malgré la défiance exprimée à son égard ?

Les jeunes ont besoin d’engagements forts et d’ambitions. Quel est le regard qu'ils ont aujourd'hui sur le débat politique, fait de tensions, de haines et de petits combats ? Quand on a 20 ans, on rêve de valeurs, d'absolu, de grands projets. Et quand ils voient nos élites politiques se battre sur des affaires qui se succèdent semaine après semaine, ils ont de quoi être effaré par cet égoïsme et ces chamailleries politiciennes. La politique ne les fait pas rêver. Ils préfèrent donc aller là où il y a un regard optimiste sur l'avenir.

Dans l'histoire économique, on voit qu'à certains moments la France détenait vraiment cette foi en l'avenir, cette envie de rayonner comme au XIXème. Aujourd'hui, quelle est l'ambition collective de la France ? Il n'est pas exagéré de penser qu'elle est nulle.

J'ai été extrêmement marqué, comme je le décris dans mon livre, par cette séquence menée avec 500 jeunes sur l'exposition universelle. Nous leur avons dit : "Si la France a une ambition pour 2025, c'est à vous de la gérer". L'énergie dégagée était formidable ; ces centaines de jeunes universitaires ou issus de grandes écoles se sont penché sur l'avenir de la France pendant plusieurs mois et ont fait des propositions extraordinaires.

Je crois qu'il faut dessiner d'une perspective non pas autour des partis mais autour de projets. 90% des Français se méfient des partis, offrons-leur plutôt de participer à la réalisation d’un projet pour la France. 

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